Le shamisen : la mélodie venant du passé

Si vous connaissez les instruments musicaux japonais traditionnels, vous avez dû entendre parler du shamisen. Il est sans conteste parmi les plus célèbres. C’est un luth à manche long et aux trois cordes pincées qu’on voit souvent lors des représentations théâtrales traditionnelles japonaises comme le kabuki et le bunraku. Utilisé dans plusieurs styles musicaux, le shamisen raconte des choses appartenant à un autre temps avec ses sonorités venues d’ailleurs. Vous voulez en découvrir davantage ? Rejoignez-nous pour une découverte musicale !

Un instrument ayant traversé les âges

Cet instrument traditionnel trouve ses origines en Chine. On considère que le shamisen est dérivé du sanxian (littéralement « trois cordes »), un instrument chinois qui est arrivé dans le royaume Ryūkyū au sud du Japon au 16e siècle. Dans la langue d’Okinawa, les caractères pour le sanxian se prononcent sanshin. Après l’arrivée du sanxian aux îles Ryūkyū, il est devenu l’instrument le plus important de la musique folklorique et de la cour. On en jouait avec les styles chinois dans la musique de cour intérieure. De ce fait, il n’y a pas de réelle distinction entre sanxian et sanshin. Or, le sanshin actuel possède une caisse de résonance plus ronde et plus grande qu’auparavant.

Il fait par la suite son apparition dans les autres îles de l’archipel japonais avec les échanges commerciaux vers le 17e siècle. Au départ, il était recouvert de peau de serpent. En raison de difficultés à se procurer de la peau de serpent, on l’a remplacée par de la peau de chat. Au fil des années, la méthode et les styles de jeu ont changé. Le nom shamisen qui signifie « trois cordes du goût » a remplacé le nom originel de cet instrument traditionnel et sa forme de base s’est établie. Certes, le shamisen est dérivé du sanshin mais ce sont maintenant deux instruments distincts.

C’est sur ordre de Hideyoshi TOYOTOMI que les plus anciens shamisen ont été fabriqués à Kyoto. À l’époque d’Edo, les geishas s’entraînaient au jeu du shamisen. Il est ​l’instrument le plus difficile à maîtriser parmi toutes les options des geishas. Le shamisen devient également un instrument indispensable pour le kabuki, une forme de théâtre traditionnel japonais. Il sert donc à accompagner le chant. Aujourd’hui, on combine souvent le shamisen avec différents styles de musique. Par exemple, les groupes ROA (Relic of Ancestor) ou Wagakki Band mélangent le shamisen et la musique rock. L’utilisation du kabuki dans la musique actuelle montre bien que cet instrument traditionnel japonais est capable de résister au temps et aux modes.

Komomo and Mameyoshi

Komomo and Mameyoshi – Photo de Joi Ito (Flickr) (CC BY 2.0)

Le banjo japonais et son jeu

Mesurant de 110 à 140 cm, le shamisen ressemble par sa longueur à une guitare avec un manche plus fin sans frettes. Le c’est-à-dire la caisse de résonance de forme rectangulaire est recouverte sur les deux faces d’une peau d’animal qui permet d’amplifier le son des cordes. On utilise généralement de la peau de chat ou de chien mais dans les temps anciens, un type de papier spécial était également utilisé comme matériel pour la fabrication du shamisen. De nos jours, on se sert de différents types de plastique comme « peau » de cet instrument. Les trois cordes tendues qui vont du sommet du manche au bas de la caisse de résonance sont quant à elles faites de soie ou de nylon.

Une bonne posture assise est importante. Traditionnellement, on s’assoit en seiza sur le sol, en ouvrant les genoux à la largeur de sa taille afin de faire de l’espace. Puis, on place le corps de shamisen au genoux droit et laisse le shamisen se pencher sur le corps. Les cordes de cet instrument sont grattées avec les doigts. Il se joue également à l’aide d’un large plectre à longue poignée appelé le bachi, traditionnellement fait en ivoire ou avec une carapace de tortue. On l’utilise pour ébranler les cordes et frapper la caisse en créant un son percutant. À présent, le bachi est habituellement fait en bois et en forme de feuille de ginkgo. Dans les premiers temps de son arrivée au Japon, le shamisen se jouait avec un petit onglet adapté sur l’index. Ce sont les musiciens de biwa (un luth à manche court qui est arrivé au Japon plus tôt) qui ont changé cette habitude avec le plectre.

La structure du shamsien

La structure du shamsien ©Robert Pontsioen

 

Plusieurs types de shamisen

Il existe différents types de shamisen et de nombreux types de plectres permettant de créer un large éventail de sons. Les shamisen se distinguent par leur taille de cou. On vous propose de découvrir les trois principales tailles de shamisen et quelques styles qui leur sont associés.

Futozao (taille du cou épais)

Un Futozao est couramment utilisé pour le style tsugaru ou le gidayu.

On considère que le style tsugaru, tranchant et percutant, a été créé par les musiciens aveugles qui ont développé un style plus vivant pour attirer le public. Ces dernières années, de nombreux musiciens talentueux ont adopté le tsugaru shamisen et l’ont rendu populaire en tant que style instrumental virtuose. Les pointes du bachi pour le tsugaru shamisen mesurent entre 1 et 2 mm. 

Plutôt que le tsugaru centré sur le solo, le style gidayu a été développé pour se jouer lors de pièces de théâtre. Ce style utilise un bachi avec des pointes de 7 mm d’épaisseur. L’épaisseur extrême des accessoires confère un ton unique au gidayu shamisen.

Chuuzao (taille du cou moyen)

Un Chuuzao Shamisen est couramment utilisé pour le jiuta (musique classique traditionnelle) ou le minyo (chansons folkloriques japonaises).

