Des chats, des mangas, combo gagnant

Manekineko

Un foyer français sur deux possède un animal de compagnie et, parmi nos amis à poils et à plumes, 11,4 millions sont des chats. Sur internet les photos et vidéos de félins sont des succès assurés et cumulent des milliers de clics en quelques heures. Dans leur habile complot pour la conquête du monde, ils se sont même infiltrés partout, même là où on ne les attendait pas : dans les mangas…

Nous avons pour le chat une attirance quasi mystique depuis le néolithique. À l’époque on ne parlait pas de domestication. Disons pour faire court, que le chat et l’homme trouvaient des intérêts communs à vivre près l’un de l’autre. Il faut attendre les Égyptiens pour qu’ils soient vénérés et domestiqués. Souvent associé au symbole de protection, il aura alors une place de choix dans les temples des pharaons.

La roue tourne en Europe et notamment au moyen-âge où le pauvre animal est diabolisé par la religion chrétienne. Souvent associés aux sorcières, les chats noirs notamment, garderont une mauvaise image même encore de nos jours.
Au Japon, le chat a un statut particulier. N’ayant pas connu notre moyen-âge il n’a jamais été diabolisé. Il y est même synonyme de chance, de richesse et de prospérité !

Le mistigri est apparu au Japon au VIe siècle en provenance de Chine et de Corée. Un mandarin offrit à l’empereur une chatte blanche : mille ans plus tard, on la connait encore sous les traits du fameux maneki neko.

Le maneki neko est un chat à la patte levée qui « invite » celui qui croise son chemin, raison pour laquelle on en trouve souvent dans les magasins ou dans les entrées. Petit ou grand, patte droite ou gauche levée, une pièce d’argent ou pas, c’est un porte bonheur qui apporte la bonne fortune sur la maison qu’il protège. À Tokyo, le maneki neko, et le chat en général, est vénéré au temple Gotokuji.

Nyanpire en vente chez Kurokawa en septembre 2014

Au fil du temps, ces chats qui étaient simplement des cadeaux sont devenus des compagnons de la noblesse et des prêtres, avant d’être communs à toute la société.

Si tous les immeubles japonais n’autorisent pas de posséder un chat, on peut par contre trouver des neko café (café à chats) pour partager quelques minutes ou quelques heures de son temps avec des matous. Ces cafés ont fait des émules puisque le deuxième Café des chats va ouvrir à Paris, et nos amis londoniens ont aussi le leur.
Autre lieu atypique qui plaira aux amateurs du félin, l’île Toshiro au large de Fukuoka où des milliers de chats vivent paisiblement aux côtés des quelques humains vieillissants habitant l’île.

Le Japon c’est aussi ce pays où les chats peuvent avoir un blog (Maru, Pokke, Kagoneko blog).
Mais le chat japonais le plus connu est sans doute Hello Kitty un personnage kawaii créé par le groupe Sanrio. Cependant, c’est là un autre vaste sujet que je n’aborderai pas aujourd’hui.

Des mangas il en existe pour tout et pour tous, il y en a donc forcément à la gloire de nos félins au Japon. Mieux, ils ont traversé les océans avec de jolis succès à la clef.
Le premier manga en France à parler de chat fut What’s Michael ?!, mais ce n’est pas lui à qui l’on doit l’engouement des lecteurs français pour les gentils matous. Avec une thématique qui s’est largement développée depuis 2013 et quelques titres à succès, voici une petite sélection non exhaustive des différents mangas ayant pour héros ces petites bêtes à moustaches.

Chi, une vie de chat – Konami Kanata – Glénat

Chi, c’est l’histoire d’un petit chat recueilli par une famille japonaise qui n’a d’ailleurs pas le droit d’avoir d’animaux dans leur immeuble comme c’est souvent le cas là-bas. Au fil des chapitres, ont suit la vie de Chi, de ses maîtres, ainsi que d’autres chats.
Tout en couleur et dans le sens de lecture français, chapitre après chapitre Konami Kanata nous conte les aventures de Chi. À la fois espiègle, joueuse et curieuse, elle va s’épanouir dans son nouveau monde tout en croisant, sans le savoir, la route de sa mère et de ses frères et sœurs.

Chi, une vie de chat - Konami Kanata - Glénat

Édité par Glénat, Chi est un véritable succès de librairie avec plus 600 000 exemplaires vendus. Pourtant, les volumes couleurs sont assez chers : 10,75€ pour 160 pages. Qu’importe, le cœur des lecteurs français a fondu pour l’adorable chaton.
Les produits dérivés fleurissent de toute part et un livre pour enfant (Chi c’est mon prénom) a même été édité spécialement pour la France. Le succès est tel qu’une édition de poche à moins de 5€ a vu le jour en 2014.

Pour en savoir plus : Interview de Konami Kanata lors de son passage en France en 2013.

