Mechatro Wego : Plamo et robots mignons
À l’écart des puissants engins de guerres robotiques auxquels le maquettisme japonais nous a habitué, une gamme de robots ronds et inoffensifs fait son bonhomme de chemin depuis maintenant 10 ans. Ce sont les Mechatro Wego, et ils sont au cœur de cet article.
Le Plamo vous dites ?
Maquettisme, Plamodel, Plamo
Avant de parler d’une gamme en particulier, faisons un point sur le maquettisme au Japon et, plus spécifiquement, sur le maquettisme à base plastique.
Abrégé en Plamo ou en Plamodel (Plastic Model), cette activité consiste en la construction de modèles réduits d’objets divers, allant de personnages d’animés jusqu’aux véhicules de la vie de tous les jours, en passant bien sûr par les robots géants. Pour ce faire, on a sous la main un kit (généralement sous forme d’une boîte en carton illustrée) renfermant plusieurs « grappes » composées d’une multitude de pièces liées entre elles et numérotées. À l’aide d’une petite pince à découper (ou de ses doigts pour les plus courageux) on va ensuite détacher certaines pièces pour les assembler entre elles en suivant le manuel fourni dans le kit. D’autres étapes peuvent se rajouter pour les plus perfectionnistes, comme le limage des pièces pour éviter les imperfections, le traditionnel collage de stickers demandant une précision inhumaine, le « panel lining » (le fait de souligner les lignes de structures de la maquette à l’aide d’encre), voire même la peinture de la construction ou la customisation. Cette dernière étape de customisation peut aller très loin et donne régulièrement lieu à des concours entre professionnels de l’art du maquettisme.
Le Plamo se distingue des simples figurines ou des action figures par l’étape de l’assemblage de l’objet qui est bien plus complexe qu’un emboîtage rapide de pièces déjà montées, comme sur les Nendoroide de chez Goodsmile par exemple.
Gunpla et les autres maquettes venant de licences
Plutôt que Plamo, vous connaissez sûrement le mot Gunpla pour décrire le maquettisme plastique. Cependant, utiliser ce mot pour rassembler toute la discipline serait un abus de langage. Gunpla est en effet la contraction de Gundam et de Plastic Model et ne concerne ainsi que les produits édités par Bandai et appartenant à cette licence précise. Mais il serait dur d’en vouloir à quelqu’un pour cette approximation car les kit de Plamo sont grandement composés et vendus grâce aux licences qu’ils représentent. Si la franchise Gundam et ses Gunpla sont les plus connus chez nous, Bandai ne s’arrête pas à cette licence et aux robots géants : la firme produit tout un tas de maquettes tirées de tous les horizons. On peut citer dans les animés populaires One Piece, Dragon Ball, Sailor Moon, ou bien dans le registre du tokusatsu Kamen Rider, Ultraman et les Super Sentai. Plus surprenant, des studios comme Ghibli ont aussi leur gamme de Plamo chez Bandai. Mais arrêtons-nous ici, la firme possède tellement de mastodontes de l’animation, de la série et du jeux-vidéo que citer même les plus importants prendrait une bonne partie de l’article.
Plamo et licences originales
Le Plamo ne s’arrête pas à Bandai. D’autres marques produisent et visent d’autres publics. Des entreprises plus modestes comme Tamiya ou Hasegawa Hobby Kit sont spécialisées dans les maquettes d’engins motorisés (voitures, motos, camions, avions) ou militaires. Plus qu’aux passionnés d’œuvres de fictions, ces deux marques s’adressent aux amateurs de maquettes plus réalistes et souvent à échelle plus large. Dans un autre registre, l’entreprise Kotobukiya explore une autre facette du Plamo : les licences originales. En plus d’exploiter certaines licences déjà connues comme Megaman, Evangelion (aussi exploité chez Bandai), Muv-Luv (Visual Novel disponible en anglais sur Steam) ou Zoids (franchise d’animaux mécaniques obscure chez nous mais populaire au Japon et aux États-Unis), Kotobukiya a créé de lui-même de nouveaux univers pour accueillir de nouveaux kits de Plamo. On peut citer par exemple la gamme Frame Arms, gamme de mecha inspiration militaire des real robot et son univers complexe décrit dans les manuels des kits. Son nom vous semble peut-être familier : Frame Arms a donné naissance à une autre gamme Frame Arms Girls, qui a été adapté en animé en 2017. Plus particulier, Frame Arms Girls est représentatif de la tendance à anthropomorphiser (en jeune fille de préférence) les robots géants…(voir aussi Mobile Suit Girl pour les plus curieux).
