Mononoké : histoires de fantômes japonais

Avez-vous peur des fantômes ? Les monstres vous inquiètent-ils une fois le soir venu ? Aujourd’hui, Journal du Japon vous invite à tester votre courage en découvrant ou redécouvrant ces contes emplis de fantastique issus du folklore japonais. Entrez dans le cercle, allumez votre bougie, et n’oubliez pas vos sceaux d’exorcisme.

Qu’ils se trouvent au détour d’un chemin de forêt, en pleine rue ou au milieu d’une chambre à coucher, les fantômes et autres esprits japonais rôdent alentour… Le récit glaçant de la mystérieuse femme des neiges, l’histoire d’un valeureux samouraï, le secret bien caché d’une défunte, sans oublier les yokai qui veillent…

Ynnis éditions

Mukashi mukashi, il était une fois….

©Ynnis Editions

Yokaï, revenants, esprits farceurs ou dangereux… Depuis des décennies, le folklore japonais a infusé dans la pop culture et les œuvres contemporaines. Pompoko, Mushishi, Le Pacte des Yokaï ou encore Dandadan ne sont que quelques exemples. Le foisonnement et l’inspiration sont incessants. Mais d’où nous viennent toutes ces créatures ?

C’est sous la forme d’un livre de la taille d’un roman grand format que nous parvient cette sélection de contes issus du répertoire japonais. Une très belle couverture qui rend curieux du contenu et le nom du plus grand collecteur d’histoires de l’archipel : Yakumo KOIZUMI.

Voilà donc une nouvelle occasion de découvrir ces contes japonais axés sur le fantastique voir l’horreur et la première chose qui frappe à la lecture, c’est la narration qui, en fonction des histoires, va droit au but ou au contraire, fourmille de détails plus immersifs et angoissants les uns que les autres. Servis par une bonne traduction, les récits de Koizumi donnent le frisson et plongent les lecteurs dans l’expectative. Certains récits sont profondément tragiques, quand d’autres se terminent sur une pirouette comique. Tous ont une leçon de vie à donner, même si elle reste discrète, incitant à la réflexion.

Ils donnent aussi, de façon indirecte, une vision vivante du Japon d’alors. Même si on ne sait pas toujours précisément à quelles dates se passent ces histoires, elles mettent la lumière sur les mœurs du peuple, mais aussi les rites religieux ou les habitudes des nobles. Le sacré et la vie quotidienne étaient alors étroitement liés et on ne pouvait jamais savoir d’avance quand un événement pouvait croiser la route du surnaturel.

Il faudra cependant se munir d’une grande imagination car le livre est dépourvu d’illustrations intérieures. Rien pour se figurer la forme précise d’un démon ou un paysage : ce qui est dommage car cela ne rend pas forcement justice aux contes, surtout quand d’autres éditeurs ont fait le choix de rehausser les textes grâce à de superbes créations. Le fait d’avoir garder les réflexions plus académiques de Koizumi sur la nature est tout aussi surprenant car cela sort un peu trop de l’ambiance de mystère créée par les histoires.

Ce manque d’imagerie n’empêche cependant pas de lire des histoires remarquables, l’une des plus emblématiques étant sans doute celle du Rokuro-kubi, un redoutable monstre qui décide de s’en prendre à Kwairyô, un prêtre ancien samouraï, afin de le manger. On y retrouve tout, le beau phrasé, mais aussi le danger, les combats épiques et les rebondissements inattendus qui donnent de la consistance aux personnages. C’est le genre d’histoire qu’on aurait envie de voir narrer par un conteur professionnel.

Le collecteur irlandais

Statue de Lafcadio Hearn à Tokyo – Photo de Chris 73 (Britannica) (CC BY-SA 3.0)

Pour parler de ce nouveau recueil d’histoires fantastiques, il faut d’abord rappeler qui les a trouvées et rassemblées : Patrick Lafcadio Hearn.

Né en 1850, il quitte son Irlande natale à 19 ans. À la suite d’une adolescence marquée par un accident qui le privera d’un œil, il s’installe aux États-Unis pour exercer le métier de journaliste. Fasciné par les autres cultures, il fera un long séjour en Martinique pour le compte du Harper’s Monthly qui l’emploie alors. Il recueillera un grand nombre de contes créoles.

Grâce à ses relations avec l’ambassadeur de l’Empire du Japon, il s’installe au Japon en 1890, à Yokohama, où il travaille pour la presse anglophone. Il prendra le nom de Koizumi après avoir épousé Setsuko et prit la nationalité japonaise. Grand voyageur, il se mettra à rassembler les histoires et récits traditionnels qu’il entendra durant ses nombreux déménagements. Il obtiendra une chair à l’université de Tokyo, qu’il occupera jusqu’à sa mort en 1904.

Rencontrer la femme des neiges, croiser d’étranges cortèges qui, si l’on n’y prend pas garde vous entraîneront de l’autre côté, ou simplement apprécier la ruse et l’intelligence qu’il faut pour échapper au surnaturel, voila tout ce qui vous attend dans ce Mononoké. Malgré un rendu quelque peu inégal et le manque d’illustrations, ces récits sont une porte d’entrée parfaite pour découvrir la richesse du conte japonais.

Albine

Née avec un manga dans la main, bibliothécaire et collectionneuse

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