[Interview] Mes amis les popumomos, une douceur enfantine à la portée de tous

De nombreux albums jeunesse sortent en France chaque mois pour le plaisir des plus petits, mais des plus grands aussi. Les livres japonais ne font pas exception à cette règle, et Journal du Japon s’est intéressé de près à l’un d’entre eux, sorti récemment : Mes amis les popumomos,  premier ouvrage de Mato, artiste très prometteuse et qu’il faudra surveiller dans les années à venir ! Voici notre entretien, tout en simplicité, avec cette jeune artiste au coup de crayon aussi kawaii que naturel : laissez-vous emporter par un vent de fraîcheur ! 

popumomos

Journal du Japon : Bonjour Mato, pourriez-vous vous présenter pour ceux qui ne vous connaissent pas encore ?

Mato - Photo © Journal du Japon

Mato – Photo © Journal du Japon

Mato : Depuis toute petite, j’ai toujours adoré le dessin. J’aimais bien dessiner, et ça remonte vraiment jusqu’où je peux m’en souvenir : j’ai toujours aimé les mangas et les livres d’images en même temps. Un jour j’ai voulu être mangaka, j’ai donc continué à dessiner dans ce sens, et quand je cherchais un moyen de passer professionnelle, j’ai rencontré les éditions Glénat. La discussion s’est installée entre nous et nous en sommes venus à travailler sur Popumomos en France.

Comme vous vous tournez vers la littérature jeunesse : on dit qu’en France la littérature jeunesse est considérée comme un sous-genre de la littérature, qu’en est-il au Japon ? Est-ce le même retour ?

Au Japon, on peut dire qu’il n’y a pas de véritable « mauvaise image » de la littérature jeunesse, il y a même eu une grande mode récemment de livres d’images auprès des adultes. Évidemment ce n’est pas considéré comme de la très grande littérature, car il n’y aura pas de véritable « hit », si on peut le dire comme ça, mais les gens ont une idée, un concept des livres jeunesse : ce qui est bon, aussi bien pour les enfants que les adultes, ne peut qu’être bon. En somme, tant que ça plait au plus grand nombre, il n’y a aucun problème.

Vous venez de nous le dire, c’est votre premier ouvrage publié en France, mais avez-vous aussi participé à la création du petit coffret dans lequel se présentent les trois petits livres des Popumomos ?

À la base j’ai créé les Popumomos pour les présenter dans un événement où tout le monde peut venir proposer soit-même ses ouvrages. Une sorte de grande vitrine où des professionnels viennent y repérer des titres intéressants ou même des choses originales. À ce moment-là, j’avais en fait deux choix qui s’offraient à moi : soit je continuais moi-même à faire des choses qui m’intéressaient et me plaisaient énormément, soit je m’adaptais au schéma professionnel japonais. C’est quand je me posais cette question que Glénat m’a contactée. Et parmi toutes mes productions, ils ont décidé de publier Mes amis les popumomos. Comme j’ai toujours rêvé de voir un jour mes livres publiés et présents en librairie, j’ai accepté. En terme de fabrication, j’ai laissé faire mon éditeur en toute confiance et toutes les propositions que j’ai reçues de sa part m’ont toujours très agréablement surprise et enthousiasmée. Dès qu’une proposition était faite, c’était le cas, donc je pense avoir eu raison de leur faire confiance.

Mato - Photo © Journal du Japon

Mato – Photo © Journal du Japon

Au niveau du format c’est donc Glénat qui l’a décidé ?

En fait, à l’origine, on était dans un format assez semblable. Pour tout vous avouer, si j’étais dans ce petit format à l’italienne c’est parce que je créé mes ouvrages moi-même chez moi : je les imprime sur ma propre imprimante et à ce moment-là je trouvais que quand je les pliais à la française, ça faisait un peu étrange. Du coup je me suis tournée vers le format à l’italienne qui correspond très bien à mon œuvre. C’est à la fois un peu la facilité – par rapport à ce que je peux faire chez moi – et ce qui correspond à mon travail. Quand Glénat a repris cet ouvrage, il a donc gardé le même format.

Ce n’était donc pas juste pour que les plus petits puissent le manipuler plus facilement ?

J’avoue qu’en fait je n’avais pas trop pensé aux tous petits : c’est juste que j’aime de base les petits objets, ce qui est facile à manipuler. Pareil pour le format à l’italienne qui est un réel coup de cœur pour moi. Quand Glénat m’a proposé de faire une « box », je me suis dit qu’ils avaient sûrement une bonne idée derrière la tête, donc j’ai laissé faire. Au final, moi, quand on me dit le mot « box », je pense immédiatement à une simple boîte dans laquelle on insère les livres : une boite carrée en gros. Alors quand j’ai vu arrivé cette boîte, j’ai trouvé ça vraiment très ludique, il y a un côté « cadeau » avec ce petit fil qui permet de fermer la boîte. Oui, ça m’a fait l’impression d’un cadeau qu’on ouvre, et j’ai donc été agréablement surprise. J’ai été tout de suite séduite par le concept.

