[Interview découverte] Julie Watai, ou la capture de la culture geek

Véritable icône de la culture geek, « Julie Watai »:http://juliewatai.com/ fait partie des invités du « Tokyo Crazy Kawaii Festival »:http://www.crazykawaii.com/fr/ qui aura lieu du 20 au 22 septembre à Paris. Le public aura l’occasion de découvrir son travail de photographe à travers une exposition qui, à n’en pas douter, marquera les esprits tant l’univers de la jeune fille est singulier.
Entre nounours, câbles USB, cartes graphiques et maillots de bain, cette boulimique du travail évoque pour Journal du Japon son parcours et ses projets.
 

© Julie Watai - Activelink CO.,Ltd

 

Journal du Japon : Bonjour Julie Watai ! Pour les lecteurs qui ne vous connaissent pas, pourriez-vous vous présenter ?
Julie Watai : Je m’appelle Julie Watai, je travaille au Japon entre autres comme photographe en numérique, multi-artiste et musicienne. C’est en tant que photographe que je participerai à « Tokyo Crazy Kawaii Paris »:http://www.crazykawaii.com/fr/. Mes œuvres relèvent généralement de la « street photography »:http://en.wikipedia.org/wiki/Street_photography : je prends en photo la culture des différents quartiers de la ville de Tokyo et je les retouche numériquement. La culture internet de Tokyo fait aussi partie de mes sujets.

Qu’est-ce qui vous a décidé à faire de la photographie de manière professionnelle, quel a été le déclic ?
Le déclic est venu quand j’étais au lycée et que je réalisais des portraits de cosplayers. De fil en aiguille, je me suis retrouvée à travailler à plusieurs reprises comme assistante du célèbre photographe japonais « Nobuyoshi Araki »:http://fr.wikipedia.org/wiki/Nobuyoshi_Araki. Et j’en suis arrivée à ce que je fais maintenant. Mon premier livre de photographies s’appelle « SAMURAI GIRL »:http://www.dragolab.com/shop/samurai-girl, il a été publié en Italie en 2006.

Couverture de "SAMURAI GIRL"  © Julie Watai

Ce livre a d’ailleurs eu un succès retentissant, pouvez-vous nous en expliquer le concept ?
À l’époque, Internet n’était pas aussi développé qu’aujourd’hui et les informations mettaient encore du temps à arriver. Je pense que le Japon avait encore un peu l’image d’une île lointaine en Asie avec des animes, des voitures, des geisha et des sushi. Le fait que je publie mon livre en Italie m’a fait réfléchir et axer mon travail sur des choses bien connues qui avaient l’air visiblement japonaises. Mon but était de donner au lecteur l’impression qu’il faisait un voyage au Japon, ce pays des merveilles mystérieux.

Pourriez-vous nous parler un peu de votre parcours et de vos références ?
Je suis très attirée par la science-fiction depuis toute petite, et ce depuis que j’ai lu Akira de Katsuhiro Ôtomo.

Quand j’étais en primaire, je participais au Comiket en éditant et vendant des dôjinshi, et en faisant du cosplay. Je voulais devenir mangaka, et plusieurs fois j’ai proposé des dessins. Vers le lycée, j’ai commencé à chanter des génériques d’anime comme idol, mais même à cette période je n’ai jamais arrêté de faire des choses créatives. Mon style actuel est l’aboutissement de toutes ces formes d’expression personnelle que j’ai pu essayer, mais je pense qu’il va encore évoluer … .

Vous êtes un peu une touche à tout : photographe, model, chanteuse, DJ … dans tout cela, quelle est l’activité qui vous plait le plus, et pourquoi ?
Quand je travaille comme photographe, je fais quasiment tout : stylisme, coiffure, maquillage, prise de vue, jusqu’à la retouche finale. J’aime beaucoup pouvoir contrôler de A à Z ce petit monde que je crée sur papier glacé à partir de rien. Mannequin, chanteuse, DJ : ce sont des activités que je ne peux pas faire toute seule. Dans ce sens, c’est complètement différent mais c’est aussi très plaisant de se laisser transporter dans le monde artistique de quelqu’un d’autre et de partager un espace d’expression.

Julie Watai en plein shooting photo © Julie Watai

Parlons justement de votre mode de travail : comment se déroule la création de vos costumes et des décors ? Est-ce que vous les dessinez vous-même et si oui d’où vient l’inspiration ?
Les costumes, je les réalise moi-même. Avant la prise de vue, je fais des dessins préparatoires complets de costumes pour être sûre d’obtenir la meilleure composition possible.

Mes inspirations sont vraiment très variées. Il m’arrive souvent de trouver des idées pendant que je surfe sur le net, ou tout simplement en marchant dans la rue. Je ne trouve pas l’inspiration quand je regarde mes propres travaux. Je suis influencée transversalement, notamment par des œuvres graphiques comme les mangas, les animes, etc. C’est peut-être pour ça que certains à l’étranger m’appellent « manga photographer ».

