Passer une fin d’année tout en douceur : la sélection feel-good de Journal du Japon
Nous vous proposons aujourd’hui de partir à la découverte d’un genre littéraire qui a le vent en poupe : le feel-good à la japonaise. Des chats, des cafés, des librairies, des boulangeries et des bibliothèques… Si certaines maisons d’édition comme Nami en ont fait leur marque de fabrique, la littérature de guérison intéresse désormais plus d’un éditeur : Albin Michel, Le Bruit du Monde, Kibun, etc. Nous avons sélectionné pour vous six romans divers et variés qui poursuivent néanmoins le même objectif : apporter une parenthèse enchantée et/ou soigner les cœurs brisés.
Le chat qui reliait les âmes au café Pont

Si Fuuta, un chat tigré ayant tout récemment rejoint l’au-delà, pensait que sa nouvelle vie se déroulerait posément, il avait tout faux ! Dans Le chat qui reliait les âmes au café Pont, l’au-delà (renommé ici le « pays bleu » par Fuuta lui-même) peut en effet être vécu comme un havre de quiétude. Mais pour les félins rêvant de fouler à nouveau le monde des vivants (renommé « pays vert »), un délai de sept mois est imposé avant qu’ils n’accèdent à ce luxe sporadique. Pour ceux comme Fuuta qui ont hâte de reprendre contact avec leurs chers humains, il existe une solution : officier au Café Pont et réaliser 5 missions pour avoir la possibilité d’écourter leur attente !
L’intriguant café, situé à la limite des deux mondes, est géré par Nijiko. Celle-ci recueille les souhaits de retrouvailles de ses clients et en confie aux chats-messagers. Les vœux retenus étant minutieusement sélectionnés par la gérante et leur accomplissement pas toujours aussi simple que le souhaiterait Fuuta. Il doit connecter non pas directement les humains des deux pays mais faire voyager les âmes défuntes jusqu’au pays vert pour ensuite leur trouver un réceptacle. Il doit faire cependant très attention à cette étape minutieuse, où l’âme perdra en qualité s’il tarde à sa mission ou la transfère sur un objet au lieu d’un humain ! Sans oublier les enquêtes que le chat-messager doit mener pour retrouver le correspondant souhaité et apprendre le plus d’informations possibles sur le commanditaire.
Les chats présentés ici ont des comportements réalistes : un coin de soleil ou de cheminé bien chaud, un bout de gazon bien frais ou une odeur alléchante… peuvent vite détourner les chats-messagers de leurs missions ! Leurs déplacements dans le pays vert, grâce aux autorisations de Nijiko, sont mûrement réfléchis pour qu’ils mènent au mieux leurs enquêtes. Ils ne doivent pas se contenter d’amener une âme auprès du commanditaire, celle-ci pouvant entrer momentanément en contact avec lui sous les traits d’un enfant ou d’une radio, mais faire en sorte qu’elle lui transmette un message rassurant et apaisant. Les deux âmes n’entrant jamais directement en contact mais communiquent leur amour mutuel. L’autrice ayant elle-même tenu un café à Tokyo et été finaliste du premier prix littéraire Oishii en 2018, elle décrit avec brio l’ambiance chaleureuse du Café Pont. Suivez les aventures de Fuuta chez les éditions Harper Collins cet hiver.
Plus d’informations sur le site de l’éditeur. (Marie)
La douceur du café

Ce 4e tome de la série à succès de Toshikazu Kawaguchi nous ramène dans le fameux café insolite. La légende de ses délicieux breuvages pouvant permettre à leurs consommateurs de retrouver un être cher dans le passé est toujours intacte ! Mais les conditions restent toujours aussi exigeantes. Parmi ces règles : l’interlocuteur que l’on souhaite rencontrer doit être déjà venu au moins une fois dans l’établissement, le café doit être entièrement bu avant qu’il ne refroidisse, et les interactions n’auront aucun impact sur l’histoire déjà écrite.
Il est intéressant de découvrir toutes les lois régissant cet étrange voyage. Celui-ci permet surtout d’apaiser le client du café ou de lui apporter des réponses inatteignables dans l’instant présent. Or les clients expérimenteront des voyages inhabituels même pour les employés et les propriétaires normalement habitués à ces expéditions temporelles tels que voyager avec un second passager ou rencontrer un client venant du futur.
Les éditions Albin Michel vous donnent de nouveau l’opportunité de franchir l’entrée de l’intriguant Dona Dona en cette fin d’année. Si vous n’êtes pas familier de cette série, malgré la présence d’habitués parmi la clientèle, vous serez toujours bien accueilli par l’équipe du café. Aux nouveaux clients comme aux lecteurs, ils reviendront posément sur les règles régissant ces voyages enrichissants. Prêt pour un voyage sensoriel ?
Plus d’informations sur le site de l’éditeur. (Marie)
Le café secret des nuits de pleine lune – Bonnes résolutions