Les Mechatro WeGo
Une gamme loin de canons
Loin des robots géants et des engins militaires, une nouvelle marque atypique apparaît en 2011 : Mechatro Wego. Cette dernière est développée par Kazushi KOBAYASHI, modéliste 3D ayant travaillé sur quelques titres obscurs mais surtout, en lien avec ce qui nous intéresse ici, sur la modélisation de mecha en 3D sur D.I.C.E, Reideen, ou plus connu, sur les Evangelion 1.0 et 3.0. Il a également travaillé dans la confection de modèles miniatures sur les films des années 90 de la saga mythique de kaiju Godzilla.
Pour les Mechatro WeGo, Kazushi KOBAYASHI emprunte le pseudonyme de Moderhythm (homonyme de « modélisme » prononcé en japonais). Divers enseignes participent à la distribution des kits de la licence comme Haseagawa Hobby Kit, Sentinel et Toys To Art. Chacune de ces enseignes proposent des gammes différentes, allant du kit pour enfant jusqu’au Plamo contenant des pièces métalliques et comprenant aussi des Mechatro déjà construits en figurine. Les Mechatro Wego sont développés en interne dans la société « Chubu Mechatronics » détenue par Kazuhi KOBAYASHI, entreprise à la fois réelle et fictive.
L’Histoire des robots bipèdes
XXe siècle, univers alternatif. Dans les années 1920, un ingénieur français du nom de Michèle Butor invente une Machine à Marche Automatisée qu’il nomme « Mechatrobot« . Mais à cause de difficultés pour la production à grande échelle des engins, ces machines ne rencontrent malheureusement pas un succès au niveau du public. C’est durant la Seconde Guerre Mondiale que les Mechatrobot réapparaissent. Contrairement au tanks, ces machines peuvent se déplacer plus facilement sur des terrains normalement difficiles d’accès. Effort de guerre oblige, les ingénieurs de l’époque réalisent alors de grands progrès sur la production et l’efficacité des Mechatrobot. C’est dans les années 40 que la rencontre entre l’industrie automobile florissante et celle des Machines à Marche Automatisée donne lieu à un premier boom des Mechatrobot dans le domaine civil. Ce marché a du mal à s’imposer au Japon. Les machines sont alors trop imposantes pour l’architecture urbaine japonaise. Une entreprise, Chubu Mechatronics, va s’efforcer de miniaturiser le système des Mechatrobot, et donnera naissance en 1957 au modèle Chubu n°1.
Mais ce n’est que récemment que l’entreprise innovera encore une fois en commercialisant le Mechatro Wego, Machine à Marche Automatisé encore plus réduite spécialisée dans le transport et l’accompagnement d’enfant. Contrairement à son grand frère, le Chubu n°1 fusion entre robot bipède et scooter, le Mechatro Wego est beaucoup plus souple, inoffensif et mignon. Avec leur ventre tout rond (qui fait aussi office de cockpit pour l’enfant), et leur petits noms (Marshmallow, Chocolate, Akira) ils sont adorables par leur simplicité et par la bienveillance qu’ils dégagent, encore plus quand on le voit marcher avec son allure pataude dans son spot publicitaire.
Des robots en marche
Retour au monde réel. Le Mechatro Wego a fait son petit bonhomme de chemin depuis sa première commercialisation en 2011. Chubu Mechatronics, fort de son succès, ne s’est alors pas limitée à une seule gamme. En plus des modèles de base avec des articulations en métal se sont développés des kits en plastique plus accessibles aux enfants ou aux débutants, ainsi que des modèles de différentes tailles et de couleurs variées (d’où sont issus leur nom dans un premier temps comme Mizuiro, Purple). On peut d’ailleurs remercier grandement Keiichi ARAWI pour les illustrations de couverture des boîtes de chez Hasegawa Hobby Kit, son style kawaii facilement identifiable (il est à l’origine du manga Nichijou, adapté par Kyoto Animation en 2011) rajoute une dose adorable aux machines en les mettant en scène dans des cadres surchargés respirant la vie et la bonne humeur.
Pour éviter la stagnation de la marque, Chubu Mechatronics s’est ensuite dirigé vers des boîtes thématiques. Ainsi on peut retrouver les Mechatro Wego en plein Matsuri, en monture pour des compétitions de sport ou bien au côté d’un train. Tous ces kits apportent de légères modifications sur les modèles de base, que ce soit au niveau du corps du robot (bras différents, allure globale modifiée) ou des couleurs avec des motifs caractéristiques des thématiques.
Mais ça ne s’arrête pas là, les Mechatro Wego ont l’habitude de collaborer avec d’autres univers pour créer de nouveaux styles de robots hybrides. On a pu ainsi voir des Mechatro Nichijou, Hatsune Miku, Mazinger Z ou bien Evangelion. Certains fans vont même jusqu’à créer eux-mêmes leur collaboration de rêves en customisant leur création comme le Mechatro Gundam, Kamen Rider W ou Batman (la page facebook officielle de la marque recense un certain nombre de ces créations si ça vous intéresse).
