Lectures estivales avec les éditions Actes Sud !

Nous vous proposons une sélection de romans et nouvelles japonais à mettre dans votre valise pour vos vacances d’été. Les éditions Actes Sud nous offrent en effet de véritables pépites à découvrir les pieds dans l’eau ou la tête sous un arbre.

Ajisaï d’Aki Shimazaki : une belle histoire d’amour

Si vous cherchez un roman d’amour, ce petit bijou d’Aki Shimazaki est fait pour vous.

Shôta est un étudiant en littérature. Il rêve de devenir un grand écrivain et travaille déjà sur son premier roman, Madame Ajisaï qui raconte l’amour d’un jeune musicien pour sa professeur de koto d’une quarantaine d’année. Il travaille également sur la rédaction de son rapport de licence consacré à « la limite des romans autobiographiques ». Tout va bien pour lui car ses parents, propriétaires d’un grand magasin à Ôtsu, lui payent logement et études.

Mais lorsqu’ils font faillite, il doit trouver de quoi financer la suite de ses études. Grâce à un ami qui donne des cours à un enfant d’une famille aisée, il va trouver un poste de « house-sitter » : il est logé gratuitement dans un petit studio près de la grande maison des Oda qu’il doit surveiller pendant leur absence. En donnant quelques heures de cours du soir et en travaillant quelques heures en librairie, il arrive ainsi à poursuivre ses études à l’université.

Il découvre la merveilleuse et mystérieuse madame Oda. Elle a 35 ans, il en a 22. Elle est belle, musicienne, cultivée… Il est amoureux…

La suite est à découvrir dans ce roman qui réussit à parler d’un sujet difficile, à savoir le financement des études universitaires au Japon pour les enfants qui n’ont pas la chance d’être soutenus par leurs parents (multiplication des petits boulots, crédit étudiant, endettement, absence de débouchés universitaires pour les docteurs en littérature, dépression, voire suicide) tout en racontant la naissance d’une relation amoureuse, le tout dans le cadre enchanteur de la ville de Kamakura, ses temples, ses hortensias, ses plages, la mer et au loin Enoshima.

Vous passerez un moment suspendu au son du koto, puis du piano, de Clara Schumann à Mendelssohn, en admirant la mer qui est si belle à Kamakura.

Kamakura :

« J’adore la vue de ma fenêtre : des temples boud­dhistes et une abondance de frondaisons, surtout des cerisiers sauvages qui fleurissent en avril. On voit au loin l’île d’Enoshima dans la baie de Sagami. Je me promène les week-ends sur la plage de Shichirigahama qui borde cette baie magnifique. Là, j’adore contempler le coucher de soleil et le mont Fuji. Cet endroit m’évoque le lac Biwa près de ma ville natale. »

La naissance de l’amour :

« Installé dans un grand fauteuil en bois, je re­­garde vers la baie de Sagami. On aperçoit à l’est l’île d’Enoshima ainsi que le pont Katase où brillent des lumières. Une brise fraîche effleure ma peau. J’entends le bruissement d’un insecte. Bien que le temps soit encore chaud et humide, on se rend compte que l’été s’en va.
J’ai le cœur à l’envers. Je n’en reviens pas de ce qui m’est arrivé cet après-midi. J’ai passé un mo­­ment inoubliable avec madame Oda. »

Plus d’informations sur le site de l’éditeur.

Scènes endormies dans la paume de la main de Yôko Ogawa : huit nouvelles autour des arts de la scène, avec la porosité réalité-rêve qui caractérise cette autrice qu’on aime tant

Scènes endormies dans la paume de la main de Yôko Ogawa
Scènes endormies dans la paume de la main de Yôko Ogawa

C’est un recueil de nouvelles variées et fascinantes que nous offre Yôko Ogawa. Les narratrices (et un narrateur) ont toutes une relation particulière avec le monde des arts de la scène. Cet univers leur permet de s’évader d’un quotidien souvent triste ou compliqué.

On croise donc des personnes très différentes dans ces huit nouvelles :
– une petite-fille d’ouvrier qui découvre la danse classique lors d’un spectacle et recrée ce spectacle, La Sylphide, avec toutes sortes d’objets d’une boîte à outils,
– une ancienne actrice qui n’a jamais pu jouer La Ménagerie de verre de Tennessee Williams mais en connaît tous les textes et phrases, qui ornent la vaisselle de son appartement,
– une cheffe de service reine des factures, qui fait des lectures sur cassette pour son voisin acupuncteur aveugle tout en hébergeant au sein de sa bouche d’étranges créatures,
– une femme qui assiste aux 79 représentations de la comédie musicale Les Misérables au Théâtre impérial grâce à l’argent d’indemnisation de l’assurance suite à un accident de la circulation,
– une assistante de recherche d’un laboratoire d’université de médecine qui a une passion pour les jupes à fleurs et les autographes des comédiens de théâtre, dont elle empile les programmes signés sous son lit,
– une dame de compagnie qui doit vivre « sur scène » dans le théâtre qu’un vieil homme a construit dans sa propriété, celui-ci venant la voir « vivre » dans cet espace réduit un quotidien banal fait de lecture, broderie, harmonica et autres activités classiques,
– un homme qui assiste à un concert et se remémore la « librairie de la voiture à cheval » (tirée par un gros Saint-Bernard) qu’il attendait impatiemment pour feuilleter le livre Les secrets des oiseaux migrateurs,
– une femme qui séjourne en maison de repos dans une ville thermale connue pour ses eaux qui aident à lutter contre la stérilité, ville dans laquelle elle découvre un théâtre à l’abandon où jouent des enfants, un salon de coiffure dont elle admire chaque jour le diorama à train électrique et même un couple qui élève des geckos bien particuliers dans des vivariums.

