Nagoya, les traditions du Japon dans le vent de l’innovation

Au cœur de l’Archipel, Nagoya, quatrième ville du Japon, est plutôt méconnue des voyageurs. Cette ville moderne, berceau de Toyota, participe pourtant au dynamisme de l’économie nippone. Héritière de traditions culinaires, elle est considérée comme l’une des capitales gastronomiques du Japon. En chemin entre Tōkyō et Kyōto, descendons du Shinkansen pour goûter à une escale typiquement japonaise, pétrie de traditions mais dans le vent de la modernité.

Le château de Nagoya, là où tout a commencé

Tout a commencé en 1609, lorsque le shogun Tokugawa Ieyasu choisit le site pour y édifier un château, devenu l’un des joyaux de la ville. Sur un emplacement stratégique, ce bastion sur la route du Tōkaidō devait sécuriser la région. Le clan Tokugawa fit ensuite prospérer la ville jusqu’à la fin du shogunat, en 1868.

Château de Nagoya

Château de Nagoya © Marie Borgers

Détruit en 1945, le château a été reconstruit à l’identique en 1959. Les récentes restaurations du Palais Honmaru lui ont rendu, dans l’éclat de son bois clair, son lustre d’antan. Les restaurations laissent imaginer l’atmosphère au temps du shogunat. Sous les pas, le plancher grince dans une musique lancinante destinée à alerter les shoguns d’éventuelles intrusions ennemies. Toute une ambiance !

 

 

Château de Nagoya, vue intérieure

Château de Nagoya, palais Honmaru © Marie Borgers

Des musées d’histoire

Le musée de la Ville de Nagoya retrace l’histoire de la ville, de l’Âge de pierre à l’ère Shōwa. Il met le projecteur sur les daimyō, les seigneurs de guerre.

En 1945, Nagoya, centre de l’industrie aéronautique, fut la cible de bombardements stratégiques. La ville actuelle est donc sortie de terre après-guerre, avec ses avenues rectilignes, ses gratte-ciels, ses galeries souterraines et ses parcs.

Cependant, le quartier d’Arimatsu, station sur la route du Tōkaidō, a été miraculeusement préservée des bombardements. On s’y balade entre de vénérables maisons en bois de la fin de l’époque Edo et du début de l’ère Meiji.

Quartier d'Arimatsu

Quartier d’Arimatsu © Marie Borgers

Une cité industrielle, fief de l’empire Toyota

La capitale de la préfecture d’Aichi doit aussi sa réussite à sa localisation au cœur de l’Archipel. Bordée par le Pacifique, elle est entourée de plaines fertiles et de montagnes, pourvoyeuses de matières premières.

L’innovation fait partie de la marque de fabrique de Nagoya. Les premiers robots en bois et les karakuri ningyō, les poupées mécaniques, y ont été inventés au début du XVIIe siècle. Mais c’est pendant la guerre sino-japonaise (1894-95) que le port a pris de l’ampleur. Au début du XXe siècle, de grands noms de l’industrie y ont élu domicile, à l’instar de Mitsubishi Heavy Industries et Toyota Motor Corporation.

Toyota a été la figure de proue de l’essor industriel de Nagoya. Sur le site historique de la filature, sous une toiture à sheds, le Musée commémoratif Toyota de l’Industrie et de la Technologie retrace l’épopée industrielle du constructeur, des métiers à tisser aux chaînes de montage de voitures. Le musée Toyota de l’Automobile présente un showroom de près de 140 véhicules japonais et internationaux, tous plus rutilants les uns que les autres.

Musée commémoratif Toyota de l’Industrie et de la Technologie

Reconstitution d’atelier au Musée commémoratif Toyota de l’Industrie et de la Technologie © Marie Borgers

Nagoya est aujourd’hui à la pointe de l’innovation en matière d’industrie automobile, mais aussi aérospatiale.

Des musées des sciences et techniques

L’aventure industrielle de Nagoya ne saurait se limiter à Toyota. Le SCMAGLEV and Railway Park nous embarque dans l’aventure du rail au Japon. Le visiteur monte à bord de voitures historiques, de rames Maglev (ce train à sustentation magnétique), et Shinkansen – autant de fiertés du Pays du Soleil levant. Une fascinante maquette reconstitue le circuit ferroviaire de Tōkyō à Ōsaka, et les monuments emblématiques de chaque escale.