On va se positionner un peu plus sur l’histoire à présent. D’où vous est venue l’idée de créer ces petits monstres qui sont mignons : les popumomos ? Un souvenir de jeunesse ? Une inspiration extérieure comme un film/série d’animation ?

Évidemment je pense qu’il y a un mélange de diverses influences que j’ai eu au cours de ma vie mais à la base j’adore les créatures fantastiques, les animaux un peu étranges et j’ai toujours voulu être proche, « ami », avec ces êtres-là. Ce n’était pas forcément volontaire de ma part, mais j’avais envie d’une histoire où un héros se lie d’amitié, pas forcément qu’avec des humains, mais qu’il soit capable de lier des amitiés avec toutes sortes de créatures.

En parlant justement de ce petit garçon qui se lie avec tous ces personnages, à chaque fois il met une sorte de combinaison « en forme d’ours ». Vous êtes-vous inspirée d’un enfant de votre entourage ? L’ours revient souvent dans les histoires en provenance du Japon, pourquoi l’utilisez-vous ? Y a-t-il une signification derrière ?

Alors, il n’y a pas vraiment de source d’inspiration tiré d’un enfant pour ce petit garçon. Par rapport au design, c’est juste le design d’un petit garçon que j’ai pu trouver le plus simplement possible, sans trop réfléchir, c’est venu naturellement. Justement je n’ai pas voulu trop affiner, ou trop retravailler le personnage. Pour moi il fallait qu’il me vienne tout seul et le personnage est donc venu de lui-même.

Ensuite, ce n’est pas vraiment en ours qu’il est déguisé, mais juste en petit popumomo : car même si le message est qu’il peut devenir ami avec des êtres qui ne sont pas comme lui, il reste un peu timide. Alors pour pouvoir devenir ami avec eux, il a besoin de leur ressembler un peu, de se fondre dans la peau de ses amis. D’où son habit.

Mato - Photo © Journal du Japon

Mato – Photo © Journal du Japon

Si on reste un peu dans l’histoire de ce petit garçon, on a un peu l’impression de voir le personnage de Mei, dans Mon Voisin Totoro à travers ses aventures : le passage magique et secret au fond du jardin, les popumomos, le fait qu’il ne puisse jamais rapporter quoi que ce soit, et surtout que tout se passe en pleine nature… Est-ce voulu ? Est-ce une manière de montrer l’imagination du petit garçon qu’on voit ou est-ce un autre message particulier ?

Je connais bien sûr Totoro mais je n’ai absolument pas réfléchi et pensé à ça en commençant cette histoire. Pour moi, la forêt est l’image d’un endroit justement où on ne sait pas où on va, où on ne voit pas très loin : c’est vraiment l’exploration, l’aventure, la découverte de l’inconnu. Et ce petit garçon, le héros finalement, comme en forêt il n’y a pas vraiment de chemin, il voit juste son propre chemin face à lui. Il suit son instinct au final, il est entre l’imaginaire et le reste, ce n’est donc pas quelque chose de tracé.

C’est donc une façon pour lui de vaincre sa peur pour aller au-delà des dangers, pour rencontrer ses amis  ?

Oui, mais ce n’est pas vraiment affronter ses dangers : plutôt ce qui est inconnu, car on a tous peur de l’inconnu. Donc c’est une manière d’affronter un peu sa peur, et de se mesurer à ce qu’on ne connait pas encore. On voit d’ailleurs que sur le chemin du retour, il n’a pas peur et rentre le plus facilement du monde alors qu’à l’aller il se demande s’il va croiser des monstres et s’angoisse.

En parlant justement du livre en tant que tel, un peu plus sur le contenu, on voit que le choix des couleurs est très simple : du noir et blanc avec une seule touche de couleur par volume : le rouge pour les fruits, le jaune pour les étoiles et le bleu pour le personnage étranger. Pourquoi ce choix ? Et pourquoi ces couleurs primaires plus que d’autres couleurs ?

À l’origine j’avais réalisé un ouvrage en noir et blanc, et la proposition de pouvoir ajouter des couleurs est venue de Glénat. Je me suis dit que c’était une idée géniale, et que ça rendrait l’ouvrage encore plus beau donc j’ai accepté le concept. Au niveau du choix des couleurs, c’est moi qui ai déterminé les couleurs à utiliser, mais je n’avais pas donné de nuances bien précises pour autant. Pour le premier tome, sur le thème des fruits, c’était évident que ce serait du rouge. Pour les deux autres j’avais bien dit que je voulais du jaune, plutôt du bleu, mais sans vraiment déterminer exactement quelle couleur, quelle nuance, car suivant les pays, je me suis dit que les enfants pouvaient être habitués à telle ou telle couleur donc j’ai demandé au graphiste français de prendre une nuance qui pour lui semblait la plus adaptée à l’ouvrage. Et voilà où on en est arrivé. Pour savoir ensuite là où il a été décidé d’appliquer la couleur, ce fut une concertation entre moi et le graphiste pour voir quels seraient les meilleurs endroits dans l’image où coloriser ou non.

