Retour sur l’île du désespoir avec Danganronpa 2×2
Licence culte dans le visual novel horrifique, la série Danganronpa s’est imposée parmi les grands jeux d’enquête japonais comme Phoenix Wright ou Zero Escape. Huit ans après la sortie de Danganronpa V3: Killing Harmony, les studios Spike Chunsoft, Tookyo Games et Gemsdrop revisitent le deuxième opus de la licence avec Danganronpa 2×2, un remake au scénario inédit, avec de nouveaux meurtres et coupables. Retour sur les quinze ans de la licence.
L’ouverture occidentale au frisson narratif
En France, l’année 2014 marque l’émergence d’une nouvelle culture vidéoludique en ligne nourrie par les let’s play et creepypasta apportant une attention particulière aux jeux indépendants et à l’horrifique. Ce n’est pas pour rien que des jeux comme Undertale (2015), Fran Bow (2015) ou encore la démo de Yandere Simulator (2014) émergent dans ces années. C’est dans ce contexte que la licence Danganronpa se popularise auprès d’un public friand d’originalité, marquant le genre du visual novel.
Le premier jeu, Danganronpa Trigger Happy Havoc, sort sur PSP en novembre 2010 au Japon avant d’arriver en France en 2014. Produit par le studio Spike Chunsoft (Chunsoft ayant fusionné avec Spike en 2012), notamment réputé pour la licence des Zero Escape ainsi que pour son travail dans le développement des jeux Pokémon Donjon Mystère, Danganronpa devient rapidement son succès majeur.

La recette ? Une classe de lycéen·nes avec chacun·e un talent ultime, une mascotte noire et blanche, un huis clos, une tuerie et des procès de classe pour démasquer le meurtrier. Mélange entre satire sociale et thriller psychologique, Danganronpa dépeint les désirs humains avec une brutale ironie, jouant sur la curiosité de ses joueur·ses.
Une formule efficace
Fort de son succès, la licence se développe assez rapidement dans tous les genres confondus. Sur le plan vidéoludique, on retrouve en 2012 sur PSP Danganronpa 2: Goodbye Despair avec un schéma narratif similaire se déroulant cette fois-ci non pas dans un lycée, mais sur l’île de Jabberwock, une île aux allures paradisiaques coupée du monde. Cet opus explore plus particulièrement la psychologie et le désespoir collectif.

En 2015, en Europe, sort le premier jeu vidéo spin-off de la série : Danganronpa Another Episode: Ultra Despair Girl. Ce nouveau jeu surprend le public par son gameplay bien éloigné du visual novel : un jeu de tir à la troisième personne, inscrivant la série dans le genre de l’action-aventure et non plus seulement comme jeu narratif.
Spike Chunsoft réitère la recette initiale de la franchise en 2017 avec Danganronpa V3: Killing Harmony. Retour à l’école pour une nouvelle tuerie et un scénario centré sur le mensonge et, par opposition, la notion de vérité. Véritable succès commercial et critique, Danganronpa V3: Killing Harmony devient rapidement le jeu de la série avec le meilleur démarrage de vente.


L’année 2021 marque les 10 ans de la franchise et avec elle, son lot d’événements commémoratifs. Tout d’abord, la sortie du spin-off Danganronpa S: Ultimate Summer Camp, compilation et extension de deux minis-jeux présents dans les trois opus de la série principale. Danganronpa Trigger Happy Havoc, Danganronpa 2: Goodbye Despair et Danganronpa V3: Killing Harmony s’offrent une édition exclusive avec un portage sur Android et iOS puis sur Nintendo Switch, comprenant en plus une galerie d’images et de doublages.
Par la même occasion, une compilation de ces quatre jeux, intitulée Danganronpa Decadence, paraît sur Nintendo Switch afin de célébrer ce nouveau support, proposant également une édition collector inédite – la PS4 ayant eu droit à Danganronpa Trilogy en 2019. Manque de chance pour le public francophone, ces belles éditions n’ont pas officiellement été traduites, restant toutefois accessibles en version anglaise.

