Anim’Est 2023 : des wagashi signés Takanori Murata, maître pâtissier japonais

A l’occasion des 50 ans du jumelage entre Nancy et Kanazawa, la ville nancéienne et Anim’Est, accompagnée du Consulat Général du Japon à Strasbourg ont célébrés cet anniversaire important. Pour marquer le coup, ils ont fait venir Takanori MURATA. Le maître pâtissier japonais spécialisé dans les wagashi a fait une démonstration devant plus de 50 personnes. Curieux, les visiteurs ont pu goûter à ce qui s’apparente à une œuvre d’art. Journal du Japon a eu la chance d’assister à ce moment unique et de rencontre le chef pâtissier.

Takanori MURATA et la délégation du Consul Général du Japon à Strasbourg
©Leo Thomas pour Journal du Japon

Un évènement pour fêter les 50 bougies de l’amitié entre Nancy et Kanazawa !

Cette démonstration qui a été offerte aux visiteurs d’Anim’Est est le fruit d’une amitié qui dure depuis un demi-siècle entre les habitants de Nancy et de Kanazawa. Depuis 1973, les deux villes n’ont cessé de développer cette relation franco-japonaise, avec des échanges scolaires et artistiques notamment. Puis au fil du temps, s’en est suivi un développement culturel plus fort mais aussi économique avec des échanges de chefs cuisiniers et de sportifs afin de favoriser l’attractivité de la plus grande ville de Meurthe-et-Moselle. En octobre 2023, le maire de Nancy, Matthieu Klein s’était rendu à Kanazawa pour rencontrer son homologue Takashi MURAYAMA. Malgré la distance qui les sépare, cette amitié continue de plus belle !

Discours d'ouverture du Consul UCHIDA.
©Leo Thomas pour Journal du Japon

La découverte des wagashi de Takanori Murata est un des nombreux exemples. Le Consulat Général du Japon à Strasbourg s’est également associé à ce moment avec la présence de Monsieur UCHIDA, le consul général. Il a inauguré cette démonstration en évoquant le jumelage mais aussi le parcours du chef pâtissier. Monsieur Uchida s’est dit « très impressionné des liens entre Nancy et Kanazawa depuis 50 ans ». L’adjoint au maire de Nancy, Antoine Le Solleuz a ajouté que c’était un « plaisir de pouvoir mettre en valeur la pâtisserie japonaise, une arme supplémentaire dont le Japon a le secret ».

Une démonstration artistique et gustative

Pendant une heure, Takanori Murata a montré tout ses atouts pour impressionner le public. Avant de se lancer dans sa démonstration, il préparait son plan de travail en y exposant plusieurs choses. Nous étions très stupéfaits de la quantité d’objets qu’il utilisait dans la confection de ses pâtisseries avec les nombreux emporte-pièces et moules pour donner la forme qu’il souhaite à ses wagashi. De plus, il avait montré les différentes sortes de haricots qu’il utilisait dans chacune de ses recettes, à commencer par le haricot azuki qui provient des Pyrénées ou d’Alsace. En amont, il avait déjà préparé ses pâtes à base de farine de riz et de sucre pour gagner du temps. Les wagashi sont en général des pâtisseries que l’on sert lors de la cérémonie du thé.

Le plan de travail prêt, le maître pâtissier n’a pas attendu pour montrer avec pédagogie la confection des wagashi qu’il comptait présenter aux visiteurs. Il a débuté la séance en faisant un premier wagashi avec une pâte de haricot azuki qu’il enveloppe ensuite avec de la pâte de farine de riz. Avec un petit bâton, il va sculpter le wagashi pour en faire une fleur qui s’apparente à une marguerite. Pour aller plus loin, il a également reproduit une fleur de sakura sous la texture d’un wagashi en le sculptant avec un autre bâton de forme triangulaire qui permet de créer les pétales de la fleur de cerisier. Comme les visiteurs, nous avons été impressionné par la précision chirurgicale appliquée à un de ses wagashi s’inspirant d’un chrysanthème en prenant le temps avec un ciseau de reproduire les petites pétales une à une. Pour faire référence à Nancy et la région Lorraine, Takanori Murata a fait le choix de reproduire un sapin sous la forme d’un wagashi. Le résultat était tout aussi spectaculaire !

