Dragon Quest III HD2D Remake : un petit cadeau en attendant DQXII ?
Alors que le regard de tous les fans de la série sont tournés vers un Dragon Quest XII en développement, SquareEnix nous fait patienter avec un remake « 2D HD » du troisième opus de la série, sorti originellement sur Famicom en 1988. Journal du Japon vous propose de participer à la Quête du Dragon en nous suivant pour un test de cette nouvelle version du jeu. Mais qu’est-ce que c’est, un « remake 2D en HD », pour commencer ?
Jeu disponible sur PS5, Xbox Series X/S, Switch et PC (Steam).
La quête du Dragon d’un autre millénaire
Dragon Quest III est originellement sorti en 1988 sur Famicom, la NES japonaise. Il a été développé par Chunsoft, la société créatrice de la série avant d’être prise sous l’aile d’Enix. On retrouve derrière le jeu des noms indissociables de la licence tels que Yuji Horii (son créateur), Akira Toriyama (character-designer inoubliable) et Koichi Nakamura (producteur jusqu’au cinquième jeu inclus). D’autres, comme le programmer de génie Kan Naito (futur employé de la société légendaire Climax Entertainment (créatrice de Shining Force, Landstalker), ont rejoint le navire pour la production de ce RPG majeur de la fin des années 1980. On n’oubliera pas, bien entendu, feu Koichi Sugiyama déjà responsable de la bande-son des deux premiers épisodes et qui continuera jusqu’au 11e opus.
Le troisième volet de la série eut un succès retentissant à sa sortie : un million d’exemplaires se sont écoulés en une seule journée pour atteindre les 3 millions lors de sa première semaine de vente, en faisant le best-seller vidéoludique en 1988 en Japon. Le jeu eut par la suite un portage remake sur Super Nintendo et GameBoy Color, ajoutant environ 600 000 copies supplémentaires vendues pour chacun des deux supports. Dragon Quest III devient l’épisode le plus prolifique et l’un des RPG les plus vendus de tous les temps au Japon… le héros du jeu, quand à lui, reviendra dans un spin-off sur mobile exclusif à l’archipel et s’ajoute même à la liste de personnages de Super Smash Bros Ultimate en DLC !
DraQue III est définitivement une pierre angulaire de la série… mais que vaut le remake HD2D qui nous intéresse aujourd’hui ?
Ça commence comme une simple quête initiatique, et puis…
DraQue III met le joueur dans la peau d’Elric. Ce héros est le fils d’Ortega, guerrier qui avait pour mission de détruire l’Archidémon qui menace le monde. Mais Ortega semble avoir échoué dans sa mission et a disparu, et c’est désormais à son descendant, son tout jeune enfant, de prendre la relève et d’aller accomplir la destinée échouée par son père. Elric et sa mère continuent à croire qu’Ortega est toujours en vie, quelque part…
Le joueur aura la possibilité de changer le nom du personnage tel qu’il le souhaite ainsi que son sexe et son apparence (ce qui n’est pas juste cosmétique) et va devoir aller recruter une équipe pour l’aider. Si ceux-ci ne vous conviennent pas, par leur vocation plus particulièrement, il sera toujours possible d’en créer de nouveaux presque de toute pièce : nom, classe, apparence et plus encore. Ensuite, il faudra partir à l’aventure, à commencer par un entraînement basique afin de bien démarrer en termes d’expérience et de monnaie.
Suite à cela, notre équipe de quatre valeureux Héros devront parcourir le monde et traverser diverses épreuves, telles que la récupération de clés magiques qui ouvrent des portes scellés ou éliminer un groupe de bandits voleurs qui n’hésitent pas à prendre quelqu’un en otage. En allant de villes en villes et donjons, on en apprendra plus sur le monde et notre quête véritable, ainsi que sur les complications qui l’accompagnent. Bien sûr, on ne va pas en dévoiler de trop afin de conserver les surprises, mais votre périple vous en réservera plus d’une.
Un gamesystem à l’ancienne mais toujours efficace
On ne va pas vous faire l’affront de vous expliquer ce qu’est un RPG ; le plus intéressant est de toute façon le système de combat du jeu.
On est là dans du combat au tour par tour, dans lesquels gentils et méchants s’affrontent à tour de rôle les uns après les autres, leur initiative dans chaque tour dépendant de leur dextérité, qui dépend elle-même de leur métier. Quand c’est au tour du joueur, celui-ci peut choisir entre plusieurs actions. De base, le jeu est programmé pour tourner en « automatique » : dans ce cas, les personnages agiront tous selon un ordre qui leur aura été donné au préalable. Ces ordres définissent le style d’actions des personnages : attaquer comme un barbare, rester sur la défensive, conserver des points de magie (PM), etc.
