[Dossier] Makoto SHINKAI : la distance nous rapproche tant

Quand on parle de films d’animation japonais, c’est au Studio Ghibli que la majorité d’entre-vous pense. Or, il existe un certain nombre de réalisateurs qui arrivent à sortir du lot tant par la qualité graphique proposée que par le choix des thèmes abordés. C’est le cas de Makoto SHINKAI, un réalisateur encore méconnu du grand public bien que certains journaux le présentent déjà comme le successeur de Hayao MIYAZAKI.
Journal du Japon vous propose donc de découvrir cet homme multitâche qui a déjà de nombreux fans, à travers son univers, son parcours mais aussi ses films clés.
 
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Quinze ans de carrière

Makoto SHINKAI, né le 9 février 1973 à Nagano, est réalisateur de film d’animation, graphiste, doubleur et écrivain. Diplômé en littérature japonaise, sa passion pour l’animation, les mangas et l’écriture remonte à son plus jeune âge. C’est en 1999 que le public le découvre en tant que réalisateur, lors du Comiket, avec Kanojo to Kanojo no Neko, un court-métrage en noir et blanc qui rencontre un fort succès.

Il commence alors pleinement sa carrière suite à l’obtention d’un prix d’animation en 2000, sa renommée lui permettant de trouver une place dans l’entreprise CoMix Wave. Cette dernière est spécialisée dans la production et distribution de films d’animation amateurs ou professionnels et aident à les diffuser.

The Voices of a Distant Star / Hoshi no Koe sort en 2002 et est entièrement réalisé et écrit par Makoto SHINKAI. L’histoire débute en 2046 et raconte la vie de Nagamine Mikako et Terao Noboru. Nagamine s’est engagée dans les forces armées pour combattre une force extraterrestre, les Tarsians, à bord d’un Traceur. Elle voyagera dès lors à travers le système solaire pour la combattre. Le seul moyen de communication entre Noboru et Nagamine se résume à des e-mails. Plus elle s’éloigne, plus l’attente d’un nouvel e-mail est longue. Comment leur relation va-t-elle évoluer à travers le temps et l’espace?
Il existe deux versions du film. La première est doublée par Makoto SHINKAI lui-même et sa fiancée (et diffusé par Mangazoo). La seconde quant à elle fait appel à des doubleurs de CoMix Wave

Pour son second film, La Tour au-delà des nuages / Kumo no mukou, yakusoku no basho, Makoto Shinkai quitte le format du court-métrage pour le long. Dans un Japon fictif, le pays s’est vu divisé en deux parties après la Seconde Guerre Mondiale. Nous suivons l’histoire de trois amis vivant dans la partie contrôlée par les Américains, l’autre partie étant contrôlée par l’Union, dont le pouvoir est détenu par les Japonais. L’Union érige une tour immense dont la nature reste inconnue. Hiroki Fujisawa et Takuya Shirakawa, deux amis, tentent de construire un avion pour rejoindre la tour, tant elle les fascine. Ils feront connaissance de Sayuri Sawatari, et vont se promettre de se rendre à la tour. Sur fond de tension entre les deux nations, leur promesse s’essouffle de plus en plus jusqu’au jour où l’un d’eux disparaît.
Ce film remporte de nombreux prix internationaux. Comme à son habitude, Makoto SHINKAI s’occupe en grande partie de la réalisation du film mais s’est tout de même entouré d’une équipe. Il a écrit lui-même les paroles de la chanson qui conclut le film.

5cm per second / Byosoku Go Senchimetoru – a chain of short stories about their distance est certainement la production à voir dans la filmographie de Makoto SHINKAI. Il se présente dans un format de trois courts-métrages. L’histoire parle de Takaki Tôno et Akari Shinohara qui sont deux élèves récemment transférés dans une école à Tokyo. Se découvrant une passion commune de la lecture, ils vont alors se rapprocher petit à petit. Puis un jour, Akari déménage…

Pour ce film, SHINKAI quitte le monde de la science-fiction mais son thème de prédilection, la distance et l’amour, est toujours présent. Le titre fait référence à la vitesse de la chute des fleurs de cerisiers et symbolise le temps qui passe, à la fois lent et rapide. 