Wagashi de Monsieur MURATA.
©Leo Thomas pour Journal du Japon

La démonstration s’est terminée avec une dégustation des différents wagashi. Nous avons pu en goûter quelques-uns comme le sapin dont on pouvait sentir une texture particulière et avec une pâte de riz gluante très sucrée mais qui se savoure très bien ! Si l’idée vous vient de commander des wagashi, il est recommandé de boire du matcha pour atténuer la puissance du goût sucré du wagashi. Les spectateurs se sont rués pour goûter à ses pâtisseries et adultes comme enfants ont été très séduits par les talents de Takanori Murata !

Wagashi de Monsieur MURATA.
©Leo Thomas pour Journal du Japon

Rencontre avec Takanori Murata

Takanori Murata est diplômé d’une école de pâtisserie de Kyoto. Il a travaillé au Japon pendant plusieurs années avant de travailler au Restaurant étoilé Aida à Paris en 2005. Il a crée en 2017 sa propre société où il vend ses wagashi. Il a également multiplié les démonstrations en France et dans d’autres pays.

Takanori MURATA
©Leo Thomas pour Journal du Japon

Pour l’occasion, le maître pâtissier nous a accordé un moment pour échanger avec lui autour de sa passion pour les wagashi :

Journal du Japon : Bonjour et merci de nous donner l’opportunité d’échanger avec vous. Est-ce que vous pouvez nous parler de vous et de votre parcours ?

Takanori Murata : Je m’appelle Takanori Murata. Je viens de la préfecture d’Aichi au Japon. A partir de 20 ans, j’ai travaillé à Kyoto. J’occupais une boutique de wagashi dans ma ville natale et j’avais envie de faire connaître cette pâtisserie dans le monde et c’est comme ça que j’ai été amené à travailler à Paris.

Vous aviez fait une démonstration devant une cinquantaine de visiteurs à Anim’Est. Comment avez-vous vécu ce moment devant des personnes qui ne connaissaient pas cette pâtisserie ?

Je fais beaucoup de démonstrations dans des grandes villes comme Londres ou Paris et c’est assez rare d’en faire dans des plus petites villes comme Nancy. Dans ce genre de lieu, il y a beaucoup de gens qui n’ont jamais mangé de wagashi. C’est vraiment plaisant d’être au contact avec ce type de public !

Quelles sont les particularités du wagashi ?

Ce sont des pâtisseries japonaises qui existent depuis longtemps au Japon. Ils sont en accord avec les saisons. La base est le haricot azuki et le anko, la pâte de haricots rouges. Ce qui m’intéresse c’est la réaction des personnes par rapport à cette pâte.

Comment arrivez-vous à trouver de l’inspiration dans les wagashi que vous réalisez ?

C’est assez varié. Je m’inspire souvent de la vie quotidienne dans le passage des saisons. En ayant discuté avec des nancéiens, j’ai eu de nouvelles idées. Dans la conversation pendant Anim’Est, quelqu’un m’avait parlé de l’anis et je me suis dit qu’on pourrait en faire quelque chose.

Quand on recherche le mot wagashi sur le web, on en voit plusieurs types. Pouvez-vous nous expliquer ces variétés ?

Ce qui sort le plus sur Internet, c’est le dorayaki, les dango et le mochi glacé. A Anim’Est, j’ai fabriqué des wagashi plus rares qu’on offre en cadeaux. Dans cette catégorie-là, on fait très attention à la saisonnalité. Il y a une symbolique de plus dans le choix de la pâtisserie.

Pendant votre démonstration, vous avez réalisé un wagashi en forme de chrysanthème avec une précision surprenante. Faut-il une certification particulière pour arriver à ce genre de maîtrise ?

Il n’y a pas besoin en soit d’une certification. Si on veut travailler dans les wagashi, l’embauche sera plus facile si vous en avez une.

Quelle est la principale difficulté dans la confection d’un wagashi ?

Haricot azuki, fèves et autres ingrédients
©Leo Thomas pour Journal du Japon

C’est le anko. Le processus pour transformer le haricot azuki en pâte ou en crème est très compliqué.

En quoi consistent les différents instruments que vous avez utilisé ?

