Final Fantasy VII Rebirth : un jeu qui tient ses promesses

FINAL FANTASY VII n’était pas seulement un “jeu de l’année” à sa sortie en 1997. Premier Final Fantasy en 3D, il était aussi l’un des porte-étendards de la première Playstation. Surtout, son succès a ouvert en grand les portes du marché occidental aux jeux de rôle japonais. Difficile d’imaginer le succès mondial de NIER AUTOMATA, PERSONA 5 ou DARK SOULS sans lui. Aujourd’hui, Square Enix renouvelle ses ambitions en la matière. Si FINAL FANTASY VII REMAKE était un hommage réussi au titre original, FINAL FANTASY VII REBIRTH parvient quant à lui à sortir de l’ombre de son illustre prédécesseur.

© Square Enix

“Un Final Fantasy pour les fans et les nouveaux venus.” C’est sur cette promesse que s’ouvrait, il y a 7 ans, le quinzième épisode de la franchise. Pour Square Enix, l’enjeu était de taille : remettre sa licence phare sur le devant de la scène. Depuis FINAL FANTASY X, les choses se sont compliquées : après le long développement du douzième épisode, l’éditeur japonais s’est pris les pieds dans le tapis avec le passage à la génération de consoles HD. FINAL FANTASY XIII n’a pas rencontré le succès escompté malgré d’importants moyens mis à sa disposition, Versus XIII a sombré dans les limbes du développement avant d’être rebaptisé FINAL FANTASY XV, et le premier lancement de FINAL FANTASY XIV se révèle calamiteux. Heureusement, le MMORPG est parvenu à renaître de ses cendres et constitue aujourd’hui l’une des principales sources de revenus de Square Enix. Final Fantasy XV, bien qu’il porte les cicatrices de sa production chaotique, reste un succès commercial. Mais il reste vital pour l’éditeur d’amener les joueurs en nombre sur sa licence principale afin d’oublier les échecs de titres récents comme MARVEL’S AVENGERS ou FORSPOKEN. Malgré une équipe de choc et des qualités indéniables, FINAL FANTASY XVI ne semble pas avoir rencontré le succès escompté. Désormais, tous les regards se tournent vers la trilogie FINAL FANTASY VII inaugurée en 2020. La promesse de cette deuxième partie, FINAL FANTASY VII REBIRTH, est selon le producteur Yoshinori KITASE de “récompenser largement les fans de longue date tout en permettant aux nouveaux joueurs de Final Fantasy de découvrir l’aventure et de s’émerveiller comme ceux de 1997”. La même promesse que Final Fantasy XV. Cette fois cependant, elle est largement tenue.

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Retourner à la planète

L’aventure de Final Fantasy VII débutait à Midgar, imposante cité d’acier où les populations les plus pauvres sont enterrées dans des bidonvilles situées sous les gratte-ciels des plus fortunés. Un cadre esthétique et politique rappelant Blade Runner et les grandes œuvres du genre cyberpunk. Nous suivions les aventures de Cloud et du groupe écoterroriste Avalanche qui tentaient de renverser la Shinra, une mégacorporation ayant pris le contrôle de la ville et d’une partie du monde grâce à son monopole sur l’énergie Mako. Pendant plusieurs heures, les joueurs devaient traverser toutes sortes de paysages urbains inhospitaliers. La nature, elle, se réfugiait comme une intruse dans quelques niches comme l’église en ruines où l’on rencontre la marchande de fleurs Aerith. Ce n’est qu’au terme d’une course-poursuite en moto que Cloud et ses compagnons parvenaient à s’échapper de Midgar pour embrasser des panoramas plus respirables. Or, c’est à ce moment précis que s’arrêtait l’aventure de FINAL FANTASY VII REMAKE en 2020.

Final Fantasy VII Rebirth nous permet enfin de découvrir toutes les richesses de cette planète que la Shinra met en péril. Le jeu reprend une structure en régions ouvertes assez proches de ce que proposait Final Fantasy XV avec les régions de Cleigne ou de Duscae : de grands espaces de nature avec des écosystèmes variés, des zones de prairie, de désert, de jungle ou de montagnes. Leur géographie impacte non seulement le décor et le bestiaire, mais également la façon de s’y déplacer. Dans la région escarpée de Junon par exemple, il est possible de chevaucher une espèce endémique de chocobos afin de gravir et descendre des falaises. A Gongaga, de volumineux champignons nous permettent de survoler une partie de la région. Entre ces larges zones se trouvent des lieux de transit, le plus souvent des villes, des espaces fourmillant de vie et où la narration vient s’accélérer.

