Du vert dans les assiettes : le végétalisme à la japonaise

Si on vous dit que « Pays du Soleil levant » rime avec plats vegan, vous nous croirez ?

Quand on pense à la gastronomie nippone, on songe à : une tranche épaisse de saumon gras et luisant sur du riz gluant, une panure dorée et croustillante renfermant un poulet juteux ou à une généreuse portion de nouilles baignant dans un savoureux bouillon

Mais ces spécialités alléchantes (sushi, karaage, ramen) faussent la vision de la riche palette culinaire japonaise ! La popularité du porc pané (katsu), des œufs marinés (ajitsuke tamago), de la bonite séchée (katsuobushi), des brochettes de poulet (yakitori) ne permettent pas la remise en question des menus 100% omnivores. Heureusement, les restaurants proposent parfois une alternative végétale aux viandes et au lait, voire quelques plats spécialement adaptés aux régimes alimentaires et aux intolérances strictes. Mais ces offres reste limitées et sont synonymes à long terme de peu de diversité végétale dans l’assiette.

En est-il de même sur le sol japonais ? Comment les végétariens/végétaliens/vegans s’alimentent au quotidien sur place ? Peut-on cuisiner japonais et se dépayser gustativement sans exploitation animale ? Revisitons ensemble les clichés culinaires.

cuisines japonaises vegans
Les restaurants japonais exclusivement végétaliens sont rares en France. Heureusement le Mori café propose une carte variée :
ramen au lait d’avoine, cookie à la patate douce, glace à l’amazake… un menu qui convient aussi aux intolérants au lactose et au gluten !

Un régime alimentaire qui ne se limite pas aux légumes

Quand on pense aux végétaux japonais pour les menus salés, on songe au wasabi ou au shiso. Mais ces deux plantes servent surtout à agrémenter une sauce, à saupoudrer un plat ou à garnir un onigiri (voire parfumer des desserts originaux). Il existe aussi des variétés nippones de légumes tels le radis blanc (daikon), le potimarron (kabocha) et la patate douce (satsuma-imo). Les menus peuvent sembler répétitifs et peu variés, surtout quand le printemps mise à fond ses recettes sur le cerisier (sakura) et l’automne sur la châtaigne (kuri)… Mais la cuisine japonaise (washoku) sait surprendre, avec sa pâte sucrée de haricots rouges (anko)… et il y a d’autres exemples ! !

Quand on pense à la forte consommation de riz en Asie, on pense surtout à celle en vapeur.

Or cette matière première est exploitée sous différents aspects : par exemple en boisson avec le nihonshû et l’amazake. Ils s’obtiennent en fermentant du riz avec une moisissure, le koji, mais le second est peu (voir pas du tout) alcoolisé. Cette boisson consistante et naturellement sucrée s’accommode très bien avec les pâtisseries au mochi ou un plat assaisonné au mirin. Même si on la mange nature, cette céréale peut s’accompagner de furikake aux algues, aux graines ou à la prune salée (umeboshi). Mais le riz n’est pas la seule graminée déclinée en plusieurs versions : le sarrasin se consomme aussi bien en nouilles (soba) qu’en infusion (sobacha). À ne pas confondre avec l’infusion à l’orge : le mugicha

Hormis les céréales, un autre végétal regorge lui-aussi de bienfaits : les algues

Konbu, Wakame, Nori… et encore on ne vous cite que les plus connues ! Ces algues sont sélectionnées selon la recette : pour être longuement marinées et obtenir un bouillon savoureux ? Pour être servie froide avec une salade ou chaude avec une soupe miso ? Pour enrouler un maki ? On peut aussi la retrouver dans les desserts, avec le gélifiant agar agar (kanten). On le trouve déjà en dehors du Japon, dans la composition de certains bonbons ou de pâtisseries où il va remplacer les œufs. Là encore les propriétés d’une même algue, par exemple le konbu, changent selon l’emplacement et le mode de sa culture. Par exemple en déposant seulement quelques feuilles tendres sur un bloc de tofu onctueux à souhait.

 

A la ferme Yasai , les serres ne se désemplissent jamais de légumes bio. Toutes sont des variétés japonaises sélectionnées et cultivées avec soin par Anna.
Co-fondatrice de l’écovillage Mura, elle organise des ventes et des ateliers découverte-cuisine-dégustation.