J’ai utilisé un bâton triangulaire et un autre avec lequel j’ai pu sculpter les wagashi. Je fabrique souvent moi-même ces instruments à partir de bambous, de branches de cerisiers et il m’arrive moi-même de faire mes propres moules car il y a des wagashi qu’on vient appuyer dedans. Par exemple, je le fais avec de l’aluminium.

Matériels pour fabriquer les wagashi
©Leo Thomas pour Journal du Japon

Pouvez-vous nous parler des wagashi réalisés pendant votre démonstration ?

Je ne pouvais pas utiliser de plaques chauffantes. Cela a beaucoup joué dans le choix des pâtisseries. J’avais envie de présenter quelque chose à base de mochi mais qui soit différent de ce que vous voyez habituellement. Le premier est le chrysanthème (à base de mochi) et une pâte à base de farine de riz. J’ai ensuite fait des nerikiri, ceux à base de anko et qui sont des pâtisseries sculptées. Le but était de montrer les différentes techniques de sculptage.

Comment réagissent les clients occidentaux qui goûtent à ce genre de pâtisserie pour la première fois ?

C’est assez différent par rapport à il y a quelques années. En 2011, quand j’ai commencé à faire des wagashi en France, les gens n’aimaient pas et n’avaient aucune idée de ce que c’était. Aujourd’hui, on voit des films là dessus comme les Délices de Tokyo de Naomi KAWASE. Ils connaissent les ingrédients de base et ça commence à être de plus en plus accepté.

En écoutant une de vos vidéos, vous disiez utiliser des ingrédients d’origine végétale mais est-ce qu’il est possible de se servir d’ingrédients d’origine animale ?

Il m’est arrivé d’utiliser des œufs même si ce n’est pas très fréquent. Je ne pense pas que ça dénaturerait le wagashi car je mets aussi du fromage frais. J’ai par exemple fabriqué un wagashi dans lequel j’ai mis du comté !

Est-ce difficile de mettre en avant le wagashi dans un pays comme la France dont la pâtisserie est considérée comme une institution ?

C’est difficile mais les Français ont une bonne appréciation du wagashi. Cela vaut le coup de le faire !

Pensez-vous que le wagashi arrivera un jour à avoir la même notoriété qu’un Paris-Brest ?

En ce moment, le mochi est assez à la mode. Je voudrais au moins arriver à ce qu’on trouve une boutique de wagashi dans une ville comme Nancy.

Avez-vous eu l’occasion de faire goûter vos pâtisseries à des chefs à forte notoriété en France ?

Alain Ducasse en a mangé mais aussi l’ancien Président de la République François Hollande, j’en ai fait devant lui. Une pâtissière alsacienne, Claire Heitzler en a également goûté. Alain Ducasse m’avait dit qu’il pouvait s’en inspirer dans certains de ses menus.

Quels sont vos projets à venir ?

Le wagashi a été inscrit récemment au patrimoine mondiale de l’UNESCO. J’ai vraiment envie de faire connaître davantage le wagashi dans le monde.

Quel est votre endroit préféré au Japon ?

J’aime la préfecture d’Aichi puisque je suis né là-bas.

Quelle est votre définition du Japon ?

Il y a un kanji qui se lit « wa » et qui veut dire « harmonie ». Cela veut également dire Japon. C’est un pays où on peut ressentir cette harmonie.

Un dernier mot ?

J’espère que les visiteurs vont s’intéresser aux wagashi. Il y avait pas mal d’enfants pendant la démonstration. Ils ont pu en goûter pour la première fois et j’espère qu’ils s’en souviendront en grandissant et que ça les rendra nostalgiques.

Nous remercions Monsieur MURATA pour cette discussion très enrichissante. Comme beaucoup de visiteurs, nous avons été très impressionnés par cette démonstration menée avec pédagogie. Nous espérons qu’Anim’Est fera davantage d’évènements comme celui-ci qui est une belle preuve d’amitié entre Nancy et Kanazawa. Si vous aimez les wagashi, il est possible d’en commander sur Marutomi Paris, la société du chef MURATA.

Leo Thomas

Passionné de la culture japonaise depuis plusieurs années, je fais transpirer cette passion via des articles sur des domaines variés (conventions, traditions, littérature, histoire, témoignages, tourisme).

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