Rétrospective Kenji MIZOGUCHI en 8 films : une restauration à ne pas rater cet été !

A l’occasion de la restauration en copie numérique 4K de 4 films de Kenji MIZOGUCHI, Capricci a décidé d’organiser une rétrospective à ce grand maître du cinéma japonais, au même rang que KUROSAWA, OZU et NARUSE. On ne peux que saluer ce projet issu de la collaboration de la Kadokawa, société de production qui a absorbé la Daiei, l’un des principaux studios japonais des années 1950-60 et qui a produit les films de Mizoguchi, et de la Film Foundation, fondation créée par Martin Scorsese pour la préservation des œuvres cinématographiques.

Voilà une bonne raison, donc, de vous présenter 8 films à (re)découvrir dans les salles de cinéma cet été, à partir du 31 juillet ou dans une nouvelle édition DVD-BluRay à venir prochainement.

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Rétrospective Kenji Mizoguchi Les Contes de la Lune Vague Après la Pluie

Les Contes de la lune vague après la pluie

Les Contes de la lune vague après la pluie (1953)

Genre : Drame psychologique

Avec : Masayuki MORI (Genjuro), Machiko KYOO (Lady Wakasa), Kinuyo TANAKA (Miyagi), Eitarô OZAWA (Tobei), Ikio SAWAMURA (Genichi), Mitsuko MITO (Ohama), Kikue MOORI (Ukon).

Synopsis : Le Japon au 16e siècle. Deux couples de paysans fuient la guerre civile et partent pour la ville. Kenjuro le potier rencontre la princesse Wakasa au marché et en tombe éperdument amoureux. Elle l’entraîne dans son manoir. Mais Kenjuro apprendra à ses dépens qu’il ne faut pas se fier aux apparences. Quant à Tobeï, abandonnant sa femme qui finit prostituée, il cherche à devenir samouraï pour se couvrir d’une gloire factice…

« Si j’ai choisi la forme d’un « conte de fantôme », c’est que je ne peux pas exprimer et traiter mon sujet dans un style réaliste et contemporain. Cette forme m’est absolument nécessaire pour exprimer d’un façon satirique et critique mes idées sur la société et sur l’histoire. Je ne recherche pas seulement un effet de surprise et de curiosité. » Kenji MIZOGUCHI.

D’après deux récits du recueil Contes de pluie et de lune d’Ueda AKINARI et d’une nouvelle de Guy de Maupassant, le réalisateur ne nous livre pas un Japon médiéval fantasmé. L’image des hommes est peu flatteuse : l’égoïsme des maris qui délaissent leurs femmes par cupidité, l’orgueil et les rêves de grandeur, la luxure et la tromperie, l’abandon des siens, femmes et enfants étant livrés à eux-mêmes.

L'intendant Sansho

L’intendant Sansho

L’Intendant Sansho (1954)

Genre : Drame épique

(Sansho dayu). Avec : Kinuyo TANAKA (Tamaki), Yoshiaki HANAYAGI (Zushiô), Kyôko KAGAWA (Anju), Eitarô SHNDOO (Sanshô dayû), Akitake KOONO (Taro) Masao SHIMIZU (Masauji Taira).

Synopsis : 11e siècle. Un gouverneur de province est exilé pour avoir pris le parti des paysans contre l’avis d’un chef militaire. Contraints de reprendre la route de son village natal, sa femme Tamaki et ses enfants Anju et Zushio sont kidnappés par des bandits de grand chemin. Tamaki est déportée sur une île, tandis que les enfants sont vendus comme esclaves à l’intendant Sansho, un propriétaire cruel.

« Tout film de Mizoguchi commence par le dépouillement de tous les oripeaux littéraires. Quand il se préparait à tourner L’Intendant Sansho, il se plaisait à dire : « On ne va pas refaire L’Intendant Sansho de Mori Ogai. Ce que je veux, c’est décrire, montrer clairement la réalité sociale où a pris racine cette vieille histoire populaire. » Takizawa HAJIME, journaliste

Avec son talent et sa mise en scène tout en sobriété, MIZOGUCHI réussit à faire ressortir l’émotion et à dénoncer la cruauté humaine, l’exploitation de l’homme par l’homme, les humiliations et la condition des paysans. Intense et humaniste, ce chef d’œuvre ne fait aucune concession et le réalisateur nous fait entrer avec brio dans cette époque difficile.

