Les éditions Imho : « Mangas, cinéma, essais, littérature, art de vivre »

Voici un nouveau portrait d’éditeur. Cette fois-ci, honneur aux éditions IMHO qui publient aussi bien des livres sur le cinéma que des essais, de la littérature et des mangas originaux. Rencontrez un éditeur éclectique et découvrez quelques titres de la belle collection japonaise qu’il propose aux lecteurs !

 

Benoît Maurer et ses passions …

Benoît MaurerJournal du Japon : Pouvez-vous vous présenter aux lecteurs du Japon ?
J’ai aujourd’hui 44 ans, et donc ma première découverte avec la culture japonaise a été la diffusion des dessins animés sur les chaines nationales comme dans le club Dorothée. J’habitais à la campagne, nous n’avions pas accès à de bibliothèque, j’ai donc vraiment découvert le Japon à travers tous les dessins animés qui étaient diffusés à l’époque : Cobra, Saint Seiya, Hokuto No Ken, etc. Je suis ensuite venu à Paris pour poursuivre des études de lettres et commencer l’école du Louvre. J’ai pu découvrir le milieu du journalisme en devenant pigiste jeu vidéo pour le site chronicart.com. J’ai ensuite travaillé pour Euro Services Internet en tant que rédacteur en chef de différents magazines informatique. Puis, on m’a demandé de créer ex nihilo un magazine consacré à la culture populaire japonaise sous toutes ses formes : Japan Mania. Cela a été le second contact et l’élément vraiment déclencheur. Si j’avais un intérêt pour le Japon, j’étais à l’époque surtout attiré par son cinéma, aussi bien classique que contemporain. La découverte de séries comme Lain, Evangelion, ou de jeux vidéo ont vraiment déclenché une envie d’en savoir plus. Le magazine Japan Mania a aussi été à l’origine de mes premiers contacts avec des auteurs japonais de manga, une première rencontre du monde de l’édition et de son fonctionnement.

