Best-of J-Music 2013 : la crème de la crème

La France est depuis plusieurs années la terre promise de la J-Music. Entre grands artistes, légendes vivantes, groupes underground, has been, et même « never been », nous avons la réputation d’accueillir à bras ouverts tout ce qui ressemble de près ou de loin à de la musique japonaise. Pourtant, aucune année n’aura été aussi riche que 2013. De là à dire que le géant nippon a eu peur du petit coréen, il n’y a qu’un pas (que nous ne franchirons pas), mais le résultat est là : le public français s’est léché les babines.

Bilan 2013 J-music

Devant tant de diversité, difficile de choisir LA manifestation J-Music de l’année, celle qui a sans conteste devancé toutes les autres. L’équipe de Journal du Japon a donc décidé de se mobiliser pour vous offrir son propre panel d’événements marquants. Une optique personnelle, mais qui se veut le reflet de l’hétérogénéité de 2013.

2013, année de la découverte

L’aficionado de culture japonaise a tendance à croire qu’aimer le Japon, c’est adhérer à une sorte de package « manga/anime/jeux vidéos/J-music ». Un quatuor immuable, auquel s’ajoute évidemment le côté « historico-culturel » du pays … mais pas trop non plus. Bref, une bonne idée reçue qui, lors de la rédaction de cet article, s’est avérée totalement fausse : certains de nos rédacteurs sont certes pointus dans leur domaine, mais n’écoutent au final que peu de musique japonaise. Leurs découvertes sont d’autant plus intéressantes qu’elles apportent un regard neuf sur la trivialité du marché J-Music en France.

Jean-Baptiste : N’étant pas vraiment féru de J-music, ce que j’en connais vient surtout des génériques d’animes. The Pillows, Rin Toshite Shigure, autant de noms qui ont apporté leur touche à des séries de qualité. Mais récemment, je me suis épris d’un instrument : le Tsugaru Shamisen. D’abord au contact de Kao=S, lors de leur venue à Japan Expo en France en juillet, puis de Keisho Ohno, lors de son récent concert au « Petit Moulin », cet instrument aux sonorités si particulières a su charmer le néophyte que je suis.

Ces deux artistes ont su marier à leur façon et rendre au mieux toute l’énergie que peut dégager un shamisen au sein d’un ensemble musical moderne. Tantôt tout en douceur et d’une grande sérénité, ce luth à trois cordes peut aussi se déchaîner. Keisho Ohno sera d’ailleurs présent pour la 17e édition de Paris Manga, pour démontrer une nouvelle fois sa maîtrise et son talent. Si l’artiste mériterait une vraie salle plutôt qu’un grand hall à l’acoustique affreuse, le spectacle en vaut néanmoins le détour.

 


Marion « Hana » Aujeu : Ma découverte J-Music de l’année s’est faite au détour de mes pérégrinations sur Youtube. Par hasard, je tombe sur Now or Never de Nano (ナノ), morceau qui s’avère être l’opening de la deuxième saison de Kami no Puzzle. Une voix dont on ne sait dire aux premiers abords s’il s’agit d’une femme ou d’un homme … c’est un peu des deux en fait. Mais cela reste une voix avec un timbre qui pète, et aussi à l’aise en anglais qu’en japonais. Après quelques recherches, c’est bien une demoiselle, dont on a récemment entendu parler car étant à l’origine de l’opening de Btooom!, No pain, no game sorti l’année dernière. Elle est connue au Japon en tant que chanteuse de Vocaloid sur Nico Nico Douga. Avec deux albums sortis à ce jour (nanoir en 2012 et N en 2013), nano fait son petit bonhomme de chemin avec des chansons pop/rock, qu’elle compose, écrit et chante, et que l’on écoute sans se lasser.

 


Julien B. : Contrairement à mes confères je n’y connais pas grand chose en J-Music, voire en musique tout court. C’est donc par pur hasard que je suis tombé sur ma découverte J-Music de l’année, Aki Akane, quelques mois seulement avant son passage à Japan Expo.

