L’épopée japonaise, épisode 1 : L’ère Yamato, prélude à l’Empire du soleil levant
De la constitution de l’état japonais et ses guerres de clans et de religion, jusqu’à l’entrée dans la modernité avec l’ère Meiji, en passant par les guerres féodales et la domination par les classes guerrières, l’histoire du Japon est un enchaînement d’âges et de conflits militaires et idéologiques pour le contrôle du pays et de l’empereur.
Après notre visite de la mythologie japonaise et du Kojiki et à l’occasion du 150e anniversaire de l’ère Meiji, Journal du Japon vous propose de revisiter les différentes époques du Japon à travers une série d’articles, et en commençant avec l’ère Yamato, entre Histoire et Préhistoire.
La période Yamato
Cette période s’étend de 250 à 710 après Jésus-Christ, et est séparée en deux : la période des Kofun, marquée par la construction de grandes tombes du même nom, et l’époque Asuka avec l’introduction de l’écriture et du bouddhisme en 538 ou en 552, selon les sources. Cette dernière est marquée par de nombreuses guerres entre clans, et des déménagements réguliers de la capitale, qui se retrouve toutefois souvent à Asuka.
Des tombes monumentales
L’ère Kofun est donc fortement marquée par la présence de tertres funéraires en forme de trou de serrure. Il peut paraître étonnant de nommer une ère en fonction de ses rites funéraires, mais il faut rappeler que le Japon de l’époque ne maîtrise pas encore l’écriture, les seules sources concernant cette époque sont donc soit chinoises, soit postérieures à cette époque. Ainsi la plus grande source d’information sur les pratiques de cette époque nous provient de fouilles archéologiques.
Ces tombes prennent diverses formes mais la plus répandue est donc celle en trou de serrure, dans laquelle la tombe se trouve dans la partie ronde tandis que le reste de la structure devait servir à rendre hommage aux morts. Le plus grand d’entre eux se trouve à Osaka et est attribué à l’empereur légendaire Nintoku. Le complexe funéraire mesure 725m de long pour 305m de large, et s’étend sur près de 460 000m².
Les haniwa étaient des statues en terre cuite placées autour des tertres funéraires. Leur forme varie énormément, les premiers sont en forme de vase à moitiés enterrés dans le kofun. On trouve également des représentations de l’élite de l’époque, de chevaux, de maisons et de bateaux.
Arrivée du bouddhisme et de l’écriture
La période est également marquée par de nombreux contacts et flux migratoires avec la Chine et la Corée, grâce auxquels le bouddhisme et les caractères chinois sont introduits au Japon et marquent ainsi le début de l’ère Asuka. Le but est alors de s’adapter au modèle chinois afin de rivaliser avec la montée en puissance de la dynastie Tang qui s’apprête à envahir la Corée.
L’arrivée du Bouddhisme se fait par le présent d’une statue de bouddha en bronze doré en 538 ou 552 par le roi du Paekche (un des royaumes de la péninsule coréenne), et la religion est peu à peu adoptée par les élites de l’époque, en même temps que l’écriture chinoise. Ce présent avait pour but de fonder une alliance entre le Paekche et le Japon contre le royaume de Silla, voisin du Paekche, soutenu par la Chine. Cette campagne militaire se révèle être un échec pour le Japon et le Paekche est envahi par le royaume de Silla.
Le bouddhisme met fin aux pratiques des Kofun, la crémation remplaçant la putréfaction des corps, et des temples bouddhistes sont construits pour honorer les morts à la place des tertres monumentaux.
Guerre de religions entre Soga et Mononobe
Bien entendu, l’arrivée du bouddhisme ne fut pas acceptée par tous et fut à l’origine de conflits. Ainsi le clan Soga, pro-bouddhiste, dirigé par Soga no Umako est opposé au clan Mononobe, pro-shinto, dirigé par Mononobe no Moriya. Ces deux clans avaient tous deux une grande importance à l’époque Asuka, mais les Mononobe avaient perdu en influence suite aux défaites en Corée, alors que les Soga s’étaient au contraire rapprochés de la famille impériale et avaient la possibilité de marier leurs filles à des princes impériaux.
Shôtoku Taishi est l’un des princes nés de ces unions, une figure emblématique du bouddhisme au Japon, et l’objet de nombreuses légendes. Il est considéré comme étant le Bouddha du Japon car sa mère aurait été frappé par la grâce des bouddhas lorsqu’elle était enceinte. Il est surtout connu pour avoir développé le bouddhisme et construit différents temples. Il participa également aux conflits contre les Mononobe et était présent lors de la défaite de ces derniers au mont Shigi.
Il aurait par ailleurs gravé une statue des quatre rois célestes protecteurs de la loi bouddhique, statue qu’il aurait alors placé sur son front lors de la poursuite des troupes en déroute des Mononobe. Il construisit par la suite un temple dédié aux quatre rois célestes, le Shitennô-ji, gardé par les statues des deux Nioh et devant montrer la montée en puissance du bouddhisme et l’adoption de ses diverses divinités et cultes.
Suite à ce conflit le pouvoir se centralise autour de trois figures, l’Impératrice Suiko (554 – 593 – 628) première impératrice du Japon, son oncle Soga no Umako et le Prince Shôtoku Taishi devenu régent. Le bouddhisme est nommé religion officielle en 594 et des ambassades sont envoyés en Chine. C’est en 604 que le Japon rédige la constitution en 17 articles, inspiré du modèle Chinois et prends officiellement le nom de Nihon et l’empereur le titre de Tennô, qui signifie souverain céleste et équivaut au titre de l’empereur de Chine.
Des différents noms du Japon
和 日本 大和 にほん
Le Japon n’a pas toujours eu le nom sous lequel nous le connaissons aujourd’hui, dans des époques plus anciennes, il était ainsi nommé le Pays des Wa 和 par les Chinois. Le terme yamato 大和 désigne plusieurs choses, à la fois la région où la cour se situe durant l’époque du même nom, mais également la lignée impériale et les Japonais, ce qui explique pourquoi on retrouve des mots comme washiki 和式 littéralement « style japonais » utilisant le même symbole. Les termes nippon et nihon 日本 (avec les kanjis du soleil et de l’origine) est ensuite utilisé à l’époque Asuka pour s’opposer à la Chine, qui se situe du côté du soleil couchant. C’est bien entendu de là que viens l’expression du « Pays du soleil levant ». Le mot est ensuite intégré en Chine où Marco Polo le retranscris comme zipangu qui est finalement peu à peu déformé pour devenir le mot Japon en France.
L’ascension des Fujiwara
Pour finir, revenons à la période Asuka où le clan Nakatomi, ancien allié des Mononobe et hostile aux réformes et à la présence d’une impératrice se rebelle contre les Soga et font assassiner Soga no Iruka. Ils prennent alors le contrôle de la cour et continuent le travail de centralisation et de codification de la cour initié par leurs prédécesseurs. Ce clan change ensuite de nom, et devient le clan Fujiwara, clan le plus important du Japon jusqu’au XIIème siècle, durant toute l’époque Nara et Heian, au point que de 694 à 710 la capitale porta même le nom de Fujiwara-kyô avant d’être déplacé à Nara.
Le mois prochain, la deuxième partie de notre dossier historique nous plongera dans les ères Nara et Heian, période durant lesquelles les Fujiwara régneront en maître sur le Japon.
4 réponses
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