Pour vos prises de vue, quel matériel utilisez-vous ?
J’utilise un EOS 5D Mark 2. Mais d’autres modèles plus récents sont sortis depuis et je voudrais en changer bientôt. Je pratique beaucoup la retouche par ordinateur, c’est pourquoi je choisis surtout mes appareils en fonction de leur résolution. De plus, je règle mes paramètres de couleurs personnalisées à l’avance sur mon ordinateur, donc j’ai besoin d’un appareil sur lequel je peux transférer ces réglages facilement.

Au final, quelle est la photo qui est pour vous la plus représentative de votre travail ?
Je trouve que la photo de couverture de SAMURAI GIRL est celle qui me représente le mieux. Cela fait maintenant 14 ans que je l’ai prise mais elle a encore beaucoup de succès.

Nous évoquions tout à l’heure vos différents travaux d’artistes, notamment en tant que chanteuse. Pouvez-vous donc nous parler de votre groupe JulieHally ?
C’est un groupe de musique formé avec Hally, un musicien chiptune qui est aussi le webmaster du plus grand site asiatique de chiptune, « VORC »:http://www.vorc.org/. Je chante et je m’occupe aussi du design graphique. J’aime beaucoup car cela a beau être de la musique composée et jouée sur des consoles comme des NES ou des ATARI, ce sont de vraies chansons avec de la voix, agréables à écouter.

Vous animez également une émission de radio, HARDWARE GIRLS RADIO, pourriez-vous nous en dire plus à son sujet ?
C’est une radio diffusée sur Internet qui a vu le jour cette année. Si vous regardez le « lien ustream »:http://www.ustream.tv/channel/juliewatai%E3%81%AEhardware-girls-radio sur ma page « Facebook »:https://www.facebook.com/juliewatai?fref=ts, vous pouvez aussi avoir l’image en direct. On a de nombreux invités très différents en rapport avec la culture. Si vous étudiez le japonais, n’hésitez pas à écouter nos émissions !

Enfin, pourriez-vous nous parler de votre travail dans le cadre du projet mishmash*Julie Watai ?
C’est l’ingénieur du son Toyoaki Mishima, collaborateur de longue date de « Cornelius »:http://www.youtube.com/watch?v=u76XEmLdWz0, qui est le centre du projet, avec le producteur MASUYAMACOM. J’y contribue en tant que « featuring ». C’est un projet plutôt axé sur l’art que la musique pop, mais il est très intéressant dans son côté « indie ».

« Le site officiel mishmash*up »:http://mishmashjp.com/ est l’œuvre du designer « Yûgo Nakamura »:http://en.wikipedia.org/wiki/Yugo_Nakamura qui a notamment été lauréat du Grand Prix du Festival international de la publicité à Cannes. C’est un site qui fourmille de choses très intéressantes et il permet de découvrir l’univers du projet directement sur Internet.

Puisque vous être l’invitée du Tokyo Crazy Kawaii festival, qu’est-ce que représente pour vous le « kawaii » ? Plus qu’un genre vestimentaire, est-ce un mode de vie, une façon de penser selon vous ?
Le kawaii, c’est par exemple, dans les animes ou les mangas japonais, ce cliché de « la jolie fille combattante ». Prenez Nausicaä, elle est connue dans le monde entier. Mais les Américains la verront plutôt comme une « amazone ». Au Japon, le kawaii peut aussi englober cette image de fille forte. Il y a un proverbe japonais qui dit : « le faucon malin cache ses serres ». Le kawaii, c’est aussi ça : la force cachée de la femme japonaise qui revêt une apparence douce et féminine tout en étant sûre d’elle et décidée à avancer dans la société.

Quel est pour vous le quartier de Tokyo le plus représentatif de la jeunesse japonaise, et pourquoi ?
En ce moment, c’est Akihabara. C’est le quartier de Tokyo qui bouge le plus vite. Tous les contenus qui intéressent les jeunes sont là : animes, Vocaloid, jeux vidéos … . Même en restant à la surface, on s’amuse beaucoup, mais si on creuse un peu le quartier en profondeur, c’est sans fin. Il y a énormément de jeunes qui viennent s’amuser à Akihabara comme à Shibuya, et qui font des allers-retours entre les deux quartiers.

Évoluant au cœur de ces quartiers, quelle est selon vous ce qui bouge le plus en ce moment au Japon? Quel est LA chose absolument « in » ?
Dans ce contexte de crise, les gens n’ont pas beaucoup d’argent et ceux qui veulent faire des choses intéressantes se retrouvent désormais sur le net. Il y a notamment Twitter qui a un très grand nombre d’utilisateurs au Japon : c’est vraiment fun, toutes ces informations que l’on voit défiler sur la timeline.

Qu’est-ce que cela vous fait de participer au Tokyo Crazy Kawaii Festival ?
Je ne suis pas revenue à Paris depuis Japan Expo, il y a deux ans. C’est une ville où travaillent beaucoup d’artistes et de musiciens très intéressants et j’aimerais bien avoir l’occasion de jeter un œil à tout cela. 

© Julie Watai - KILUCK CORPORATION - Room JMC Inc.

Merci beaucoup pour vos réponses !

Retrouvez  Julie WATAI sur son Facebook , Twitter , Instagram et sur son site .

Visuels © Julie Watai – Activelink CO.,Ltd & KILUCK CORPORATION – Room JMC Inc.

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