Comme toujours, ce qui m’a accroché c’est d’entendre quelque chose d’inhabituel. Pour ça, son surnom de « Screaming Cinderella » n’est pas usurpé. Exit les voix retenues, calibrées, pour un rendu propre, harmonieux et… plat. Aki Akane lâche sa voix à son gré, change de ton, de hauteur… et crie souvent. Mais sans pour autant vociférer de façon agressive. Et cette énergie, cette « sincérité », fait du bien.

Côté musique, on se situe dans un registre essentiellement rock. Mais comme dans ses illustrations (car oui, la demoiselle est aussi versée dans l’illustration, ainsi que l’animation), elle ne se prive pas d’expérimenter quelques fantaisies, incorporant des instruments traditionnels, usant d’effets électroniques, mélangeant les styles. Ce qui offre des morceaux assez variés, avec souvent un bon gros grain de folie typiquement japonais. Cette jeune fille cultive un véritable univers artistique … et une sacrée personnalité.

 


Sandra Després : Si comme moi, vous vous êtes rendus au Tokyo Crazy Kawaii Festival, vous n’avez pas pu passer à côté des Bijo♂menZ ! Le groupe, fondé en 2010 par le défunt comique Sakurazuka Yakkun, aurait pu faire du visual kei classique. Mais le célèbre Yakkun en aura décidé autrement : travestis jusqu’au bout de leurs baguettes de magical « girls », ces hommes du troisième type ne se prennent certainement pas au sérieux et en live, nous entraînent dans des chorégraphies endiablées, chantant sur des rythmes très accrocheurs, notamment des reprises de génériques d’animes comme Dragon Ball Z. Avec leur musique déjantée, leur énergie et leurs sourires charmeurs, les Bijo♂menZ n’ont pas d’autre prétention que de vous emmener dans leur monde de joie et de magie.

Malgré la mort de Yakkun, le groupe, actuellement composé de Natsuki, Tôru ch et Iori, est encore en activité et nous réserve de nombreuses surprises !

2013, année de la confirmation

Pour ceux qui en doutaient encore, 2013 a été un cru exceptionnel. De part sa diversité, mais également son contenu prestigieux, les fans de la première heure ne savaient plus où donner de la tête. Les amateurs éclairés de J-Music de l’équipe se sont donc penchés sur la question, et on choisi pour vous les meilleurs moments de cette année.

Paul Ozouf : Les férus de j-music attendaient ça depuis… toujours. Un festival de J-Music et un vrai parterre de stars. Je vous parle bien-sûr du Tokyo Crazy Kawaii Paris (cf notre compte-rendu du TCKP  et les photos des différents concerts.) qui a réuni pendant trois jours Anna Tsuchiya, Moumoon, Spyair, Shonen Knife et quelques autres. Pendant ce weekend version longue, il était possible d’en prendre pleins les yeux et les oreilles en multipliant les rencontres avec des artistes qu’on n’espérait ne jamais voir ou revoir. En fosse presse, entre amateurs, on ne boudait vraiment pas notre plaisir.

TCKPPhotos Paul Ozouf ©journaldujapon

En plus de satisfaire les fans avec des prestations des plus réussies et une scène plutôt bien gérée, ce weekend de concert a également fait découvrir la J-music à quelques néophytes, traînés pour l’occasion par quelques amis ou venant en simples curieux. Si les concerts sold-out d’ Asian Kung Fu Generation et One Ok Rock ont prouvé que les fanbases sont bien vivantes, le TCKP a démontré que le gouvernement japonais a ENFIN trouvé un intérêt tangible à exporter leur culture, suffisamment en tout cas pour sortir le chéquier. Pour peu qu’ils se montrent patients et à l’écoute de leurs collaborateurs français, on tient peut-être là le début de quelque chose de puissant. En tout cas, vivement la prochaine édition !


