À la découverte de la Japan Weekend à Strasbourg

Les 1er et 2 avril 2023, à l’occasion de la Japan Weekend, la capitale alsacienne s’est vêtue en rouge et blanc. Non non, ce n’est pas un poisson d’avril. Grâce à la mobilisation des bénévoles, des exposants, des invités et des organisateurs, les nombreux visiteurs ont répondu à l’appel. Pour donner un aspect plus collectif, pas moins de 1 500 coureurs ont transpiré lors de la course ekiden du dimanche. Tout au long du week-end, le Japon traditionnel était largement présent à travers la musique, les arts martiaux ou encore la danse. Pour cette nouvelle édition, Journal du Japon a bravé le froid strasbourgeois et a rencontré les acteurs qui cherchent à valoriser le pays du Soleil Levant.

A quoi ressemble cette seconde édition ? Quelle place les organisateurs ont accordé à la culture japonaise ? Bref, c’était comment la Japan Weekend ? La réponse dans cet article.

Zoom général sur la Japan Weekend

©Leo Thomas pour Journal du Japon

Le festival reste très jeune puisqu’il a vu le jour en 2021. L’ACSE (Association des Courses de Strasbourg Europe), qui en est à l’origine , a allié le sport et la culture japonaise pour produire un événement de qualité. L’ACSE a organisé le festival avec le CEEJA ( Centre Européen d’Etudes Japonaises d’Alsace) sans oublier le soutien Collectivité Européenne d’Alsace. Comme l’an dernier, les organisateurs ont décidé de poser leurs stands en extérieur au niveau de la Presqu’île Malraux à Strasbourg. Le cœur principal du festival était avant tout la septième édition de l’ekiden, un marathon couru en relais par plusieurs personnes. Claude Schneider, organisateur de la Japan Weekend et habitué à organiser ce genre de marathon, disposait d’un réseau non négligeable de clubs d’arts martiaux en Alsace et a voulu donner une autre dimension à l’ekiden en l’englobant dans un festival dédié au Japon et à ses traditions. L’ACSE a pu compter également sur le Consul Général du Japon et la ville de Strasbourg pour réunir un maximum de personnes

La Japan Weekend en 2023, c’était :

  • Environ 1500 coureurs pour le marathon ekiden
  • 150 bénévoles
  • Et plus de 30 exposants

Les stands sur place étaient variés avec des intervenants proposant des produits traditionnels et activités comme la calligraphie, le furoshiki ou encore le Mah-jong. Bien sûr, on pouvait y trouver quelques points de restauration pour les amateurs de la cuisine nippone et des boutiques axées sur les mangas.

La Japan Weekend, c’est aussi une programmation d’animations très centrée autour des arts martiaux, de la musique et de la danse. Le groupe Kichigai Taïko (cf : article Anim’Est 2022 : retour sur la 20ème édition avec une interview du trio) ont ouvert le bal avec le taïko. On a également eu droit à des échanges en visio-conférence entre le club de karaté de Strasbourg et un dojo de Kagoshima pour y faire des démonstrations. Et tout au long du week-end, des démonstrations d’une multitude d’arts martiaux se sont succédé. Enfin, les curieux des environs ont été attirés par le concert de shamisen joué par Hideaki TSUJI à la médiathèque André Malraux.

©Leo Thomas pour Journal du Japon

Les organisateurs ont aussi ciblé les fans de Mario Kart en y plaçant des compétitions. En collaborant avec l’UGC Ciné Cité du coin, les visiteurs ont eu la chance de visionner en avant-première le film d’animation SUZUME, réalisé par Makoto SHINKAI et sorti le 12 avril 2023.