SCMAGLEV and Railway Park

Le premier Sinkansen, 1964, au SCMAGLEV and Railway Park © Marie Borgers

Le musée de l’Électricité nous éclaire sur le déplacement des particules, la distribution de l’électricité et les énergies renouvelables, le tout avec des maquettes didactiques.

Des musées d’art et de culture

En matière d’institutions culturelles, Nagoya n’est pas en reste.

Musée majeur de la ville, le musée d’art Tokugawa retrace l’histoire de la famille shogunale et des daimyō de la dynastie Tokugawa. Il abrite un héritage artistique de près de 10 000 objets et œuvres d’art. Les 3 rouleaux illustrés du Dit du Genji sont la perle du musée. Classés « Trésor national », ils ne sont exposés que quelques jours par an. Dans le parc, on contemple la floraison des pivoines et des iris autour d’un charmant lac bordé d’érables.

Curiosité architecturale, le Cultural Path Futaba Museum montre la fusion des styles japonais et occidental dans une romantique maison d’architecte.

Quant au Centre d’artisanat de Noritake, il illustre la délicatesse des savoir-faire et savoir-vivre locaux. Sur le site historique de la fabrique de porcelaines, les bâtiments en briques sont entourés d’agréables jardins.

Des temples monumentaux

En pleine ville, le grand temple bouddhiste Osu Kannon, tout de rouge souligné, fut transféré ici sur ordre de Tokugwaa Ieasu en 1612, et plusieurs fois reconstruit.

À l’orée de la forêt, le temple bouddhiste Kōshō-ji est l’ultime étape du pèlerinage des trente-trois Kannon d’Owari. Il se compose d’une pagode à étages gardée par un Bouddha assis. Des marchés aux puces s’y tiennent les 5 et 13 de chaque mois. Le cimetière attenant s’étend dans la forêt, sur la colline chic et résidentielle de Yagoto.

Temple bouddhiste Kōshō-ji

Bouddha assis et pagode à étages au temple bouddhiste Kōshō-ji © Marie Borgers

Plus intimiste encore est le sanctuaire shintoïste Atsuta-jingū, dans un parc planté d’arbres centenaires. Dédié à la déesse du Soleil Amaterasu, il est l’un des plus vénérés du Japon avec celui d’Ise. Au cœur de la forêt de cyprès, il recèle le sabre Kusanagi-no-Tsurugi, l’un des Trois trésors sacrés du Japon. Si cette épée légendaire n’est pas exposée au public, un petit musée présente une collection de sabres.

Sanctuaire shintoïste Atsuta-jingū

Sanctuaire shintoïste Atsuta-jingū © Marie Borgers

Shopping du côté de Nagoya Station et Sakae

Les deux points névralgiques de Nagoya, la gare et Sakae, sont des spots de rêve pour les shopping addicts.

Point d’arrivée du Shinkansen, les tours jumelles JR Central Towers sont la vitrine de Nagoya. Elles abritent bureaux, hôtels, zones de restaurants et food courts, sans compter l’immense centre commercial JR Nagoya Takashimaya, temple du shopping.

Nagoya JR Central Towers

Nagoya JR Central Towers © Marie Borgers

À deux stations de métro, Sakae est l’une des cartes postales de Nagoya. Grands magasins et boutiques luxe s’agencent autour de rues tracées au cordeau, ponctuées par des panneaux lumineux et une grande roue. La Galaxy Platform couronne le centre commercial Oasis 21. Sur la toiture, la Sky Promenade est la plus haute plateforme d’observation en plein air du Japon. À deux pas, la Tour de Télévision a été la première du genre construite au Japon, dès 1954.

Oasis 21 et Tour de Télévision

Oasis 21 (Galaxy Platform) et Tour de Télévision © Marie Borgers

Tour de Télévision de Nagoya

Tour de Télévision de Nagoya © Marie Borgers

Plus au Sud, les abords du temple Osu Kannon sont un autre spot de shopping, plus traditionnel. Les galeries de l’Osu Shopping District regorgent de boutiques de kimonos, d’antiquités, de magasins d’occasion et d’électronique. Un marché aux puces s’y tient les 18 et 28 de chaque mois.

Petit florilège de parcs

Au pied de la Tour de Télévision, le délicieux parc Hisaya Ōdori a été réhabilité à l’automne 2020. Il redynamise tout le secteur de Sakae. Sur 2 km, il est bordé de boutiques, restos et bars où « chiller » en terrasse.