C’est assurément le film qui le représente le mieux et avec lequel il affirme son style.

Par la suite, Makoto SHINKAI  change radicalement ses habitudes pour Voyage vers Agartha / Hoshi wo ou kodomoLa différence de ce film tient tant par le design des personnages que par le thème de la mort omniprésente. A l’affiche, on ressent une très nette influence des Studios Ghibli.

voyage_vers_agartha_afficheIl nous raconte les aventures d’Asuna qui voit sa vie chamboulée suite à la rencontre d’un jeune garçon, Shun. Ce jeune homme lui dit qu’il vient d’un monde nommé Agartha et vont se lier d’amitié. Malheureusement, ce garçon disparaît le lendemain. C’est alors qu’un nouveau professeur, Morisaki Ryuuji, arrive et souhaite se rendre à Agartha. Il est dit qu’en Agartha, il y aurait un secret pour retrouver des êtres disparus. Dès lors, Asuna et son professeur vont partir en quête de ce monde à la recherche d’un être cher. 

Pour ce film, des connaissances sur les coutumes japonaises étaient nécessaires afin de bien apprécier et savourer ses précédentes œuvres. Mais Voyage vers Agartha possède un univers qui lui est propre et que l’on pouvait déjà retrouver, par touches, dans son premier court-métrage, The Voices of a Distant Star. Il s’est notamment inspiré du livre “Piramiddo bôshi yo, sayônara” de Yoshiko OKKOTSU, lu dans sa jeunesse, et en reprend la trame tout en y incorporant des croyances nippones telles qu’Izanagi et Izanami.

 

Son dernier film en date, The Garden of words / Kotonoha no niwa, est un court-métrage qui abandonne le côté grand public pour de nouveau dépeindre la vie quotidienne. 

Il raconte l’histoire de Takao Akizuki, un collégien souhaitant devenir cordonnier. Bien qu’étant un métier difficile, il a pris pour habitude de sécher les cours les matins de pluies et de se rendre dans un parc pour s’adonner à sa passion : dessiner des chaussures. Un jour, il rencontre une jeune femme plus âgée, Yukari Yukino. Tous deux, sous un même abri, vont se retrouver ensemble les jours de pluies et apprendre à se connaître.

Ce film emprunte des vers du Manyôshû, plus vieux recueil de poésies japonaises. Il permet au film de dégager une atmosphère envoûtante. Pour les musiques, on peut noter un fait inhabituel : il n’a pas fait appel à son compère de longue date, Tenmon, mais à un autre compositeur, Daisuke Kashiwa. Ses musiques collent parfaitement au film, selon Makoto SHINKAI.

Makoto SHINKAI : l’univers du quotidien 

MakotoMakoto SHINKAI est clairement un des acteurs majeurs de la japanimation actuelle et ce n’est pas dû au hasard. Il accorde énormément d’importance aux décors, à la fois réalistes et sublimés à leur maximum pour marquer l’esprit des spectateurs. Bien plus que les mots, le fait que la plupart de ses films se déroulent dans des lieux existants permet de capter l’attention, facilitant une identification. Il considère d’ailleurs qu’avoir un minimum de connaissance sur le Japon est nécessaire pour apprécier ses œuvres. C’est pour cela que la plupart de ses productions ont un point commun, celui de commencer par une vision d’un train, de rails ou d’une gare, afin d’entrer dans la vie de tous les jours des personnages. Makoto SHINKAI a d’ailleurs passé énormément de temps dans les trains pour trouver les lieux ou décors de ses films.

 

Exemples de scènes d'ouvertures de films

Exemples de scènes d’ouvertures de films

Chez ce réalisateur, les paysages et panoramas sont donc omniprésents mais la musique a aussi son importance. Presque toutes les musiques sont composées par Tenmon, à l’exception de The Garden of the Words. Devenu son acolyte à l’époque où il travaillait pour des entreprises de jeux vidéo, il a une confiance absolue en ses compositions car ce dernier arrive à saisir parfaitement ce qu’il désire : l’harmonie des images et la musique, qu’il voit comme une composante fondamentale de son travail. C’est pour cela qu’il s’occupe également du choix des doubleurs : les monologues confèrent ainsi une ambiance typique à ses œuvres. 