Nasutakahishô : rencontre avec des passionnés du yosakoi

Parmi les animations proposées lors du festival, la danse était à l’honneur grâce à la troupe Nasutakahishô spécialisée dans le yosakoi. Les sept membres sont venus pour faire découvrir cette danse néo-folklorique née dans les années 1950 au Japon. Nasutakahishô est née en 2019 : « de l’amour, de la danse, du partage et du Japon » explique Lucie, la présidente du groupe. Ils ont partagé leur passion les deux jours pendant trente minutes le matin et l’après-midi. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils ont eu du succès avec de nombreux visiteurs captivés par des danseurs qui respirent la joie et l’esprit du collectif.

©Leo Thomas pour Journal du Japon

La troupe met un point d’honneur à ce que leurs chorégraphies racontent une histoire. Par exemple, l’une d’elles s’inspire de l’activité des pêcheurs de Sapporo sur l’île d’Hokkaido. Lucie et Oly, deux des sept danseurs présents ont accepté de nous parler du yosakoi et de leurs projets :

Journal du Japon : Merci à tous les deux d’avoir accepté de répondre à nos questions. Afin qu’on en sache un peu plus sur vous, pouvez-vous vous présenter ?

Lucie : Bonjour, je m’appelle Lucie et je suis danseuse dans le groupe Nasutakahishô et j’en suis la présidente.

Oly : Bonjour, je m’appelle Oly et je suis danseur et également membre de l’association.

Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste le yosakoi ?

Lucie : Le yosakoi est une danse néo-folklorique japonaise qui est née dans les années 1950 après la guerre. L’objectif de la ville de Kôchi était de redynamiser les espaces de vie et d’inviter la population à investir les rues, à consommer, et à danser.

Depuis quand le pratiquez-vous et qu’est-ce qui vous plaît dans cette danse ?

Lucie : Je pratique le yosakoi depuis 2015. Je ne suis pas vraiment de Strasbourg initialement, j’ai vécu à Nantes et c’est dans cette ville que s’est produit un groupe originaire de Niigata. Ils ont pratiqué au château des ducs de Bretagne et c’est à ce moment-là que des étudiants japonais sont restés en échanges et c’est comme ça qu’est née la troupe de yosakoi à Nantes. Depuis que je suis à Strasbourg, j’ai continué à danser.

Oly : J’ai découvert la troupe l’année dernière à la Japan Addict Z en 2022 et je l’ai rejoint en septembre de cette même année. Ce qui me plaît, c’est cet esprit d’entraide et de soutien ainsi que l’amusement sur scène.

Quelles difficultés peut-on rencontrer lorsqu’on pratique le yosakoi ?

Lucie : Absolument aucune ! Le yosakoi est sportif mais ce côté « cardio » s’adapte au fil des séances et l’idée est de partager les répétitions pour absolument s’adapter à tout le monde et à tout type de danseurs. Il n’y a pas besoin d’avoir un niveau de danse pour pratiquer le yosakoi.

Vis-à-vis de la Fédération Yosakoi de France, qu’est-ce qu’elle vous apporte moralement et financièrement ?

Lucie : On est très peu à danser le yosakoi en France, il n’y a aucun professeur en la matière donc le fait de se retrouver en groupe permet de mutualiser les compétences de chacun. Avoir une fédération permet de monter des projets que l’on ne pourrait pas réaliser à une seule troupe. Cette année, une équipe va partir à Kôchi pour le festival originel de la discipline en août 2023 pour présenter la première chorégraphie française créée pour le festival qui est une création de A à Z.

Pouvez-vous nous parler des vêtements que vous portez ainsi que l’objet que vous teniez dans vos mains lors de la chorégraphie ?

Lucie : Concernant notre costume, on a choisi le happi, c’est une veste de coton courte qui est portée lors des matsuri d’été au Japon. Sur ce happi, vous pouvez voir les éléments constitutifs du nom de la troupe. Il y a notamment le Mont Fuji, un faucon et une petite aubergine qui est cachée dans les vagues du vêtement. Ces trois éléments font référence à la croyance du hatsuyume, le premier rêve de l’année. La croyance dit que si le 1er janvier, vous rêvez du Mont Fuji, d’un faucon et d’une aubergine, vous aurez de la chance toute l’année.