À l’époque d’Edo, jiuta signifie « chants du pays ». Depuis le 18e siècle, il est devenu courant de jouer le shamisen avec le koto. Maintenant, koto et jiuta shamisen sont étroitement liés. Le jiuta est considéré comme étant un style plus raffiné avec un bachi pouvant mesurer jusqu’à 14 cm.

Le minyo était à l’origine chanté entre le travail ou à des métiers spécifiques. Il peut accompagner des danseurs ou être joué lors de rituels religieux. 

Hosozao (taille de cou mince)

Un Hosozao Shamisen est généralement utilisé pour le style nagauta (chant traditionnel).

Nagauta signifie « longue chanson » et commence par un enchaînement de plusieurs courtes chansons. Comme il est le style le plus développé au sein du théâtre kabuki d’Edo, il est souvent appelé « Edo nagauta ». En tant qu’instrument principal utilisé dans le kabuki, il est joué dans un large éventail de modes, y compris des chansons très lentes et régulières. Il peut également être joué assez rapidement en utilisant une variété de techniques d’accentuation. Les nagauta bachi sont traditionnellement fabriqués à partir d’ivoire… Mais ils sont de nos jours plus généralement fabriqués à partir de bois ou de plastique.

Attention, les différents types de shamisen s’utilisent couramment avec une taille de cou particulière mais cela ne veut pas dire que les styles variés de musique nécessitent des tailles spécifiques. Par exemple, les shamisen pour le style tsugaru sont souvent de taille futozao (cou épais), mais ils sont également fabriqués en hosozao (cou fin) pour s’adapter à la taille du musicien.

Les differents styles de shamisen

Les différents styles de shamisen ©Bachido

Le shamisen dans la culture populaire

Le shamisen est considéré comme un instrument représentatif de la tradition japonaise. Son apparition dans les films et les mangas contribue à augmenter sa valeur artistique. Dans cette dernière partie, nous vous invitons à apprécier la présence du shamisen dans certaines œuvres. 

Dans les mangas

Impossible de lire des mangas et de n’être jamais tombé sur l’instrument. Le shamisen donne ainsi une ambiance traditionnelle et mystérieuse. Sans faire une liste exhaustive, voici quelques titres qui y font référence.

Dans Gintama, le shamisen est utilisé à la fois comme instrument de musique mais également comme arme très menaçante de Bansai Kawakami, personnage secondaire qui fait partie des membres du Kiheitai (« Armée de soldats démons »). Son instrument ne sert pas qu’à produire de la musique. Bansai utilise son shamisen pour y cacher une épée cachée bien pratique lors d’un combat. L’instrument lui-même est aussi une arme avec laquelle il peut bloquer ses adversaires ou même les couper avec les cordes très fines du shamisen.

Dans Demon Slayer, le shamisen est lié à Zenitsu Agatsuma, un compagnon de voyage de Tanjiro Kamado. En raison de son ouïe extrêmement fine, il est incroyablement doué pour les instruments à cordes comme le koto et le shamisen. Il a montré son talent au shamisen dans le “Red Light District Arc” du manga qui sera abordé dans la saison 2 de l’anime à venir.

Au cinéma

Le personnage de Zatoïchi est devenu mondialement connu du public grâce au film Zatōichi de Takeshi Kitano en 2003. Et le voyageur aveugle en avait vu d’autres avant : 26 films ainsi qu’une série télévisée avant le film de Kitano. La saga s’inscrit pendant l’ère Tokugawa, une époque caractérisée par la centralisation du pouvoir du gouvernement shogunale de 1603 à 1868. Le héros est un vagabond aveugle et mystérieux qui erre de ville en ville. Il gagne sa vie en prétendant être un praticien d’acupuncture, un masseur, un chanteur et un joueur de shamisen. L’instrument correspond à l’époque mais cela permet aussi de créer une atmosphère encore plus traditionnelle et mélancolique.

Dans les animés

Il est courant d’utiliser le shamisen pour évoquer une époque lointaine. Comment oublier la bande-son des animés Naruto et Naruto Shippuden écrite et interprété par le collectif Yasuharu Takanashi & YAIBA qui fait la part belle aux instruments traditionnels dont le shamisen.

Contrairement aux autres séries qui intègrent le shamisen, Mashiro no Oto est entièrement sur cet instrument traditionnel. Adapté du manga éponyme de Marimo Ragawa qui compte plus de 20 volumes au Japon, l’animé a été produite par le studio d’animation Shin-Ei Animation et est sorti récemment en avril 2021 (et est toujours disponible sur Crunchyroll). L’histoire nous entraîne dans la vie de Setsu Sawamura, un jeune prodige de shamisen qui perd sa capacité de jouer depuis la mort de son grand-père. Il se rend seul à Tokyo à la recherche d’une nouvelle inspiration, ​​où il fait la rencontre avec une jeune fille, Yuna Tachimura. La série se construit autour du shamisen mais ​​on y montre également d’autres arts musicaux originaires du pays. C’est un animé à ne surtout pas rater pour ​​les amateurs de musique.   

 

En résumé, le shamisen date depuis longtemps et il a trouvé sa place en tant qu’instrument traditionnel emblématique dans la culture japonaise. Vous avez sûrement acquis plus de connaissances sur cet instrument à cordes après la lecture. Le shamisen vous intéresse davantage maintenant? Il est tout à fait possible de jouer du shamisen pour ​​les différents styles de musique, donc n’hésitez pas à apprendre le style que vous aimez sur n’importe quel type de shamisen que vous pouvez vous procurer!

 

Sources :

 

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