Avec cette capacité à tout décliner de 1001 façons, le soja se prête bien à cet exercice.

En sauce (shôyu), en farine (kinako), en fèves (edamame), en fine peau de lait (yuba) ou en pousses, on le retrouve à toutes heures de journée dans l’assiette ! Mais ses deux plus célèbres déclinaisons sont en lait caillé et en pâte fermentée : le tofu et le nattô.

Alors que le nattô sert surtout de condiment, le tofu se décline en plusieurs textures : le tofu ferme (momen tofu) pour les poêlés ou les plats mijotés, le tofu soyeux (kinugoshi tofu) pour les soupes ou les desserts, le tofu frit (aburaage) pour les farcir de riz et confectionner des inari sushi… et bien d’autres ! Comment expliquer la popularité internationale de ces deux fromages de soja ? Le premier par sa réputation mitigée, soit on l’adore soit on le déteste, et son parfum si caractéristique. Le second par la créativité qu’il permet aux fourneaux avec ses différentes facettes.

Il reste une déclinaison du soja, souvent limitée à sa plus célèbre recette : la soupe miso.

Elle peut repousser les végétariens/végétaliens/vegans par la présence potentielle de bouillon de poisson. Or le dashi se décline en 5 recettes et celle aux champignons (shiitake dashi) est la seule ne contenant aucun trace animale. Une fois l’appréhension dépassée, le miso est avant tout une pâte de soja fermentée. Il serait réducteur de la limiter aux bouillons japonais : elle peut agrémenter une sauce, une marinade, une pâte de gâteau… Aussi bien pour des recettes sucrées que salées ! Tout dépend du miso choisi : blanc, rouge ou jaune ? Pâte grumeleuse ou lisse ? Sucré ou très salé ?

Pour vous faire une idée de sa réputation indéniable sur le sol japonais, sachez que traditionnellement chaque famille fabriquerait son propre miso à la maison. Sa recette se décline selon les régions et beaucoup d’expressions ne tarissent pas d’éloges à son sujet. Riche en protéines, il regorge de bienfaits pour la santé : équilibre la flore intestinale, détoxifie le foie et le sang, réduit les risques cardio vasculaires, anti-oxydant… Son achat sera ainsi privilégié dans les entreprises artisanales, issus de l’agriculture biologique et garanti sans additif. Le miso ayant jusqu’à la réputation d’éloigner le docteur !

Quand est-il des champignons ?

Très appréciés en hiver, les shiitake et les enoki se marient très bien avec les légumes et le tofu. Notamment dans une fondue (shabu shabu) ou un pot au feu (oden). Même si ces plats sont initialement omnivores, il est très simple d’en réaliser sans trace de poissons ou d’en demander sans viande vu que les bouillons sont à base d’algue. On peut aussi trouver ces champignons dans des ramen, dans des assortiments de tempura… La variété changeant selon la recette choisie et le résultat attendu en bouche.

cuisines japonaises vegans
Après Kyoto et Londre, la carte raffinée de Itadakizen vient ravir les palets parisiens :
sushi aux champignons, ramen au bouillon d’algues, panier repas (bento) au steak de tofu…

Consommer 100% végétal sur le sol nippon

Une fois sur place, on peut aussi bien profiter de :

Spécialités locales, comme les agrumes de Ehime en wagashi ou les poires de Tottori en kakigôri.

– Produits/plats de saison au fil des les fêtes qui leur sont associés ;

tels que le Jinjitsu (7 janvier), le Hatsu-Uma (10 février) ou encore le O-Tsukimi (10 septembre)

Mais les supérettes (konbini) et les restaurants n’ont pas toujours une offre végétale

Heureusement, en fouillant sur le net vous trouverez :

Des adresses culinaires pour pouvoir préparer sereinement votre prochain voyage au Japon, notamment à Tokyo et Kyoto.

Du lexique japonais pour faire comprendre votre régime particulier et reconnaître dans les menus des plats 100% végétaux.