© Journal du Japon

Mato – photo © Journal du Japon

C’est un peu comme si vous aviez retravaillé vos trois petites histoires avec ce graphiste alors ?

En fait, quand j’ai créé le premier ouvrage que j’ai présenté au Japon, c’était entièrement en noir et blanc. Par contre, j’ai effectivement refait des dessins pour la version de Glénat. À ce moment-là, comme je savais qu’il y aurait des couleurs, j’avais déjà l’information en tête au moment de redessiner. Donc c’était plus simple.

Je vais revenir sur les thèmes car les couleurs permettent aussi de les aborder au sein des trois petites histoires : la peur du noir, le rapport à la différence, l’amitié, le partage, pour ne citer qu’eux… Est-ce des thèmes chers pour vous pour les aborder avec des enfants ?

C’est vrai que quand je créé, je ne pense pas à mon histoire en décidant de faire ressortir ce thème-là plus qu’un autre mais quelque part, ces choses que l’on cite, ce sont toutes des valeurs qui ne changent pas, quelle que soit l’époque malgré les changements de mode. Donc ce qui ressort dans mon œuvre, c’est que je veux vraiment faire partager ces valeurs universelles aux gens : que ce soit aux enfants ou aux adultes.

Par curiosité, d’où vient le nom de popumomo, « momo » veut dire « pêche » mais « popu » ? Est-ce qu’il y a un lien ?

En fait, les popumomos sont les fruits qu’on retrouve dans le premier tome de ce petit coffret, donc les momo sont effectivement des pêches. Sur ces fruits, je voulais donner justement une impression de fraîcheur, un parfum agréable comme la pêche et le « popu » vient plutôt du côté d’un son doux, assez mignon et gentil, très calme. Finalement l’ensemble : le « popumomo » c’est ça qui donne un peu l’ambiance de l’histoire, l’ambiance des fruits et du monde où se passe l’histoire, des créatures qui l’habitent.

Y aura-t-il d’autres aventures de ces petits popumomo ?

Oui j’ai évidemment quelques histoires en tête encore.

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Y aurait-il aussi d’autres histoires avec d’autres créatures par exemple ?

J’ai énormément d’histoires en tête, je grouille d’idées, mais quelque part je place en mes personnages ce que j’aimerais faire, mais que je n’ose pas forcément faire. J’ai envie d’être super bavarde, bon parleur, de m’extérioriser un peu plus, et j’ai envie de partir à l’aventure. Donc le fait de créer ces histoires, ces personnages, me permet de vivre toutes ces envies. Alors oui, j’ai d’autres histoires en tête.

Pour finir un peu sur le sujet, avez-vous pu rencontrer votre public, et avez-vous eu des retours d’enfants sur ces trois histoires ?

Malheureusement je n’ai pas encore pu rencontrer mon public, ni n’ai eu de retour d’enfants, mais j’ai pu voir sur internet des retours de personnes qui avaient apprécié mes histoires. Et cela même d’adultes qui le conseillaient pour des enfants. Je me suis donc dit que je pouvais intéresser un public d’enfants et peut-être aussi d’adultes qui pouvaient lire ce genre d’album.

Et je profite d’ailleurs de cette interview pour dire que s’il y a des personnes qui veulent me donner leur avis, je serais ravie de les entendre.

En tout cas sachez que Journal du Japon a apprécié, et s’y est retrouvé : de par le dessin vraiment mignon et abordable, ainsi qu’aux thèmes universels en effet. Connaissant des enfants dans nos entourages, on peut leur conseiller sans aucun souci.

Eh bien, pour l’instant justement, je n’ai eu que des échos d’adultes essentiellement, donc je serais curieuse d’avoir l’avis d’enfant, donc n’hésitez pas à leur offrir ce livre !

On n’y manquera pas, merci !

Retrouvez, sur le site notre partenaire lire le Japon, un article parlant de ce coffret : Mes amis les Popumomos de Mato : beaucoup de tendresse pour bien grandir !  Suivez également les travaux de Mato sur son compte Twitter.

Remerciements à Mato pour son temps et aux éditions Glénat pour avoir organisé cette interview. 

Charlène Hugonin

Rédactrice à Journal du Japon depuis quelques années, je suis un peu une touche-à-tout niveau mangas, anime et culture. Mais j'ai une jolie préférence pour tout ce qui a trait à la gastronomie japonaise, et ce qui tourne autour et même le sport ! Peut-être pourrons-nous même en parler ensemble ?

3 réponses

  1. Sophie Monget dit :

    On adore les popumomo , magnifiques et poétique

  1. 12 septembre 2017

    […] du Japon vous avait fait découvrir les Popumomos (voir l’interview de leur créatrice, Mato), adorables créatures tout en rondeur que l’on peut rencontrer en traversant un passage […]

  2. 19 janvier 2018

    […] pouvez feuilleter les premières pages en cliquant ici ou découvrir une interview de l’auteure dans le Journal du Japon […]

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