Comme dans tous les livres de Yôko Ogawa, on glisse doucement d’une réalité ordinaire voire fade, à un monde fantastique merveilleux, poétique, mais parfois dérangeant ou terrifiant.

Sortir de sa vie tristement ordinaire pour trouver dans les arts de la scène une autre dimension, une lumière, un frisson. Est-ce qu’on ne s’est pas tous un jour posé ce genre de question … Et si je pouvais être quelqu’un d’autre même temporairement, si je pouvais changer de décor, m’inventer un personnage…

Et quelle merveille cette danse des outils mise en scène par une petite fille dans la cour d’une usine !

« La couseuse se rapproche de la fillette en prenant garde à ne pas bloquer la lumière, et se place derrière elle pour regarder la boîte à outils. Les doigts de l’enfant ont pris la même couleur sale que les objets qu’elle manipule. Mais chacun de leurs mouvements est réfléchi, raffiné, et effectué sans la moindre trace d’hésitation. Plutôt qu’un metteur en scène omnipotent qui tire tous les fils, l’enfant est un serviteur dévoué des objets. Entre ses mains, la boîte à outils paraît avoir une bien plus grande profondeur qu’elle n’en a en réalité. Comme sur une vraie scène, tout est toujours en mouvement, sans jamais s’arrêter. La couseuse ne peut qu’assister au spectacle, sans rien dire. Soudain lui revient la sensation des fauteuils de l’auditorium, des lumières qui se croisaient au loin, vues du ­deuxième balcon. Elle en vient à croire que derrière le vacarme du métal résonne la musique jouée par l’orchestre dans la fosse. La pince à long bec danse. Qu’elle soit cassée ne l’empêche pas de devenir la fée et de danser dans la forêt qui emplit cette scène créée par les quelques centimètres de distance qui séparent la boîte à outils du sol. »

Plus d’informations sur le site de l’éditeur.

Le fil de l’espoir de Keigo Higashino

C’est un excellent polar que nous offre encore une fois ce grand maître Japonais qui manie les personnages et les ambiances avec brio.

Le fil de l'espoir de Keigo Higashino

Dans cet opus, on est ravi de retrouver aux manettes de l’enquête Kaga et surtout son cousin Matsumiya qui vont devoir plonger au cœur des secrets familiaux les plus enfouis des différents protagonistes. En parallèle, Matsumiya sera également confronté à des secrets au sein de sa propre famille, ce qui donnera encore plus de force au récit.

Tout part du meurtre d’une propriétaire d’un charmant salon de thé de Jiyugaoka (Meguro, Tôkyô). Qui a bien pu assassiner une personne aimée de tous ? Très vite les enquêteurs s’intéressent à Shiomi, un homme qui a commencé à fréquenter le salon de thé récemment. Cet homme a un passé douloureux, ayant perdu ses deux enfants dans un tremblement de terre alors qu’ils étaient en vacances chez leurs grands-parents. Un drame dont il a essayé de se relever avec sa femme, leur désir le plus fort étant d’avoir un autre enfant pour tenter de remplir le vide immense…

Autant vous dire que ce livre est très prenant. On plonge dans la vie la plus intime des personnages, leurs douleurs, leurs désirs, leurs secrets, leurs espoirs. On sent les blessures, on compatit, on se désole. Ils sont tous tellement attachants, tellement humains, tellement fragiles.

Un concentré d’humanité et une intrigue comme toujours magnifiquement tissée jusqu’à la dernière page. On admire la finesse psychologique de l’enquêteur lors de chaque interrogatoire, sa façon de poser les questions tout en subtilité, son talent à observer, écouter, relier les petits riens. On avance pas à pas, on éclaircit certaines zones tandis que d’autres restent obscures. On tire des fils et à la fin tout est clair, mais ça fait mal…

Toutes ces souffrances tues, tous ces sentiments étouffés, tous ces secrets bien gardés, tous ces mots qui font mal… Et pourtant tellement d’amour dans ces familles bancales.

Un grand Keigo Higashino !

« Matsumiya se dit qu’il ferait mieux d’essayer une autre approche.
— Quel genre de personnes composent la clientèle du salon de thé ?
— Ce sont majoritairement des femmes. Des femmes au foyer, et des jeunes femmes qui travaillent. Il y a des gens que je voyais souvent là-bas, même si je ne connais pas le nom de tous. Yayoi savait mettre les clients à l’aise dès leur première visite, elle leur donnait des explications sur les gâteaux et les boissons. Et tout le monde avait envie de revenir, vous savez !
Le fait qu’elle parle de la victime en l’appelant Yayoi faisait comprendre l’ambiance chaleureuse du salon de thé.
— Un jour, elle m’a expliqué que les rencontres comptaient beaucoup pour elle. Qu’elles rendaient la vie plus riche. Que c’était une rencontre qui l’avait conduite à divorcer mais qu’elle ne regrettait pas son mariage, et que la rencontre avec son ex-mari demeurait précieuse pour elle.
— Les rencontres…
— Chaque fois qu’elle accueillait une cliente enceinte, elle lui disait que dans peu de temps, elle allait faire une belle rencontre, puisque la première rencontre dans la vie était celle entre une mère et son enfant.
— Je vois.
Matsumiya écrivit cette information sur son bloc-notes. Il avait le sentiment que cela expliquait pourquoi la victime avait tant de clientes fidèles. »

Plus d’informations sur le site de l’éditeur.

Ainsi s’achève cette sélection estivale. Nous vous souhaitons un bel été, qui commence à pointer le bout de son nez, et de très belles lectures, que vous pourrez venir, en commentaire, nous partager !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous aimerez aussi...