Thomas Hajdukowicz : Bien que la musique japonaise ne soit pas vraiment de mon domaine d’expertise, c’est vraiment en amateur que j’ai profité des quelques concerts auxquels j’ai pu assister. Cette année, je retiens trois événements.
Tout d’abord, le concert de Perfume au Bataclan. Alors, oui, il y avait du playback et pleins de wotas. Mais il y avait aussi les chorégraphies, le video mapping, l’interaction avec le public, Nocchi qui sourit… Donc globalement, ça reste un bon moment.
Ensuite, il y a le DJ set de HIFANA à la Maison de la Culture du Japon à Paris. Invités à l’occasion de la Fête de la Musique, le duo de trifouilleurs sonores a une fois de plus offert un set fou (et trop court : une heure), déconstruisant son breakbeat nippon et flirtant parfois avec le dubstep. Le public, un peu timide au départ, s’est rapidement laisser prendre au jeu. Beaucoup de sueur et quelques courbatures, donc un excellent moment de musique.

Enfin, cette année 2013 a été l’occasion d’assister à la naissance d’un nouveau festival, le Festival West Side. Avec une programmation plutôt orientée pop-rock/folk/électro (la sacro-sainte tétrarchie musicale), cette première édition laissait également la part belle aux artistes japonais. C’était l’occasion de voir et d’écouter Nisennenmondai, The 5.6.7.8’s, Shigeto ou Kumisolo dans le cadre intime et chouette de la côte vendéenne. Une édition 2014 est d’ores et déjà prévue (les 6, 7 et 8 juin prochains) et mon petit doigt me dit qu’on devrait y ré-entendre quelques morceaux de Japon…


Allan Viger : Sur la scène du Mistral Palace, dans l’hyper centre de la capitale drômoise, Valence Angeles, Bitch ! (Valence City, plus couramment), les soirs de concerts prennent des allures de London Calling ! Ici, petits amateurs d’indé, les cocaïnomanes du punk-rock agressive ont tout vu ! Tout, jusqu’aux groupes les plus cinglés et dératés de la scène underground locale, régionale, nationale ET internationale ! Mais alors que le Mistral et ses fidèles adeptes pensaient avoir complété leur tableau de chasse punk rock alternatif, c’était, BOUM, le 30 novembre dernier, sans compter sur trois kamikazes déjantés tout droit venus du pays du soleil levant : le trio tokyoïte, Who the Bitch! . Mené par deux filles survoltées et rafraîchissantes, soutenues par un batteur furax, WTB est un composé de performances flashy, pétillantes et excentriques (japonaises jusqu’à la moelle) qui explose à vos organes auditifs telle une bombe de 15 Giga Watt de sons punk, alternatif et garage, intitulés par leur soin : le « junk rock »! Autrement dit : « déguste salement, mange-moi sans faim ». Genre inconnu, paroles incompréhensibles (si tu ne maîtrises pas) mais musique fraîche pour le mordu de son à la recherche constante d’une note tribale, WTB rappelle une règle immuable et universelle du rock : crier dans un micro ne supporte pas la médiocrité !

Who the Bitch!–Photo © Adrien Mathon–


Tatiana « Tanja » Chedebois : Pour ma part, deux concerts ont marqué de façon notable mon année 20013 de J-Music. D’une part, j’ai été conquise par le concert de mes loups préférés : MAN WITH A MISSION en début d’année à La Machine. Le groupe, bien que caché sous des masques, a su nous faire partager leurs émotions et leur énergie pour ce second passage à Paris. La foule était au diapason, les loups ont mis le feu et j’espère qu’ils reviendront par chez nous malgré leurs carrières japonaise et américaine !
Autre grand moment musical : le concert de Dir en Grey à La Cigale. On est loin des débuts, vêtus de plumes et simili cuir : le groupe se veut maintenant mature et enragé, leur musique prenant le pas sur leurs costumes d’antan, le tout mené d’une main de maître par un Kyo complètement habité par le rock lourd et envoûtant du groupe. Cette date était l’occasion de promouvoir leur dernier EP, THE UNRAVELING, qui remet au goût du jour certains de leurs anciens titres comme MACABRE.
Que 2014 soit tout aussi relevée que 2013 !