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Ces régions restent construites sur le même modèle que la plupart des mondes ouverts. Sur la demande de Charley, un androïde déjà présent dans Remake, le joueur doit accomplir des tâches de différentes natures pour augmenter son niveau de connaissances de la région et débloquer de nouvelles récompenses. On retrouve même des tours de communication pour identifier sur notre carte l’emplacement de ces activités annexes, à la manière des points de synchronisation d’Ubisoft. Toutefois, les régions de Rebirth se révèlent plus hospitalières que les mondes surchargés d’Assassin’s Creed. Chaque tâche épouse plus naturellement le décor et reste suffisamment espacée des autres pour ne pas donner une impression de trop-plein. Cela reste possible car Rebirth s’est montré plus raisonnable dans la quantité de contenu annexe. Les développeurs ont également eu la bonne inspiration de regarder du côté de Ghost of Tsushima pour que la progression d’une tâche à l’autre se fasse de manière plus fluide qu’en ouvrant constamment la carte. Régulièrement au cours de notre exploration, l’environnement vient à notre rencontre sous la forme d’empreintes, de pierres rituelles ou d’animaux pour nous sortir des sentiers battus et nous conduire vers de nouveaux points de déplacements rapides ou des sanctuaires cachés. Quoi de plus adorable que de suivre les cavalcades d’un bébé chocobo et de pouvoir ensuite lui gratter les joues ?

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Réunion entre amis

Le monde du jeu s’ouvre, et c’est aussi le cas de notre équipe. L’équipe initiale de Remake double de taille. Nous retrouvons Cloud, Barret, Tifa et Aerith, ainsi que Red XIII qui devient finalement jouable. Yuffie, héroïne du DLC Intergrade, rejoint plus tard le groupe et Cait Sith, cet étrange chat-robot monté sur un Gros Mog, referme la marche. Cid Highwind et Vincent Valentine, derniers membres de l’équipe originale de Final Fantasy VII, sont également présents mais ne seront jouables qu’à partir du dernier jeu de cette trilogie. C’est toutefois un plaisir de voir le casting du septième épisode enfin au complet. Malgré leur nombre, l’histoire accorde de la valeur à chacun des personnages jouables en les confrontant à leur passé, leurs échecs ou leurs contradictions. Les confidences, les gestes amicaux et les disputes donnent corps à cette joyeuse bande dont les membres sont bien loin des personnages interchangeables d’autres jeux de rôle. De quoi nous rappeler les meilleurs moments de ce road-trip à quatre qu’était Final Fantasy XV.

Toutefois, Rebirth parvient à surpasser l’épopée de Noctis en la matière. Tout d’abord, en faisant de la relation entre Cloud et ses équipiers une mécanique de jeu. Résoudre des quêtes secondaires qui leur sont associées, faire les bons choix permettent en effet de renforcer le niveau d’amitié et de favoriser certains liens. Les fans du jeu original se douteront bien de l’importance de cette mécanique sociale pour le déroulement d’une certaine scène culte. Ensuite, chaque personnage a un véritable intérêt en matière de jouabilité. L’expérience de Final Fantasy XV restait presque entièrement centrée sur le seul contrôle de Noctis, avant que les DLC successifs du jeu ne permettent enfin de jouer les autres personnages. Idem dans Final Fantasy XVI où Clive reste le seul personnage jouable. Dans Rebirth, les personnages jouables disposent tous d’un style de jeu qui leur est propre. Le gameplay de Red XIII, par exemple, incite les joueurs à se reposer sur le corps-à-corps et la parade, tandis que Yuffie compte sur ses outils de shinobi pour toucher les faiblesses élémentaires des ennemis. Le jeu nous incite même de façon régulière à ne pas nous reposer sur une seule équipe de trois personnages en nous forçant à jongler régulièrement entre eux selon le déroulement de l’histoire. Les équipiers peuvent également joindre leurs efforts pour effectuer de puissantes compétences synchronisées. Il est d’autant plus simple de passer d’un personnage à un autre grâce au système de combat. Comme dans Remake ou dans le jeu de 1997, il est possible d’équiper toutes sortes de matérias à chaque personnage pour en faire un soigneur, un tank ou un attaquant au corps-à-corps. Contrairement aux premiers Final Fantasy, les personnages ne sont donc plus restreints à une classe unique. C’est au joueur de choisir judicieusement quel sera leur rôle au combat.