Les amants crucifiés

Les amants crucifiés

Les Amants crucifiés (1954)

Genre : Mélodrame

Avec : Kazuo HASEGAWA (Mohei), Kyôko KAGAWA (Osan), Eitarô SHINDOO (Ishun), Eitarô OZAWA (Sukeemon), Yôko MINAMIDA (Otama), Haruo TANAKA (Gifuya Dôki), Chieko NANIWA (Okô), Ichirô SUGAI (Gembei) Tatsuya ISHIGURO (Isan), Hiroshi MIZUNO (Kuroki).

Synopsis : 17e siècle. Mohei est le brillant employé de l’imprimeur des calendriers du palais impérial. O-San, la jeune épouse de son patron, sollicite son aide pour éponger les dettes de sa famille car son mari est trop avare. Mohei accepte et emprunte l’argent sur la commande d’un client. Dénoncés et menacés d’adultère, Mohei et O-San vont devoir fuir avant de s’avouer l’un l’autre leur amour.

Les Amants crucifiés est un mélange de drame humain, de passion amoureuse et d’une critique sociale dans lequel MIZOGUCHI défend le droit à l’amour dans un Japon où les coutumes, lois et traditions broient les plus faibles, notamment les femmes. Après Les Contes de la lune vague après la pluie et L’Intendant Sansho, on a le plaisir de retrouver les valeurs humanistes du réalisateur. L’adultère y est décrit non pas comme une trahison de l’épouse envers son mari mais une preuve de son épanouissement et de sa libération de l’emprise machiste de la société qui dicte et impose qui aimer.

La rue de la honte

La rue de la honte

La rue de la honte (1956)

Genre : Drame social

Avec : Machiko KYOO (Mickey), Aiko MIMASU (Yumeko), Ayako WAKAO (Yasumi), Michiyo KOGURE (Hanae), Kumeko URABE (Otane), Yasuko KAWAKAMI (Shizuko), Hiroko MACHIDA (Yorie).

Synopsis : Dans une maison de tolérance du quartier des plaisirs de Tokyo, cinq femmes se vendent aux passants alors qu’une loi limitant la prostitution est sur le point d’être votée. Chacune rêve d’échapper à sa condition et de connaître une vie meilleure.

«Dans son dernier film, chronique d’un bordel menacé de fermeture, Mizoguchi se surpasse pour dépeindre la brutalité des rapports sociaux avec une crudité inouïe. Le déchirant lyrisme des films à costumes laisse place à une violence sèche qui coupe le souffle.» Serge Chauvin (Les Inrockuptibles n° 212, le 10 mars 1999)

Il s’agit du dernier film réalisé par Kenji MIZOGUCHI qui mourra le 24 août 1956 alors en pleine préparation du tournage de Contes d’Osaka qui sera finalement réalisé par Komisaburo YOSHIMURA. Fidèle au thème de l’aliénation des femmes, le cinéaste décrit d’une manière crue et réaliste, avec La rue de la honte, le quartier des plaisirs à Tokyo où les femmes y sont ni plus ni moins que des marchandises.

Miss Oyû

Miss Oyû

Oyu-sama (1951)

Genre : Mélodrame

Avec : Kinuyo TANAKA (Oyû Kayukawa), Nobuko OTOWA (Shizu), Yuji HORI (Shinnosuke Seribashi), Kiyoko HIRAI (Osumi), Reiko KONDO (Otsugi Kayukawa), Eijirô YANAGI (Eitaro), Eitarô SHINDOO (Kusaemon), Kanae KOBAYASHI (Nanny).