Parc Hisaya-Ōdori

Parc Hisaya-Ōdori © Marie Borgers

 

Autour du château, le parc Meijō charme avec son moulin à vent de style néerlandais. Quant au parc Tsuruma, c’est dans un décor de parterres de fleurs et de rotonde de style Renaissance italienne qu’il fait son show avec des spectacles de cosplays.

Parc Tsuruma

Rotonde du parc Tsuruma © Marie Borgers

Dans les collines à l’Est de Nagoya, le parc commémoratif Aichi Earth Expo Memorial Park est l’un des plus grands de la préfecture. Il a été construit sur le site de l’Expo universelle de 2005. Outre des installations sportives et un parcours cycliste, les chemins forestiers mènent à la reconstitution de la maison de Satsuki et Mei, personnages de Mon voisin Totoro.

Maison de Satsuki et Mei, Aichi Earth Expo Memorial Park

Vue sur la maison de Satsuki et Mei dans l’Aichi Earth Expo Memorial Park © Marie Borgers

Des activités pour les enfants

En centre-ville, le bâtiment végétalisé du musée des Sciences est assorti du plus grand planétarium du monde. À l’intérieur, les maquettes décortiquent les secrets de la vie, de la nature, la mécanique, l’informatique et l’énergie, jusqu’à un laboratoire de tornade ébouriffant.

Musée des Sciences

Planétarium du musée des Sciences © Marie Borgers

Le zoo d’Higashiyama est le plus grand du Japon après celui de Tōkyō. Il abrite plus de 500 espèces, des serres et jardins botaniques.

Pour les amateurs de faune marine, cap sur l’aquarium du port de Nagoya, l’un des plus grands du pays. Une faune marine du Japon à l’Antarctique s’ébat dans d’immenses bassins ouverts sur l’extérieur.

Aquarium du port de Nagoya

Bassin aux orques à l’aquarium du port de Nagoya © Marie Borgers

Pour les petits (et grands) amateurs de figurines jaunes, Legoland propulse dans le royaume chamarré et décalé de la petite brique, reconstitué plus grand que nature.

Legoland Nagoya

Legoland Nagoya : représentation de Sakae, Nagoya, dans Miniland © Marie Borgers

Les spécialités gastronomiques de Nagoya

Réputée pour sa gastronomie, Nagoya est considérée comme l’une des capitales gastronomiques du Japon. Les produits de la mer ne sont jamais loin. L’hitsumabushi est un must local : l’anguille, cuite au feu de bois, est cuisinée avec des condiments, et servie sur un bol de riz. Les nouilles kishimen sont cuisinées dans un bouillon à la bonite.

La « Nagoya meshi », la cuisine de Nagoya, laisse la part belle aux déclinaisons du miso. En tête, le miso-katsu, côtelettes de porc à la sauce miso, et le miso nikomi udon, des nouilles dans un bouillon de miso.

Au rayon sucré, on déguste le gâteau du diable (oni manju), à base de patate douce. Le riz s’invite au dessert : les mochi sont des gâteaux à base de riz gluant, et les gohei mochi, des brochettes de riz à la sauce miso, souvent croquées en en-cas. Le thé matcha vient non seulement accompagner, mais aussi parfumer les cakes, gâteaux roulés et puddings.

 

Sur la ligne Tokaido du Shinkansen, entre Tōkyō et Kyōto, Nagoya est souvent restée dans l’ombre de ses grandes sœurs et du Kansai. Elle affiche pourtant un dynamisme économique certain, doublé d’une scène culturelle dynamique. Plutôt conservatrice dans l’âme, Nagoya a tout du Japon traditionnel. Mais elle n’en porte pas moins dans son ADN une farouche capacité d’innovation et un désir de renouveau. Et après nous avoir gorgés d’énergie, elle est le point de départ d’excursions dans les Alpes japonaises !

1 réponse

  1. claude mouflard dit :

    J ‘ai eu le plaisir de Découvrir la belle Cité de Nagoya et ses Trésors ; Très Exhaustif et Instructif ce mini-reportage ; j ‘ai visité les mégapoles de Tokyo / Osaka /et la Ville-Musée de Kyoto lors de Séjours Studieux d ‘Arts Martiaux ( Kyudo et Kendo-Iaido ) mais , aussi , Touristiques ! Je suis un Fan des Arts Asiatiques et surtout de la Culture Nipponne ! Résidant dans les Alpes de Hte Provence , je me suis ‘ Surnommé ‘ ; le Japro-vençal ! ‘ Kami ‘ ; fais que je retourne un Jour prochain à Shipango !

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