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Récompenser les joueurs

Qu’en est-il de la promesse de KITASE de récompenser tous les joueurs ? Les fans du septième épisode seront conquis : Rebirth est un véritable buffet dédié au jeu original. La progression du joueur l’amène à traverser les moments les plus marquants du chef-d’œuvre de 1997 sans jamais les précipiter, mais au contraire en leur donnant le temps de se développer et de gagner en richesse. Il n’aurait pas été possible, par exemple, de simplement se contenter de reprendre tel quel le mini-jeu du défilé de Junon : ici, les préparatifs sont un prétexte pour explorer une ville en liesse et la performance en elle-même s’élève aux standards actuels de gameplay et de mise en scène pour rester spectaculaire. C’est aussi en adaptant son scénario d’origine aux codes modernes du jeu vidéo que Final Fantasy VII est désormais capable de toucher une nouvelle génération de fans et de les faire passer par les mêmes émotions que les vétérans. Ces derniers auront même le plaisir d’identifier quelques clins d’œil à l’univers Final Fantasy VII (dont le film Advent Children récemment ressorti en salles). Il s’agit, selon le directeur créatif Tetsuya NOMURA , de “donner un second souffle à l’histoire”. L’inconvénient d’étendre ainsi cette histoire sur trois jeux, ce sont les longueurs qui semblent parfois rallonger artificiellement la durée du scénario principal. Sans doute le plus gros défaut de Remake, qui multipliait les niveaux de remplissage dans les égouts ou le laboratoire du professeur Hôjô. Rebirth conserve ce défaut, mais déguise plus habilement ses longueurs en jouant sur les variations de gameplay, d’ambiance et de perspective pour que ces passages s’intègrent mieux à la trame principale. La narration, une fois encore, ne nous épargne pas quelques passages plus cryptiques comme NOMURA, également créateur de KINGDOM HEARTS, semble tant les apprécier. Notons enfin que les premiers chapitres du jeu restent très classiques – mais très bien exécutés – et que ce n’est qu’à partir du quatrième que le jeu débute une véritable envolée narrative et ludique.

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Si le fanservice abondant s’adresse volontiers aux fans de la première heure, le jeu se montre extrêmement généreux envers tous les joueurs et mise tout dans sa capacité à les surprendre. Contrairement à Final Fantasy XVI qui conservait sur toute sa longueur une atmosphère sombre et sérieuse à la Game of Thrones, Rebirth joue avec une large palette d’émotions. Il sait être aussi tragique et violent que le seizième épisode lorsque c’est nécessaire, mais il parvient avec aisance à nous faire rire ou nous émerveiller sans que ces changements d’ambiance ne paraissent artificiels. C’est le sel des grands jeux de la licence Final Fantasy que d’atteindre ainsi cet équilibre des cinq saveurs. Cette générosité se ressent également dans l’abondance de mini-jeux ou dans l’accompagnement musical de cette aventure. Si la bande originale peut sembler trop présente durant les premières heures de jeu et laisser peu de place au sound design des villes ou des décors naturels, elle finit par devenir le dixième membre de cette escouade.

Final Fantasy VII Rebirth sera-t-il le jeu de l’année 2024 ? La concurrence sera rude, mais il en a largement la carrure. Ce qui est certain, c’est qu’à l’instar du jeu de 1997, il sera bien plus que ça. Il compte déjà parmi les plus belles exclusivités console de Sony. Square Enix a de nouveau bu dans le Graal des classiques de la licence et nous propose là d’imaginer à quoi aurait ressemblé le chef-d’œuvre Final Fantasy VII s’il était sorti pour la première fois en 2024. Assurément, cette renaissance est un succès !

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