Et dans nos mains, on a une petite percussion qui s’appelle le naruko qui une planche de bois sur laquelle sont fixés trois clapets de chaque côté qui permettent de claquer les mouvements et d’accompagner la musique.

Quel message souhaitez-vous envoyer à travers vos chorégraphies ?

Lucie : Le yosakoi est une véritable discipline composée d’équipes qui préparent des chorégraphies toute l’année pour les présenter dans des festivals et des compétitions. Ces chorégraphies sont protégées par des droits d’auteurs et on a pas le droit de danser ailleurs que dans les équipes en question. Au-delà de ces chorégraphies, les préfectures japonaises en proposent certaines pour être dansées en public qui sont libres de droit. Dans notre troupe Nasutakahishô, on peut puiser dans ce répertoire pour les présenter lors de nos spectacles, et notamment ce Japan Weekend.

Quels conseils donneriez-vous à ceux qui voudraient se lancer dans le yosakoi ?

Oly : Le meilleur conseil, c’est de venir avec le sourire et de ne pas avoir peur de se froisser un muscle. Il faut vouloir s’amuser et passer un bon moment.

Pour terminer cet échange, quels sont vos projets à venir ?

Lucie : Nous avons eu la chance d’être invités au festival l’Air de Lire à Barr (Alsace) le jeudi 25 mai 2023 où nous aurons la chance de danser sur la place de la mairie de Barr qui y consacrera une journée « Japon ». Nous préparons aussi la Japan Addict Z où nous pourrons profiter de la scène du Zénith. Et enfin le dernier projet de cet été pour le moment, c’est la troupe de Paris qui nous invite à participer à la Japan Expo Paris. Nous y serons les 4 jours de la convention parisienne.

©Leo Thomas pour Journal du Japon

Un immense merci à Lucie, Oly et à la troupe de Nasutakahishô. Si vous aimez le yosakoi, vous pouvez suivre leurs aventures sur Instagram .

Un festival qui a satisfait Monsieur UCHIDA, Consul Général du Japon

Hiroyuki UCHIDA, Consul Général du Japon ©Consulat Général du Japon Strasbourg

Le Consulat du Japon à Strasbourg est très attaché à la manière dont la culture japonaise est mise en avant dans la région Grand-Est. Monsieur Hiroyuki UCHIDA, qui est devenu consul récemment a passé beaucoup de temps au festival et a rencontré les intervenants. L’institution a attribué son Haut Patronage qui consiste à apporter son soutien à titre purement moral à toute entité qui souhaite le demander.

D’ailleurs, le festival s’est montré à la hauteur des enjeux puisque Monsieur UCHIDA a été « très surpris de voir les alsaciens s’amuser » et qu’il était « très heureux de s’y être rendu ». Pour lui, il est « important » que les rendez-vous comme la Japan Weekend valorisent la culture japonaise. A noter aussi que sera célébré cette année les 160 ans des échanges entre le Japon et l’Alsace. Pour plus d’informations sur les événements, nous vous recommandons de consulter le site du consulat .

Interview Bilan avec Claude Schneider

La fin de la journée et de la deuxième édition approchant, c’était l’occasion de faire un point avec l’organisateur de la Japan Weekend, Claude Schneider.

©Leo Thomas pour Journal du Japon

Journal du Japon : Bonjour à vous et merci pour votre temps. Pour entamer la conversation, pouvez-vous nous en dire plus sur vous ?

Claude Schneider : Je suis organisateur de l’événement et j’ai découvert le Japon il y a bien longtemps même si je n’y suis jamais allé. Au-delà de ça, je connais le Japon par rapport au monde universitaire où j’ai eu beaucoup de contacts. Je suis très lié à la maison France-Japon. Dans mes fonctions passées, j’ai participé à pas mal de choses.

Comment vous est venue l’idée de créer la Japan Weekend ?