Plum, un amour de chat – Natsumi Hoshino – Soleil manga

J’ai eu un réel coup de cœur pour Plum, un amour de chat. Natsumi Hoshino s’est inspirée de ses chats pour l’élaboration des histoires et pour l’exécution des planches. Ses dessins sont vraiment magnifiques, elle sait croquer avec justesse les expressions et les postures de nos amis à poils. Vous ne pourrez vous empêcher de lâcher un « oooh c’est trop mignon » à chaque page, tout en couvrant d’un regard tendre vos propres marmottes roulées en boule sur un coussin.

Plum, un amour de chat - Natsumi Hoshino - Soleil manga

L’arrivée de Flocon, un second chat dans cette petite famille est un événement, tant pour les humains que pour le premier félin déjà en place. Chacun réagit différemment à cette adorable tornade. Plum se demande qui est ce nouveau venu qui l’embête en jouant, la mère espère que c’est un mâle pour qu’elle ait enfin un chat qui la suive partout, et le fils, plus pragmatique, tente de faire cohabiter tout ce petit monde. Notez que les animaux ici ne parlent pas, comme dans la vraie vie. Cela donne lieu à des moments d’incompréhension amusants.
Humour et tendresse sont au rendez-vous.

Amoureux des chats, vous n’aurez sans doute aucun mal à retrouver les réactions de vos matous. Éducatif sans être rébarbatif, Plum conseille le lecteur tout en le divertissant. Ce manga qui est en cours de publication au Japon possède d’ores et déjà 8 tomes.

Yanaka, histoires des chats – Megumi Wakatsuki – Komikku

Yanaka est un petit quartier au cœur de Tokyo près de la gare Nippori où de nombreuses ruelles se croisent.
Megumi Wakatsuki est l’auteure de cette histoire atypique. Elle exerce son métier de dessinatrice depuis les années 90 et travaille plus particulièrement dans le monde du shôjo manga (manga pour jeune fille). Yanyaka sanpo est une histoire qui plaira aux grands comme aux petits grâce à son double niveau de lecture. L’histoire des petits chats plairont aux enfants, alors que les parents seront eux plus intéressés par ce quartier authentique et populaire de Tokyo.

Yanaka, histoires des chats - Megumi Wakatsuki - Komikku

Elle nous propose de découvrir de façon peu commune les rues de Yanaka, simplement accompagnés par les chats du quartier. C’est grâce aux péripéties de Yanyaka le chaton espiègle que nous allons nous balader d’une ruelle à l’autre, d’un temple à l’autre.

Il n’y a pas à proprement parler d’endroit grandiose ou spectaculaire à Yanaka. Nous ne sommes ni à Nara, ni à Miyajima. Megumi Wakatsuki nous fait juste découvrir le charme désuet d’un « village » au cœur de Tokyo. Point de monuments incontournables référencés dans tous les guides touristiques. De son propre aveu, elle n’avait jamais mis les pieds à Yanaka, c’est donc avec un œil neuf qu’elle découvre les temples et les ruelles.

Ce qui manque sans doute à ce manga, ce sont des décors plus fouillés du quartier de Yanaka. Pour cela, il vous faudra vous munir du petit guide touristique édité par Komikku sous le nom de Yanaka, en un coup d’œil.

Oh my cats ! – Kotsubu Sakaki – Komikku

Oh my cats ! - Kotsubu Sakaki - Komikku

Petit dernier, ce one-shot a été publié chez Komikku en mai 2014. Au fil des pages, la mangaka Kotsubu Sakaki nous présente ses deux chats : Bobo et son fils Mini. Des caractères bien trempés qui n’ont rien à voir avec les chats tout kawaii que l’on a l’habitude de voir.

Oui, ils ne sont pas tous mignons, certains ont du caractère et ne se laissent pas apprivoiser aussi facilement. On finit par avoir une certaine tendresse pour l’auteure qui recherche par dessus tout l’amour de ses chats.

 

Les chats ont conquis nos villes, nos maisons, et maintenant nos bibliothèques et nous arrivons à une conclusion somme toute assez attendue : les felis silvestris catus sont identiques, qu’ils soient japonais, américains ou français. Leurs histoires sont universelles, elles traversent les océans et font tomber les barrières entre les langues. Ce qui fait leur succès ? Sans doute un degré de « kawaiitude » extrême, un public intergénérationnel, des tranches de vie universelles et le talent indéniable de nos amis japonais pour donner la parole à ces animaux.

Glénat doit sortir en novembre Le paradis des chiens, un manga comme son nom l’indique sur les chiens. Auront-ils le même succès que leurs confrères à moustaches ? Nous le saurons très bientôt.

Tatiana Chedebois

Tatiana Chedebois, plus connue sous le nom de plume "Tanja", écrit sur la J-music, les mangas et les anime depuis plus de 25 ans. Tombée très tôt amoureuse du Japon, elle est rédactrice depuis 1997 dans différents fanzines, magazines (Japan Vibes, Rock one), webzines (JaME, Journal du Japon) ainsi que sur son blog (Last Eve). Avec son groupe de visual kei français elle fait en 2004 la première partie de Blood premier groupe de vk à venir en France. En 2019, elle cocrée le podcast du BL Café pour parler de Boys' love aux plus grand nombre. Puis en 2022, elle intègre la team du Cri du mochi pour parler manga et anime généraliste sur Twitch.

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