Synopsis : Fin de l’ère Meiji. Lorsque Shinnosuke est présenté à Shizu en vue d’un mariage, il est ébloui par sa  sœur Oyū, plus âgée. Bien que celle-ci soit veuve, les conventions l’empêchent toutefois de se marier car elle reste liée à son défunt mari par l’enfant qu’ils ont eu ensemble. Le mariage entre les jeunes gens aura bien lieu, mais Shizu décidera que c’est sa sœur qui profitera des faveurs de Shinnosuke…

La femme japonaise doit tout sacrifier sur l’autel des conventions sociales pour préserver l’honneur de la famille. Dans ce triangle amoureux, MIZOGUCHI filme l’importance de ces traditions ancestrales, les contraintes auxquelles les femmes sont soumises en matière de tenue vestimentaire, de gestuelle ou de maintien… Chaque mot prononcé est mûrement réfléchi. Tout est extrêmement codifié.

Les musiciens de Gion

Les musiciens de Gion

Les Musiciens de Gion (1953)

Genre : Mélodrame

Avec : Michiyo KOGURE (Miyoharu), Ayako WAKAO (Eiko), Seizaburô KAWAZU (Kusuda).

Synopsis : Dans le Japon d’après guerre, à Gion, quartier de Kyoto, la jeune Eiko dont le père endetté ne veut pas payer les études, décide de devenir geisha de haut niveau, à l’instar sa mère qui vient de mourir. Elle demande à une geisha célèbre pour sa beauté, Miyoharu, d’assurer sa formation. Il leur faut pour cela emprunter de l’argent à une influente propriétaire de maison de thé, Okimi. Mais les deux jeunes femmes comprennent qu’elles doivent, en contrepartie, coucher l’une avec un industriel, l’autre avec un haut fonctionnaire. Lors d’une soirée à la maison de thé, Eiko se rebelle et blesse l’un des hommes à la langue. Scandale : toutes les portes se ferment devant elles. Pour survivre, elles sont contraintes de céder. Dans la maison voisine, une nouvelle jeune geisha arrive…

« Si la poésie apparaît à chaque seconde, dans chaque plan que tourne Mizoguchi, c’est qu’elle est le reflet instinctif de la noblesse inventive de son auteur. » Jean-Luc Godard, cinéaste franco-suisse

Une femme dont on parle

Une femme dont on parle

Une femme dont on parle (1954)

Genre : Mélodrame

Avec : Kinuyo TANAKA (Michiko Akiyama), Masayuki MORI (Tadao Akiyama), Sô YAMAMURA (Eiji Ono), Yukiko TODOROKI (Tomiko Ono).

Synopsis : Dans le quartier des plaisirs de Kyoto, Hatsuko dirige une maison de geishas. Etudiante à Tokyo, sa fille, Yukiko, revient chez sa mère après une tentative de suicide. D’allure et de tempérament moderne, elle rejette le métier de sa mère. Sans le savoir, les deux femmes vont s’éprendre du même homme.

« Mizoguchi déploie tout l’éventail des passions : de la cruauté cérémonieuse des tyrans à la jubilation laconique des artistes, de la fidélité religieuse des mères au sacrifice sans bruit des jeunes filles, du cynisme joyeux des putains à la haine contagieuse des moines. » Jean-Claude Biette, réalisateur français

L'impératrice Yang Kwei-Fei

L’impératrice Yang Kwei-Fei

L’Impératrice Yang Kwei-Fei (1955)

Genre : Mélodrame

Avec : Machiko KYOO (Yang Kwei-fei), Masayuki MORI (L’Empereur Xuan Zong), Sô YAMAMURA (An Lushan), Eitarô SHINDOO (Kao Li-hsi).

Synopsis : Chine, 8e siècle. Inconsolable depuis la mort de l’Impératrice, l’Empereur Huan Tsung délaisse les charges de l’Etat. Assoiffé de pouvoir, le général An Lu-Shan lui présente une cousine éloignée ressemblant à la défunte épouse. D’abord réticent, le souverain finit par s’éprendre de la jeune femme, laissant peu à peu sa famille profiter abusivement de son pouvoir.