On avait organisé un marathon avec de l’ekiden mais on a dû arrêter par rapport aux législations en Allemagne qui sont différentes. On s’est ramassé mais on a maintenu l’ekiden. En 2018, on a eu la chance d’avoir le Haut Patronage du Consul Général de Strasbourg et comme toujours, on rajoute des petites choses en rapport avec la culture japonaise. En 2021, j’ai proposé au Consul de créer un week-end « Japon » en mettant l’ekiden dedans.

Comme il y a beaucoup de clubs d’arts martiaux à Strasbourg, je les ai contactés et convaincus en leur offrant une tribune grâce à la Japan Weekend. Lors de la première édition, nous n’avions pas ajouté la musique mais cette année, on l’a fait grâce à Nasutakahisho. On a fédéré sur le site de la presqu’Ile Malraux avec le shamisen à la médiathèque, l’avant-première du film Suzume à l’UGC et aussi la compétition Mario Kart sur le grand écran de la salle de cinéma. La compétition a quand même eu une centaine d’inscrits : ce n’est pas rien ! C’est une démarche éthique qui s’associe avec une démarche culturelle, sportive et gastronomique.

En quoi consiste l’ekiden ?

L’ekiden est tout simplement le marathon en relais qui fait 42,195 kilomètres. C’est le relais qui se passait entre Kyoto et Tokyo. C’est une épreuve officielle qui se fait à 6 avec différents kilométrages. Des compétitions existent au niveau mondial. Mais au-delà de ça, c’est de faire des épreuves en équipe. Nous, on a créé des épreuves à 4 et en duo pour simplifier les choses car c’est compliqué de créer une équipe de 6. Il y a eu 1 500 participants dont 172 équipes de 6 et 70 équipes de 4 personnes. C’est avant tout un événement centré sur le collectif avec l’envie de se faire plaisir.

Êtes-vous satisfait de l’organisation de la Japan Weekend ?

L’an dernier, nous avions de la neige et nous avions beaucoup de monde et cette année, il y a eu un nombre de visiteurs conséquent. Ce qui me satisfait, c’est d’une part d’arriver à lier les activités sportives et culturelles puis de donner une logique plus noble. D’autre part, ce sont les équipes qui sont sont mobilisées et la dernière chose, c’est ma satisfaction d’avoir fédéré. Quand on fait ensemble, on gagne.

Qu’est-ce qui vous différencie des conventions de pop culture ?

Ce qui nous distingue c’est que la Japan Weekend est un événement purement japonais en comparaison avec la Japan Addict Z qui se base sur plusieurs cultures. On est dans une logique plus traditionnelle. La grosse différence est que nous organisons le festival en plein air, ça se fait avec une animation très ouverte et il y a de la place.

Comment choisissez-vous les invités ?

Pour les arts martiaux, c’est assez simple puisqu’il s’agit de clubs strasbourgeois et pour le groupe Nasutakahisho c’est eux qui nous ont contacté pour y participer. Pour le taïko, l’invitation s’est faite au niveau du consulat.

Pour finir, quel message vouliez-vous transmettre à travers la Japan Weekend ?

Le message que je veux donner c’est que la culture japonaise est capable de donner une dimension de bien-être en utilisant tous les outils à notre disposition.

La Japan Weekend est différente des conventions que j’ai pu faire. Au-delà de l’aspect traditionnel, Claude Schneider et les artisans du festival ont su valoriser certains trésors de la culture japonaise et les Alsaciens y ont été sensibles. La cerise sur le gâteau était avant tout l’ekiden qui a donné un sens à la valeur du collectif. Je remercie chaleureusement les danseurs de Nasutakahisho qui ont donné du sourire en partageant leur passion pour le yosakoï. Merci aux organisateurs et rendez-vous l’année prochaine !

Quelques photos…

©Leo Thomas pour Journal du Japon
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©Leo Thomas pour Journal du Japon
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Leo Thomas

Passionné de la culture japonaise depuis plusieurs années, je fais transpirer cette passion via des articles sur des domaines variés (conventions, traditions, littérature, histoire, témoignages, tourisme).

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