Vous aimez confiez vos espoirs à l’astrologie ? Ce second volume du café secret des nuits de pleine lune, toujours chez les éditions Nami, vous permettra d’y voir plus clair quant à l’influence des astres sur nos personnalités. L’autrice, Mai Mochozuki, combine dans ses pages aussi bien les croyances occidentales envers les astres et leurs constellations qu’envers le lien des chats avec le mysticisme. Sans être question de prédire l’avenir au travers du positionnement des étoiles à notre naissance, Mochizuki nous invite à comprendre nos prédispositions et à ne pas se détourner de notre désir profond. Une introspection devenant alors nécessaire, combinée à la prise en compte de nos caractéristiques astrales (signe solaire, signe lunaire et ascendant ; la plupart des personnes s’arrêtant à ce premier et ce second étant souvent oublié). L’autrice confie s’être intéressée à l’astrologie pour appliquer à elle-même ces remises en question et établir des projets plus en phase avec ses envies profondes.
Dans ce roman, il est donc surtout question de personnes découvrant inopinément ce café ambulant alors qu’ils font face à des embranchements fatidiques de leur vie ou qu’ils se persuadent de se plaire dans leur situation. Les employés félins, étudiant le positionnement des planètes et des constellations avec rigueur, ont pour mission d’aider leurs clients à davantage se comprendre pour mieux se projeter dans l’avenir. Par quel moyen ? En leur concoctant de délicieux plats selon leurs besoins et non leurs désirs. Or, hormis le patron, qui a l’apparence d’un énorme chat calico (il sera confondu avec un costume de mascotte), les employés auront tantôt une apparence humanisée tantôt leur apparence féline. L’ambiance irréelle et le contexte hors-norme du cadre convainquent les clients qu’ils n’ont pas affaire à un café ordinaire. Dans ce tome, nous découvrons tour à tour trois femmes liées par leur quotidien : une carriériste hésitant à se marier, une intermittente cherchant vainement sa place dans le monde actif et une mère ayant des rapports compliqués avec son père. Trouveront-elles toutes leurs réponses au fond de leurs verres scintillants ? Ou au contraire dans leur fort intérieur ?
Nous contemplerons de jolies illustrations des boissons, plats et desserts servis dans ce roman. Qu’il s’agisse d’une limonade rafraîchissante gorgée de citron et de lumière lunaire, ou d’une fondue dont les légumes ont poussé sous la lumière solaire, chaque choix culinaire est minutieusement défini. Le travail de l’illustratrice Chihiro Sakurada donne de la consistance aux délicieux plats décrits par leurs consommateurs. Grâce à son succès japonais, l’univers de Mai Mochizuki a pu se développer sur quatre tomes (finis) et lui permettre d’être en cours de traduction en 20 langues ! Le café secret des nuits de pleine lune est son premier roman traduit en français.
Plus d’informations sur le site de l’éditeur. (Marie)

Un printemps au goût de mochi

Ce premier tome de la série La librairie du Vendredi de Natori Sawako a rejoint cet hiver nos étagères françaises. Après avoir travaillé dans une société de jeux vidéo en temps que scénariste (tels que Drakengard, NieR et Tales of Eternia), elle s’est lancée dans la littérature. Cette série s’inscrit dans la volonté de développer des romances à plusieurs facettes. Qu’il s’agisse des sentiments amoureux que développent le héros envers la jeune et jolie libraire, comme des rapports de chaque personnage avec leur livre préféré.
Nous suivons Fumiya, un étudiant qui fait la découverte près de la petite gare de Nohara d’une intrigante librairie. Celle-ci ayant pour réputation d’offrir à ses clients les livres dont ils ont besoin. Mais la charmante Makino n’opère pas seule entre les rayons : le propriétaire hargneux Waku veille à ce qu’il n’y ait pas de grabuges dans les rayons ! Et le doux Sugawa opère depuis son bar de délicieuses boissons et de savoureux repas dans la section café. Mais en fréquentant La librairie du Vendredi, Fumiya va explorer ses mystères : la réserve souterraine, le passé des employés, sans oublier les confessions des clients se prêtant à cet exercice intime.
En compagnie de ce charmant trio, l’étudiant va découvrir que chaque récit certes fictif en dit long sur sa propre personnalité et son propre rapport au monde. A quel protagoniste le lecteur va-t-il réellement s’identifier ? Pour quels motifs va-t-il approuver ou non les choix des personnages ? Et si derrière chaque roman qu’il va précieusement affectionner, une part de son propre vécu était renfermé dans les pages ? Savourez tel un bon chocolat chaud ou un moelleux castella ce roman des maisons d’éditions Le bruit du monde.
Plus d’informations sur le site de l’éditeur. (Marie)
La boulangerie de minuit – Quand la douceur du pain soigne les cœurs cabossés