En dehors de la collection Wego, Moderhythm détient une pléthore de machines bipèdes aux fonctions différentes les unes des autres. On peut par exemple se procurer le Chubu n°1, matrice de tous les Mechatro commercialisé pour la première fois en 2006 (donc avant les Wego), des Mechatro Mate, robots miniatures, ou bien des Mechatro Chunks, plus carrés et robustes. Bref, que de produits pour les Mechatro qui n’ont visiblement pas envie d’arrêter le train en marche avec leur adaptation en court-métrage d’animation en 2019 sous le titre de Hello WeGo ! dans le cadre de l’événement Anime Tamago (anciennement Anime Mirai qui a vu la naissance, entre autre, de Little Witch Academia) puis en manga en juin 2020.
Morino & Ash, détails d’un kit Mechatro Wego
Rentrons maintenant dans les détails par la présentation en particulier d’un kit Mechatro Wego : le Kit n°11 intitulé « Morino & Ash » et commercialisé chez Hasegawa Hobby Kits en janvier 2018 que nous avons eu l’occasion de monter. Cette boîte renferme les pièces pour l’assemblage de 2 modèles. Elle contient le manuel d’assemblage, des pièces uniquement en plastiques rangées sous formes de grappe et des décalcomanies à eau. Le kit propose certaines pièces fines en double en cas de pertes lors du montage et des variantes d’autres pièces pour des nuances esthétiques Vous avez peut-être remarqué sur la boîte, Morino et Ash font partis d’un style particulier : les Mechatro Wego aux attributs félins. Ils ne sont pas les seuls à présenter cette particularité, le kit n°13 Tech & Leaf sont tout aussi chats.
Ce Plamo est plus complexe à monter que les gammes SD Gundam et HG Gundam de Bandai. Les modèles sont en effet assez petits tout en présentant des articulations complexes. Certaines pièces comme les yeux ou les phares (situés à l’avant des épaules du robots) sont en effet difficile à incruster de par leur (toute) petite taille. Lors du montage des oreilles d’un des modèles, une des pièces s’est brisée lors de son introduction. Le pauvre petit Ash (le chat gris, noir et bleu) se retrouve donc avec plus qu’une seule oreille…Mais la partie la plus complexe fût celle des décalcomanies à l’eau. Elles sont très difficiles à gérer pour les personnes non-habituées et se déchirent facilement lors de l’application sur le modèle (encore une fois sur ce pauvre Ash). D’autant plus que les endroits à cibler sont très étroits (intérieur des oreilles voire même des coussinets), et même sur les zones plus larges, l’autocollant s’est retrouvé avec des plis. Les modèles finaux sont cependant très bons, d’une taille raisonnable sans être grands non plus, ils sont bien articulés et très stables avec la possibilité d’ouvrir le cockpit par la bouche ou le ventre. Les modèles des passagers sont même fournis avec le kit, on peut les placer à l’intérieur sur le guidon du robot. Bien qu’il soit tout à fait satisfaisant et mignon, ce kit n’est pas à recommander à des débutants dans le maquettisme, malgré le caractère enfantin de l’illustration et la mention « Easy Assembling » il vaut mieux aborder les Mechatro Wego avec plus de bagages dans le Plamo. Pour les intéressés, penchez-vous plutôt sur les SD Gundam qui sont bien plus abordables pour les vrais débutants, et seulement ensuite, après avoir assemblé plusieurs maquettes, vous pourrez vous attaquer sereinement à cette très sympathique licence.
Le Plamo est une discipline vaste où chacun peut trouver son compte. Certains achètent des modèles car sont des fans d’une licence, d’autres préfèrent la customisation et la personnalisation des modèles ou simplement la satisfaction de monter soi-même sa figurine. Le maquettisme reste en France une activité très nichée et les quelques boutiques spécialisées mettent fréquemment la clef sous la porte, faute de public. La popularité de cet hobby au Japon amène une énorme diversité de modèles et de gammes dans laquelle vous trouverez sûrement votre bonheur.
Les Mechatro Wego sont de très bons représentants de la variété du maquettisme. Le caractère « Japon mignon bigarré » qui s’en dégage est à l’opposé de la froideur métallique et symbolique des engins militaires ou des normes stylistiques imposées par des licences de robots comme Gundam dont seul l’évocation du nom peut faire fuir une part non négligeable de la communauté nipponophile. Les parisiens et alentours ont même la chance d’avoir depuis peu le Bandai Hobby Store, boutique entièrement dédiée à l’offre de maquette de Bandai qui, même si elle ne représente pas l’étendu du monde du Plamo, propose déjà beaucoup de produits parmi lesquels vous trouverez pour sûr votre kit rêvé.