 


Aurélie Renault : Nouvelle dans l’équipe, j’ai eu l’occasion d’assister à de nombreux concerts. Entre Japan Expo, les festivals, et autres événements, la liste commence à ressembler celle que les enfants adressent au Père Noël.
Cependant, deux concerts se démarquent des autres, lorsque je reviens sur cette demi-année : LOKA au Covent Garden et CROSSFAITH  au Trabendo.
Malgré une différence de popularité, d’expérience, de public et de salles, les deux groupes ont apporté cette même énergie, cette même foi en leur musique et en leur potentialité. De plus, la générosité musicale et la sympathie dont ils font preuve sur scène se vérifie en coulisse. De vrais artistes.
L’un comme l’autre ont su montrer que l’industrie du métal Japonais ne se limitait pas au Visual Kei, ni tout simplement à une industrie, finalement … Ce n’est pas de la production pour de la production, mais un plaisir, une rencontre humaine, celle d’un groupe et de son public, qui veulent l’un l’autre s’apporter ce qu’ils ont pour se porter vers le haut.
C’est donc avec une grande hâte que j’attends leur retour et, constatant l’enthousiasme que ces deux groupes ont provoqué lors de leurs prestations, je pense que je ne suis pas la seule !

 


Laure Ghilarducci : Franchement, qui aurait pu rêver mieux que cette année ? Il y a tellement à dire … j’ai tellement à dire ! J’aurais pu vous parler de la venue de VAMPS, mon groupe fétiche. J’aurais pu vous parler d’ Asian Kung-Fu Generation, ces messies que l’on n’attendait plus, et qui ont étonné tout le monde en cassant leur prix sans donner pour autant un show au rabais. J’aurais pu vous parler, dans un tout autre registre, du magistral concert symphonique des 25 ans de Zelda, qui aura ému petits et grands, votre servante en première ligne.

Mais dans tout cet amas de stars, j’ai choisi d’écrire quelques lignes sur ONE OK ROCK. Voyez-vous, je commence à faire partie de la génération « vieux de la vieille », autant en J-Music qu’en musique tout court. Et parfois, il y a des groupes qui réveillent mes vieux os, me rappellent ma jeunesse dorée dans les pogos. ONE OK ROCK sont de ceux-là. Lassée par des concerts J-Music à l’attitude robotique, statique, où le headbang n’est pas de mise, je suis arrivée dans la salle les points tous faits. Et là, stupeur : je vois des mecs, beaucoup de mecs, du cuir, des fringues noires, du emo old-school … et pleins de trentenaires ! Un bon présage : j’ai rapidement quitté le balcon pour la fosse, histoire de réveiller mes cervicales. Bien m’en fut ! De mémoire, je n’avais tout simplement jamais vu un concert de J-Music si … normal. Ça suintait le rock n’ roll par tous les pores de la salle, Taka et ses acolytes ayant tout donné, et plus encore, à ces fans qui ne croyaient toujours pas à la venue de cette arlésienne qu’était OOR.

Une performance plus que parfaite, une setlist calibrée pour le succès, pour un show qui restera peut-être dans l’histoire de la J-Music française : avec OOR, j’ai enfin senti que la musique japonaise pouvait dépasser ce carcan japonisant si difficile à briser, qu’un autre public, une autre sphère est à portée de main, et qu’il suffirait de quelques efforts (et une meilleure promo) pour que l’explosion se produisent pour certains.
Alors, oui, ONE OK ROCK n’a pas la carrière d’un conquérant L’Arc~en~Ciel, Dir en Grey, X-Japan, et j’en passe. Mais à l’heure où les MIYAVI, CROSSFAITH, coldrain tracent leur chemin international en écumant avec humilité les festivals ou premières parties de grands groupes occidentaux, n’est-il pas temps de dire « PLACE AUX JEUNES ! » ?

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