« Si la musique est idiome universel, la mise en scène aussi : c’est celui-ci, et non le japonais, qu’il faut apprendre pour comprendre « le Mizoguchi ». Langage commun, mais porté ici à un degré de pureté que notre cinéma occidental n’a jamais connu qu’exceptionnellement. » Jacques Rivette, cinéaste français

Villes participantes et salles de cinéma concernées

A partir du 31 juillet, dans les villes et salles suivantes dans la région parisienne :

  • Paris : Le Champo – Espace Jacques-Tati
  • Paris : Le Louxor
  • Paris : MK2 Bastille
  • Vincennes : Cinéma Le Vincennes
  • Fontenay-sous-Bois : Cinéma Le Kosmos

Dans le reste de la France, dans ces villes et salles :

  • Lyon : Cinémas Lumière
  • Lille : Cinéma Le Majestic Lille
  • Strasbourg : Les Cinémas Star de Strasbourg
  • Nancy : Cinéma Caméo Commanderie
  • Grenoble : Cinéma Le Méliès – Grenoble
  • Bordeaux : Cinéma UTOPIA Bordeaux
  • Toulouse : Cinéma Utopia Borderouge
  • Montpellier : Cinéma Diagonal
  • Bayonne : Cinéma Atalante (à partir du 7 août)
  • Rouen : Omnia République
  • Besançon : Cinéma Victor Hugo
  • Montbéliard : Cinéma Le Colisée



Biographie de Kenji Mizoguchi

Kenji Mizoguchi est né le 16 mai 1898 à Ushima, sous-quartier de Hongo, un des plus vieux arrondissements de Tokyo. Il grandit dans un milieu très pauvre en bordure de la rivière Sumida dans le quartier miséreux d’Asakusa, où se mélangent chiffonniers, théâtres populaires, terrains vagues, petits trafics et prostituées. Il a une sœur de 7 ans son aînée et un frère de 7 ans son puîné. À l’école, c’est un élève très moyen. Sitôt l’école primaire terminée, rêvant d’une carrière de peintre, il entre comme apprenti chez un dessinateur de kimonos d’été. En 1915, suite au décès de sa mère, Mizoguchi et son petit frère sont recueillis par la grande sœur. À l’âge de 19 ans, il quitte Tokyo pour rejoindre le journal de Kobe comme dessinateur d’annonces publicitaires, puis rédacteur de faits divers. En août 1918, alors qu’éclatent un peu partout au Japon les « émeutes du riz », un révolte de miséreux affamés sur lesquels la police n’hésite pas à tirer, Mizoguchi s’engage dans un mouvement d’entraide sociale, ce qui lui vaudra d’être arrêté, battu et emprisonné. À la fin de la Première guerre mondiale, il quitte Kobe sans préavis et repart à Tokyo. Son père, devenu chômeur, a été contraint de vendre sa sœur à une autre famille. Mizoguchi ne trouve pas d’emploi, il mène une vie de vagabond. Il fait alors la rencontre d’un petit acteur qui le met en contact avec un jeune metteur en scène travaillant pour la Nikkatsu. Mizoguchi est ainsi recommandé au studio et, en mai 1921, il est embauché et commence sa carrière dans le monde du cinéma en tant qu’assistant-metteur-en-scène.

Source : Capricci


Cette rétrospective est une occasion rare de (re)découvrir 8 films de Kenji Mizoguchi, l’un des grands maîtres du cinéma japonais des années 1950 à savourer cet été au frais dans les salles obscures. Un grand merci donc à Capricci d’œuvrer pour la culture et le rayonnement du cinéma avec des films de cette qualité et toujours autant d’actualité, avec en plus en bonus une image restaurée en 4K et 2K. C’est maintenant à vous d’en profiter et de soutenir l’initiative !




David Maingot

Responsable Culture à JDJ et passionné de la culture et de l'histoire du Japon, je rédige des articles en lien avec ces thèmes principalement.

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