Comment est née votre maison d’édition ?
À l’arrêt du magazine Japan Mania, j’avais un PEL de 13000 euros et de nombreux amis montaient leur maison d’édition. Je me suis pris au jeu et j’ai lancé les éditions IMHO en septembre 2003. La ligne éditoriale était claire pour moi : il partait du principe que le manga était tout sauf un effet de mode et que les lecteurs de Naruto allaient grandir et souhaiter découvrir d’autres œuvres destinées à un public de jeunes adultes. D’où le nom de IMHO qui était un acronyme du web signifiant In My Humble Opinion, « à mon humble avis » en français, un moyen de dire modestement aux lecteurs de s’intéresser à ce que nous leur proposions. C’était pour moi aussi important de montrer que le style graphique du manga n’était pas unique mais que des auteurs japonais créaient des œuvres qui étaient différentes narrativement et graphiquement, mais étaient tout aussi intéressantes. Nous avons commencé à travailler avec beaucoup d’auteurs issus de Garo, la revue culte créée dans les années 60 par Sampei Shirato et d’Ax, une revue d’avant garde qui a pris la suite de Garo : Hideshi Hino et Suehiro Maruo par exemple. Et nous avons commencé à travailler avec des auteurs contemporains comme Junko Mizuno ou Atsushi Kaneko.
Vous publiez à la fois « manga, essais, littérature, art de vivre » comme c’est écrit sur votre site. C’est très éclectique, comment choisissez-vous les livres que vous publiez ?
Dès Japan Mania, j’avais une approche ouverte et éclectique qui était de créer des ponts entre les différentes disciplines, de voir comment un jeu vidéo pouvait influencer un manga, comme un roman pouvait créer une série animée, etc. J’ai gardé cette ouverture dans la maison d’édition même si le catalogue est aujourd’hui pour plus de la moitié des mangas d’auteurs japonais. En cinéma, nous avons notamment mis en avant le travail de Mamoru Oshii, Koji Wakamatsu et plus dernièrement Hayao Miyazaki. Dans la partie Art de vivre, nous allons publier cette année un livre sur le saké et un livre sur le thé japonais. Le guide sur Kyoto a pour l’instant été repoussé car suite à la situation sanitaire, il est difficile de se rendre au Japon. Cet éclectisme est aussi en lien avec nos lecteurs, ils sont avides de connaissance sur le Japon. Ils n’ont pas seulement envie de lire un manga mais d’en savoir plus sur une culture et un pays qui les attirent.
Pouvez-vous nous parler de votre Japon ? Votre première rencontre avec le pays (à distance puis en y allant). Vos lieux préférés. Les pans de la culture japonaise qui vous plaisent le plus.
J’ai rencontré mon épouse qui est japonaise en France, donc la première rencontre avec le pays fut pour aller voir mes futurs beaux-parents à Nara. J’ai donc beaucoup visité cette partie du Japon 🙂
J’adore Kyoto, j’ai toujours en tête d’y déménager un jour, j’adore Kyushu et Okinawa également.
Et peut-être un point pandémie : comment avez-vous géré et gérez-vous encore la crise dans votre maison d’édition ?
C’était une année très étrange, car nous avons privilégié le travail sur le fond avec peu de nouveautés. Nous avons quasiment réimprimé l’intégralité des livres qui étaient en rupture (ce sera chose faite cette année), et donc ce fut une année très riche.
Quelques livres de votre maison d’édition que vous avez particulièrement envie de faire connaître aux lecteurs de Journal du Japon ?
Pour la partie manga, Souvenirs de la mer assoupie de Shynia Komatsu, quelque chose de très doux et de très beau qui raconte les aventures fantastiques d’un petit garçon. N’importe quel Shintaro Kago, qui travaille l’érotique grotesque avec un sens de la précision dans le trait, de l’absurde des situations et une inventivité complètement folle. Et pour la partie cinéma, le livre sur Hayao Miyazaki de Susan Napier qui réalise une super belle étude des films du maître.
Merci Benoît Maurer, et bonne continuation à IMHO pour 2021 !
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Maintenant, à nous de vous présenter quelques titres pour un petit tour d’horizon, en lisant notre sélection ci-dessous…

Quelques beaux livres autour du Japon

Nori, une bande-dessinée tendre et poétique

Nori de Rumi Hara aux éditions Imho, couvertureRumi HARA est illustratrice et autrice de « comics » (elle vit à New York depuis quelques années). Les éditions Imho permettent au lecteur français de découvrir un livre de toute beauté, à la couverture colorée pleine de nostalgie, et aux pages d’une étonnante bichromie qui change au fil des chapitres, le tout dans un sens de lecture occidental. Car Nori est un recueil de six histoires tendres, de tranches de vie de la petite Noriko (que tout le monde appelle Nori), âgée d’un peu plus de trois ans.

Elle est élevée au quotidien par sa grand-mère car ses deux parents travaillent beaucoup. Ses aventures se passent dans les années quatre-vingt, dans la banlieue d’Osaka (avec un merveilleux voyage à Hawaï). La fillette est très remuante, déborde d’énergie et échappe souvent à la surveillance de sa grand-mère pourtant toujours attentive et attentionnée. Celle-ci déborde d’amour pour sa petite-fille et lui apprend des chansons, lui raconte des histoires, des légendes japonaises (le lapin de la lune, la présence bienfaitrice des chauve-souris dans les maisons, une grenouille dorée lors de la fête d’Obon …). Les histoires mêlent réalité de petite fille (qui va à l’école, a des amis, veut suivre les grands, fait parfois des colères vite oubliées grâce à grand-mère qui fait tout pour chasser les petits soucis) et  univers fantastique issu de son imagination (elle danse avec des lapins, des têtards de la rivière, des tortues marines d’Hawaï et même des pingouins).