Dans ce cas, il n’y a vraiment rien d’autre à faire que d’attendre et regarder. C’est à peu près pratique quand on doit faire du farming intense, et encore… on ne choisit pas vraiment les actions que l’on souhaite faire précisément, au contraire de, par exemple, Phantasy Star IV (SEGA, 1993) et son système de Macro permettant de faire agir les personnages dans le même ordre et avec la même action autant de fois qu’on le souhaite. Non, ici, « automatique » est automatique et c’est tout, seule la brutalité ou la prudence des personnages est à définir. L’intérêt ludique est donc moins présent, mais on ne retirera cependant pas l’aide que cela peut procurer pour savoir quelles attaques font plus mal à quels ennemis.
On préfèrera donc sans doute le mode manuel, qu’il faut également définir dans les commandes comme « Obéir aux ordres ». Là, on aura le choix entre attaquer normalement, utiliser une compétence (tous les types de Classes ne le peuvent pas), une magie (même chose que précédemment), utiliser un objet ou se mettre en défense – les magies et compétences utilisent toutes des PM. Tous les personnages auront une Classe différente (Guerrier, Mage, Artiste martial, etc.), qui ont leurs points forts et faibles et il faudra donc penser à jongler en laissant un allié au comptoir des guildes et en prendre un autre si besoin.
Cela peut s’avérer être une opération un peu pénible de prime abord, car un nouvel allié commence au niveau 1 et devra également être équipé de meilleurs armes et autres. Cependant, au bout d’un temps, les mêmes héros pourront changer de Classe tout en conservant les capacités de leur ancien métier, ce qui permet de diversifier et renforcer son équipe comme des brutes : qui n’a jamais voulu que son Mage tout chétif et fragile devienne d’un coup un Guerrier robuste et sanguinaire tout en étant capable de lancer des sortilèges mortels ?
S’ajoutera à cela un équipement varié pour chaque personnage, comme des armes touchant une ou plusieurs cibles, des capacités qui prennent les devants en agissant avant tout le monde, des soins, des sorts d’altération d’états, des capacités élémentaires plus ou moins efficaces en fonction des ennemis… que du classique, mais du classique efficace.
Pas de pitié pour les gluants
Une fois que l’on aura pris ses repères dans le jeu, il faudra bien évidemment compter avec les combats aléatoires. Si ceux-ci ne sont pas forcément très fréquents, ils proposent un challenge qu’il ne faut pas négliger. Rares seront les combats qui opposent un seul ennemi au groupe de héros et ceux-ci sont découpés en groupes, chaque monstre du même type étant dans le même groupe donc. Cela a son importance, car il faut ainsi choisir quel groupe d’ennemis prendre pour cible. Chaque groupe, oui, mais il est impossible de sélectionner les ennemis un par un ! Il faut donc faire attention à qui attaque qui, sachant que nos héros s’en prendront à qui ils voudront dans le même groupe, et pourront donc gâcher une grosse compétence pour achever une créature qui aurait pu être éliminée par votre Héros qui, lui, possédait une attaque simple touchant tout un groupe…
Cela oblige donc à calculer ses attaques précautionneusement pour tenter d’éviter le plus de pertes de temps, d’énergie et de PM. Surtout que les ennemis, eux, ne se priveront pas de vous infliger des altérations d’état (paralysie, ralentissement, etc.) et même d’attaquer deux fois dans le même tour – l’injustice totale, oui. Il est donc conseillé d’y aller doucement, quitte à faire des pauses entraînement régulières, et selon le temps que vous souhaitez mettre dans le jeu, voire à renforcer vos héros à coups de multi-classes…
Un remake de fort belle facture
On est ici dans ce qui est appelé une version « HD2D ». La caméra reste donc fixe, comme à l’époque, sans rotations mais suit le personnages lors de sa progression. Ces personnages et ennemis sont taillés dans de fins pixels, comme à l’époque mais en version plus détaillée et lisse. Les décors aussi, bien qu’ils soient fins, ne sont pas en full 3D. Tout a été retaillé et retravaillé et pas juste lissé artificiellement pour paraître propre et pas grossier sur nos écrans actuels.
De ce coté, Dragon Quest III HD2D charme assez vite, avec ses graphismes 2D lisses et ses jolies villes colorées et attrayantes. On aime les visiter, sans trop se prendre la tête grâce aux indicateurs qui montrent tout de suite où se trouve telle ou telle boutique. Mais ce qui frappe le plus, c’est la carte du monde, lors de l’exploration. Là, on se croirait quasiment dans une peinture en reliefs du plus bel effet qui ne cesse de flatter les yeux, au travers de ses bosses et pentes suivis par la caméra. Les donjons et tours sont bourrés de détails qui rendent le tout encore plus vivant : visuellement, c’est un vrai plaisir. On apprécie aussi le sens du détail : le temps passe au fil des combats. Jour et nuit se succèdent en plusieurs étapes, les monstres que l’on affronte sont différents en fonction de la période, et en ville, seuls l’église (pour sauvegarder) et l’auberge restent ouvertes, ce qui permet parfois quelques petites fantaisies… aurez-vous l’audace de vous introduire dans la boutique locale et y voler quelque chose pendant que personne n’y est ?