Une autre présence est également  récurrente dans ses productions : le chat ! Un fait qui peut certes sembler anecdotique, mais que les fans ont bien remarqué via son absence dans The Garden of the Words. Sur ces images, non dénuées d’humour, Mimi, le « chat » de Voyage vers Agartha, est mis à l’écart pour montrer que ce film est différent des productions précédentes de Makoto SHINKAI. Sûrement parce qu’on ressent trop l’influence des films d’Hayao MIYAZAKI, que ce soient par certains passages, les personnages ou même les créatures.

Blague 1 Blague 2 Blague 3

La comparaison de Makoto SHINKAI et Hayao MIYAZAKI n’est pas anodine. Tout deux réalisateurs de talent, ils accordent beaucoup d’attention à la façon de produire et réaliser leurs films. Les références de SHINKAI à MIYAZAKI existent, mais leur cinéma diffère. On reconnaît les films du premier par ses décors, alors que ceux de MIYAZAKI se distinguent par la pâte graphique de GHIBLI ainsi que l’animation. Lorsque l’on dit d’ailleurs à SHINKAI qu’il est pressenti pour être le prochain grand réalisateur après MIYAZAKI, l’homme n’aime pas trop la comparaison et dit qu’on le surestime.

L'inspiration Nausicaa de la vallée du vent ou Le Chateau dans le ciel sont palpables

Les inspirations de Nausicaä de la vallée du vent ou Le Château dans le ciel sont palpables

 

Reference a un des films de Hayao Miyazaki pour cette fois assumer

Référence à Hayao Miyazaki clairement assumée

Mots de fin

La grande force de Makoto SHINKAI est de pouvoir de communiquer ses messages non pas par les mots, mais par les images qu’il transpose à l’écran. Le rapprochement avec l’auteur bien connu Jiro TANIGUCHI, qui utilise le même mode d’expression, est d’ailleurs faisable. On pourrait lui reprocher de toujours utiliser la même formule d’un amour ou d’un but insaisissable. Malgré tout il a su, au fil des années, se créer un univers ancré dans le quotidien et se forger une solide réputation qu’il saura confirmer, à n’en pas douter, pour son prochain film, prévu en 2015 !

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Bonus : les autres travaux…

 Makoto Shinkai, en parallèle de ses productions cinématographiques, a collaboré avec pas mal d’entreprises pour les promouvoir. Voici une liste, non exhaustive, de ce qu’il a pu produire :

Dareka no Manazashi :


Crossroad
: La publicité sponsorise les cours à distance. Sublime !


A Gathering of Cats : Vidéo diffusé sur la NHK dans l’émission Ani*Kuri15

Pour la Taisai Corporation :

Et enfin Other Worlds, sa vraie première vidéo créée  :

Makoto SHINKAI a aussi écrit deux romans basés sur ses films avec la collaboration de Arata Kanô, écrivain, romancier : 5cm per second et The Garden of the Words. Ces romans nous permettent d’avoir les points de vue de tous les personnages présents. Enfin, quelques mangas ont été réalises sous la supervision de Makoto SHINKAI. En voici la liste :

  • Hoshi no Koe : Manga et roman.

  • La tour au-delà des nuages : Manga et roman.

  • 5cm per second : Manga et roman.

  • Voyage vers Agartha : Manga. (disponible en France)

  • The Garden of Words : Manga et roman.(disponible en France)

Des artbooks, story-board ou mêmes des applications sont également disponibles. Ses films sont disponibles aux éditions Kaze

Vous pouvez suivre Makoto SHINKAI sur son Twitter officiel, où il diffuse régulièrement des images inédites de son futur film.

Sources : myanimelist, Kaze, Wikipedia, pixiv

3 réponses

  1. DoDoz dit :

    En fait on pourrait clairement créer une équipe de choc pour reprendre Ghibli. Quand on voit les travaux de Mamoru Hosoda aussi.. :3

    • Paul Ozouf dit :

      DoDoz> Du coup on peut se demander s’il vaut mieux reprendre Ghibli et tout son héritage plus ou moins lourd ou reprendre quelque chose à zéro, pour une nouvelle génération.

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