En parallèle des sorties vidéoludiques, la licence s’enrichit sous bon nombre de formats. Adaptée dès 2013 en anime avec Danganronpa: The Animation, reprenant le scénario du premier jeu de la série, la franchise ne tarde pas à se décliner en mangas, romans, light novels, nouvelles, ou encore pièces de théâtre. Ce ne sont pas les histoires dérivées qui manquent à la série, venant compléter son univers et approfondir les personnages des jeux vidéo.
La création de Tookyo Games
Après la parution de Danganronpa V3: Killing Harmony, une partie de l’équipe de Spike Chunsoft décide de fonder son propre studio : Tookyo Games. À cette initiative, nous retrouvons Kazutaka Kodaka (le créateur et scénariste de Danganronpa), Masafumi Takada (compositeur principal des musiques de la licence), l’illustrateur et character designer historique Rui Komatsuzaki et le scénariste Kotaro Uchikoshi, notamment populaire pour les jeux vidéo Zero Escape. La volonté derrière cette séparation : créer un espace de création original repensé avec leurs propres jeux indépendants.
Rapidement, le nouveau studio propose des jeux proches de l’esprit de Danganronpa, autant dans le scénario que dans l’ambiance graphique. Un parfait exemple émerge récemment avec The Hundred Line: Last Defense Academy, paru en avril 2025 sur Nintendo Switch et PC. Dans ce jeu, on incarne un lycéen enfermé dans une école (une impression de déjà vu, non ?), mais qui, cette fois-ci, a pour objectif de protéger cette dernière face à une invasion pendant cent jours. Un nombre pas totalement anodin, puisque la particularité de titre à mi-chemin entre le visual novel et le Tactical RPG réside dans ses cent fins différentes possibles et propose aux joueur·ses de suivre cette histoire au jour le jour, au même rythme que les personnages de l’intrigue. Une immersion sur la durée dans la survie de ces personnages plus originaux les uns que les autres.

Cette volonté d’expérimentation ne signe pas pour autant une rupture complète avec l’héritage de Danganronpa. En 2023, Tookyo Games s’associe avec Spike Chunsoft pour produire Master Detective Archives: RAIN CODE, un jeu d’enquête mêlant surnaturel et une ambiance sombre, bien plus sombre que Danganronpa dont vous pouvez retrouver les détails sur notre article associé.
Danganronpa 2×2 : quand le désespoir renaît
Annoncée à la surprise générale lors du Nintendo Direct du 12 septembre 2025, la licence Danganronpa refait surface avec un remake de Danganronpa 2: Goodbye Despair, intitulé Danganronpa 2×2 (prononcé « Danganronpa 2 by 2 »). On retrouve aux commandes les studios Spike Chunsoft, Tookyo games ainsi que Gemdrops, plutôt axé sur la partie développement.
Ce tout nouvel opus propose un remake graphique et, en complément, un scénario supplémentaire et unique avec de nouveaux coupables et retournements de situation. Le producteur Shohei Sakakibara a pris la parole lors d’une interview pour le magazine japonais Famitsu, affirmant que ce nouveau scénario sera d’aussi bonne qualité que le scénario original.
Concernant la distribution du jeu, ce dernier sera disponible en 2026 sur Nintendo Switch 1 et 2, PlayStation 5, Xbox Series X|S et sur Steam, une démo étant à prévoir avant la parution. Le jeu sera disponible en anglais et japonais avec le casting original de retour pour le doublage japonais intégralement refait. Malheureusement, pas de traduction française officielle à l’horizon pour ce remake, mais l’équipe Mirai, qui s’est déjà occupée de traduire les précédents opus de la série, a annoncé qu’elle essaierait de prendre en charge celle francophone en fonction de l’accessibilité aux fichiers du jeu.
En revisitant Danganronpa 2: Goodbye Despair, Danganronpa 2×2 ne se contente pas d’un simple remake, mais continue d’explorer les limites de la fiction, du mensonge et du désespoir à travers des personnages familiers. Une signature narrative propre à la licence Danganronpa et au travail de Kazutaka Kodaka pour brouiller les frontières de la réalité. En attendant, le désespoir demeure, tout comme l’envie de s’y replonger.