La mélodie accompagnant les villes est également différent, plus paisible lors de la nuit. Le coté sonore tout entier, d’ailleurs, est très réussi : on reconnait parfaitement les mélodies du jeu d’origine, retaillées dans un style plus orchestral et grandiose à la fois. Le thème principal de la série, qui ouvre le jeu, donne des frissons, tout comme celui de la world map, plus sérieux et guerrier et qu’on aimera entendre en boucle pendant notre exploration. On ne regrettera pas non plus d’avoir non seulement des voix japonaises mais aussi anglaises lors de discussions majeures. Là encore, on se plait et on se laisse vite porter par ce qui se trouve sur notre écran.
DQIII HD2D est un jeu bourré de modernisations, et pas seulement au niveau visuel et sonore comme nous venons de le voir. Il est très généreux en options pour le confort de jeu : outre trois modes de difficulté, on peut bien évidemment choisir entre plusieurs langues (textes) ainsi que japonais ou anglais pour les voix ; la vitesse de défilement des textes, tout comme la celle des combats, est réglable ; les sauvegardes rapides (pour quitter le jeu en cas de besoin) ainsi que les sauvegardes automatiques sont présentes, on peut se téléporter dans des lieux visités au moins une fois avec des objets très peu chers ou des sortilèges ; les dialogues passés sont gardés en mémoire pour les relire en cas de besoin, notre prochain objectif est affiché dans le menu et on a la possibilité de suivre des curseurs nous indiquant notre prochaine destination à tout instant. Ce remake fait absolument tout pour être plaisant, attractif et engageant… enfin, c’est ce que l’on croit au début.
La Quête draconienne
En effet, le jeu n’a pas perdu sa difficulté pour autant. Difficulté abusive, si l’on peut même dire. Les nouvelles armes et équipements coutent deux bras, et pas seulement ceux du héros mais ceux de toute l’équipe à chaque fois, demandant des dizaines et des dizaines de combats pour pouvoir se payer de nouvelles armes, à tel point qu’au final on s’équipe seulement après avoir traversé un donjon, ou bien en se faisant violence pour ne s’upgrader qu’à la ville suivante. Chaque niveau demande un grand nombre de combats à gagner après un moment, demandant des heures de leveling en permanence pour progresser. Ces mêmes combats s’avèrent assez vite très difficiles, à coup d’ennemis qui attaquent deux fois par tour ou jettent des altérations d’état à tout va. Le mode facile, vous dites ? Oui, il fait bien partie des trois modes de difficulté du jeu… mais il est relativement inutile.
C’est un constat que l’on ressent assez vite : Facile ou Normal, on ne sent quasiment aucune différence et si le jeu a décidé que l’on est trop faible d’un seul coup, hé bien, c’est comme ça et pas autrement. Là où d’autres RPG même à l’époque, même difficiles tels les Phantasy Star étaient plus coulants, là où c’était « peut-être » drôle de passer des heures à se battre pour se battre, on en aura, de nos jours, assez vite assez d’enchaîner les combats difficiles. C’est une façon de faire, bien sûr, et tout le monde devrait en avoir pour son argent en fonction de la difficulté choisie, mais ce n’est finalement que très peu le cas et le scénario se voit finalement bien trop distillé malgré son intérêt et la curiosité qu’il procure, surtout au travers de certains lieux assez surprenants. C’est vraiment dommage, car le jeu donne envie d’y jouer… bien sûr, il reste toujours la solution du combat automatique, mais là encore, quel est l’intérêt, au final ? Le mode Facile est explicitement destiné à « ceux qui veulent suivre le scénario », donc à la rigueur, pourquoi pas ? Mais l’équilibrage reste assez bancal, malheureusement.
Bon, on râle, on râle, mais il ne faut pas bouder notre plaisir pour autant. Pour ceux qui aiment le challenge, ceux que le farming massif ne dérange pas, ceux qui veulent une aventure sur la longueur et aiment les RPG qui prennent des dizaines d’heures à finir, DQIII est parfait, et son emballage graphique et sonore ne fera que les ravir encore plus. Surtout que ce remake ne se contente pas de tout ce que l’on a déjà cité, non non. On y retrouve tout une armée de nouveautés par rapport au jeu d’origine, comme de nouveaux sorts et techniques, la balance dans les caractéristiques (force, défense, etc.) a été modifiée ; de nouveaux personnages et pans d’histoire ainsi qu’un nouveau métier pour les personnage ont été ajoutés… SquareEnix ne s’est donc vraiment pas contenté de juste faire un simple remaster technique ; on regrettera, juste encore une fois, que les modes de difficulté soient si foireux !
Dragon Quest III HD2D Remake, malgré cela, fait honneur au jeu de 1988 sans problème. C’est un travail issu d’une réflexion soignée, qui s’il ne va vraisemblablement pas totalement au bout de sa volonté de le faire (re)découvrir à tous, transpire d’un charme indéniable et attachant. On aime visiter les décors et les donjons, on aime se laisser porter par la bande-son aussi : jeune guerrier, il va juste falloir s’armer d’un peu de courage pour venir à bout de tous les combats imposés, mais très clairement, ce n’est pas une aventure que l’on regrettera d’avoir vécue !