Des astuces pour préparer en avance certaines mesures : télécharger des applications (Google Traduction, Happy Cow) , disposer d’une cuisine dans son hébergement, prévenir ses hôtes avant sa venue (de préférence anglophones) , faire un repérage des restaurants autour des sites visités, prévoir une carte expliquant en japonais qu’on est végétarien/végétalien/vegan…

Par chance, il y a des adresses évitant toutes mauvaises surprises

Les izakaya proposent des amuses-bouche pour accompagner leurs alcools : les otsumami. En beignets (yasai tempura) , macérés (tsukemono), en salade ou en gyoza, les légumes ont toujours leur place dans leurs menus. Le plus souvent les izakaya font la promotion des spécialités culinaires de leur préfecture et leurs plats suivent des recettes simples.

Les cueillettes sont une bonne alternative pour se remplir le ventre de fruits frais. Certains étant même des emblèmes des préfectures visitées ! Le yuzu de Kochi, la fraise de Tochigi, la mandarine de Kagoshima, le kaki de Wakayama… Ce qui en fait une forme de tourisme originale variant au fil des saisons et des fermes visitées. À savoir qu’il existe une formule pour en manger à volonté sur place dans un temps imparti (tabedohai) et que certains fruits entiers peuvent coûter très chers dans le commerce. Notamment les fruits de luxe !

La cuisine bouddhique traditionnelle (shôjin ryôri), directement influencée par le bouddhisme chinois, est végétarienne voir végétalienne. Aller dans un monastère ou un restaurant respectant ces préceptes vous garantira une expérience culinaire unique car enrichissante. Les moines et les croyants ne se contentent pas de présenter joliment des petits portions aux modes de préparations tous différents. On savoure chaque plat, l’harmonie entre son goût et sa texture, le souci du détail est apporté autant en bouche qu’au visuel, le plaisir de manger local et de saison dans le calme se faisant ressentir. En général on expérimente aussi une ou quelques nuitées dans des chambres traditionnelles ; en plus de quelques séances de méditations. Les temples ne proposent pas tous des services d’auberges (ryokan) et les prix sont assez conséquents. N’oubliez pas que si vous réservez un hébergement, l’immersion et le respect envers vos hôtes ne passent pas que par les repas.

L’écovillage Mura propose différentes animations au rythme des 24 micro saisons : teintures végétales, spectacle de rakugo,
et des ateliers cuisine / potager / cueillette avec les produits bio de leur terrain

Cuisiner japonais sans consommer ni exploiter d’animaux ne semble plus impossible à long terme. Quand on prend en compte la pluralité des végétaux (fruits, légumes, céréales, algues, champignons) et la créativité japonaise, aucune assiette ne se ressemble. Une boulette de riz (onigiri) peut se décliner en une myriade de couleurs et de saveurs. Une fraise peut se préparer en une large palette de textures et de combinaisons gustatives. Poussés par une même volonté d’harmonie avec la nature, les personnes soucieuses de celle-ci s’adaptent à leur environnement. Les cuisiniers travaillent les produits qu’ils ont sous la main en évitant le gaspillage et la lassitude.

Ce désir de végétaliser les assiettes existe aussi au Japon mais il ne fait pas plus l’unanimité qu’en France. Les recherches d’adresses végétariennes/végétaliennes/vegans restent laborieuses (surtout si les mises à jour des changements d’adresse/horaires ou de fermetures ne sont pas à jour) mais possibles. Donc si vous souhaitez voyager au Pays du Soleil levant ou vous mettre à la cuisine japonaise, vous pourrez le faire tout en conservant vos convictions alimentaires. Et pourquoi pas découvrir des plantes sortant des circuits touristiques communs ?

Pour continuer la lecture :

MarionChanLe Petit JournalJapan Endless DiscoverySuki DesuAmélie Marie in Tokyo

Sac de voyage – Furansu JaponVoyaponEurop AssistanceMatcha et SakuraMerci Japon

Mille et une épicesJappandaGo ! Go ! Nihon –  – Cuisine JaponComme au JaponKanpai !

Finedining LoversNippon.comMon-kimono.comKotobaJapan experience Japan Glossy

Are you Radis ?Japan Travel 

1 réponse

  1. Claude dit :

    Merci pour cet article passionnant et très instructif. Félicitations

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