Nori de Rumi Hara, page intérieure (éditions Imho)Graphiquement, c’est d’une richesse pleine de vie. Les décors sont dessinés dans les moindres détails, de l’intérieur de la maison avec ses tatamis, ses gros futons, la cuisine qui déborde d’ustensiles, la salle de bain où l’on joue et met de l’eau partout à l’extérieur qui grouille de personnages, d’échoppes pleines à craquer, de véhicules, mais aussi de palissades, de verdure (le lecteur sera émerveillé par la beauté des paysages d’Hawaï !). Et la bichromie apporte de la profondeur, du volume, presque une dimension supplémentaire, plus de vie, de chaleur, de douceur et de poésie. On peut rester de longues minutes dans une page, à admirer chaque détail, à scruter la composition d’un bento sur la table de la cuisine, le fouillis dans les casiers de l’école, les beaux motifs d’un kimono ou les différentes plantes de la jungle hawaïenne. Et observer comme si on y était le combat entre un scarabée et une écrevisse. Un vrai régal pour les yeux ! On entendrait presque les marchands nous appeler, les enfants rire et le feuillage vibrer dans le vent.

Plongez dans cet univers poétique et nostalgique, dans lequel transparaît tout l’amour que Rumi Hara porte à ses grand-mères auxquelles elle dédie ce superbe livre sur une enfance japonaise !

Plus d’informations sur le site de l’éditeur.

Le monde de Miyazaki de Susan Napier : pour découvrir ou redécouvrir l’homme et ses œuvres

Le monde de Miyazaki de Susan Napier, éditions Imho : couvertureC’est une Américaine spécialiste de l’animation japonaise (et qui donne des cours sur Miyazaki) qui a écrit ce gros livre retraçant la vie de ce grand maître qu’est Hayao MIYAZAKI, en plongeant aux sources de son inspiration (son enfance, les traces laissées par la guerre, le jardin familial, les lectures) et en retraçant sa carrière au fil de ses créations (une chronologie, film après film, permettant de voir l’évolution de l’artiste).

Un ouvrage passionnant qui regorge de témoignages, d’anecdotes et qui permet de découvrir toutes les facettes de l’homme et de ses films.

Après avoir évoqué son enfance, sa famille, ses lectures – tout ce qui a laissé des traces – le livre plonge le lecteur dans les couloirs de Tôei Animation où Miyazaki restera huit ans et fera des rencontres décisives.

Puis, film après film, c’est toute la pensée, la philosophie de vie du maître qui est expliquée, détaillée, de témoignages en interviews, d’interprétation des scènes en regard perçant sur les personnages. Chaque chapitre est consacré à un film, qui est décortiqué, raconté, de telle sorte que le lecteur a l’impression de revivre les scènes qu’il a vues et adorées avec un plaisir certain.

Un livre très agréable à lire pour les fans qui seront ravis de redécouvrir tous ces grands films sous le regard d’une spécialiste qui transmet sa passion avec énergie et émerveillement.

Plus d’informations sur le site de l’éditeur.

D’autres nouveautés sont à découvrir en ce printemps.

Une plongée dans l’univers merveilleux de Shin’ya KOMATSU (qu’on avait nous aussi adoré dans Souvenirs de la mer assoupie) est à nouveau possible avec Un été à Tsurumaki dans lequel un jeune garçon a le pouvoir de parler aux plantes. On retrouve la même poésie teintée de surréalisme et de nostalgie. Une véritable bouffée d’oxygène, un voyage précieux en ces temps compliqués.

Un été à Tsurumaki de Shin'ya Komatsu : couverture Devenir Japonaise de MariNaomi : couverture  

Et un très beau roman graphique, Devenir Japonaise, par une Américano-japonaise, Mari Naomi, qui raconte ses expériences dans des bars à hôtesses de San Jose et Tokyo, et sa reconnexion avec la culture japonaise qu’elle avait oubliée depuis l’enfance. Une approche originale de la redécouverte de ses racines, de la culture japonaise, une réflexion sur l’identité, les pays d’où l’on vient et où l’on vit.

Un choix très vaste pour que tout le monde puisse trouver son bonheur… à découvrir sur le site de l’éditeur et en librairie !

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