Ouvrir La Boulangerie de minuit, c’est entrer dans un refuge. Les Éditions Hauteville / Collection Kibun et Noriko Onuma nous proposent un lieu hors du temps, ouvert dès 23h jusqu’au matin, où l’on sert bien plus que du pain. On y dépose ses peines, ses souvenirs, ses regrets et on en ressort le cœur un peu plus léger.
L’histoire commence avec Nozomi, une jeune fille que sa mère a une nouvelle fois abandonnée. Elle décrit cette mère comme un oiseau coucou : toujours prête à laisser son œuf dans le nid des autres. C’est ainsi qu’elle croise la route de Yosuke, un boulanger aussi doux que bienveillant, veuf d’une femme dont Nozomi est la petite sœur. Aux côtés de son associé Hiroki, Yosuke gère cette boulangerie pas comme les autres, ouverte uniquement la nuit. Peu à peu, une belle alchimie naît entre ces trois êtres cabossés. Et comme dans La Cantine de minuit, les clients se succèdent : chacun vient avec ses blessures, ses manques, sa solitude et repart un peu plus apaisé.
Nul besoin de commander : on vous servira ce dont vous avez réellement besoin.
Vendu à plus d’1,5 million d’exemplaires au Japon, ce roman a tout du healing book par excellence. Douceur, réconfort, lenteur on y retrouve cette philosophie japonaise du temps retrouvé, où le simple fait de préparer une brioche devient un acte de tendresse et de reconstruction. C’est aussi le manifeste parfait de la nouvelle collection Kibun chez Hauteville, un mot qui signifie « humeur » ou « feeling » en japonais et en coréen. Ces livres, à l’image de cette boulangerie ouverte sous la lune, sont faits pour réchauffer l’âme et offrir un moment de calme au milieu du tumulte.
Un roman comme une tasse de thé chaud au petit matin. À savourer lentement, avant que le jour se lève.
Plus d’informations sur le site de l’éditeur. (Alexis)
Dernier train pour Kamakura – Voyage à travers le deuil

Clôturons cet article par le moins fell-good des feel-goods, le roman le plus touchant et le plus dévastateur des éditions Nami : Dernier train pour Kamakura. L’ambiance nous est donnée avec le thème de départ : un train déraille, faisant des dizaines de morts. Peu de temps après, une drôle de rumeur se met à circuler… Une rumeur selon laquelle celles et ceux qui sont liés à l’une des victimes pourraient monter dans un train fantôme, qui circule chaque nuit sur la ligne Yuigahama, leur permettant ainsi de revoir les disparus une dernière fois.
Quatre règles, énoncées comme suit, encadrent le phénomène :
– Les passagers morts n’apparaissaient qu’à la gare où ils étaient montés.
– Il était interdit de leur révéler l’imminence de leur décès.
– Il fallait impérativement descendre, au plus tard, à la gare de Nishi-Yuigahama. Quiconque restait à bord après cet ultime arrêt connaîtrait le même sort funeste que les défunts.
– Enfin, il était impossible de modifier le cours des événements. Les morts ne reviendraient pas à la vie. Si l’on tentait de les faire descendre du train, le voyage dans le passé prendrait fin.
Les fans deToshikazu Kawaguchi, mentionné plus tôt avec La douceur du café, ne manquerons pas de retrouver les ingrédients qui font le succès de sa série. Loin de parler uniquement de reconstruction personnelle après un deuil brutal, Takeshi Murase aborde ici différents sujets de société tels que le harcèlement scolaire, le suicide des mineurs, l’aliénation ressentie par les salarimen, la pression sociétale à avoir un « travail respectable », etc. Vous y suivrez quatre personnages principaux qui donnent voix à l’histoire, entourés d’une myriade d’autres personnages qui se rencontrent au fil des chapitres ou se croisent sans jamais se parler… Tous sont touchants, bien développés et réalistes. L’écriture, vivante et incarnée, possède la saveur de la vie. Point de happy-end dans ces histoires, à l’image de la réalité qui nous entourent, mais beaucoup de bienveillance et un message précieux : les disparus ne nous invitent jamais à les suivre dans la mort, mais nous incitent au contraire à continuer de vivre malgré la douleur et à profiter de chaque instant de bonheur… Car ceux-ci ne sont pas éternels. Une jolie leçon de vie qui ne manquera pas de vous tirer quelques larmes.
Plus d’informations sur le site de l’éditeur. (Nina)
Si vous avez envie de ralentir, de prendre votre temps pour savourer une lecture pleine de douceur et d’émotions, n’hésitez pas à vous rendre dans votre librairie favorite avant les fêtes ! Ces six ouvrages feront également de magnifiques cadeaux pour tous les amoureux du Japon et des instants lecture sous le plaid avec une tisane chaude dans une main… Avec un supplément chat sur les genoux pour les plus casaniers.
