Tokyo : connaissez-vous vraiment la capitale du Japon ?

Qu’elle soit l’electric city ou la tradition incarné, la tentaculaire Tokyo dévoile de bien multiples facettes. Après vous avoir emmenés de quartier en quartier il y a deux ans à travers notre série :  » Un jour à Tokyo« , Journal du Japon vous propose aujourd’hui une double lecture de la capitale. Révisez ou découvrez tout d’abord les fondamentaux la concernant (histoire, géographie, organisation, etc…) pour mieux l’appréhender. Puis partez pour un petit voyage en deux étapes, à travers deux livres qui viennent de sortir et qui changent de l’ordinaire touristique : Tokyo à travers ses lieux les plus originaux ou Tokyo à travers des portraits de ses habitants, à vous de choisir !

Entre les bases et l’insolite, venez vous refaire une culture sur la capitale de l’Est !

Tokyo, alias Edo, au XIXe siècle

Tokyo, alias Edo, au XIXe siècle

Du « clan » à « ville » : Histoire d’Edo

Comme vous le savez sans doute, Tokyo n’est pas née capitale du Japon mais l’est devenue. Pour celle qui s’appelait à l’origine Edo, la ville naît comme une bourgade de pêcheur dans l’ancienne province de MusashiEdo (江戸), signifie d’ailleurs « porte de la rivière » ou « estuaire » en lien avec la rivière Sumida qui la traverse. Au XIIe siècle, Shigenaga EDO, membre du clan éponyme qui était une branche mineure du grand clan Taira, déménage avec les siens de Chichibu pour s’installer dans ce petit port et y construit des fortifications, lui donnant aussi son nom.

Edo Taro Shigenaga  

Edo Taro Shigenaga – Source : douzoukenkyu.blog

En 1180, débute la grande guerre civile de Genpei, qui dure 5 ans et marquera la fin de l’ère Heian. Cette dernière oppose deux des quatre clans les plus puissants de l’époque, les Minamoto et les Taira. Le clan Edo doit logiquement soutenir le second mais lorsque le chef des Minamoto leur demande de les trahir pour se rallier à leur cause, ils finissent par accepter. Comme les Minamoto finissent par l’emporter, le clan Edo gagne alors des terres à la fin du conflit : 7 propriétés dans la province de Musashi s’ajoutent à la ville, dont l’actuel arrondissement de Setagaya, aujourd’hui le plus peuplé de la préfecture.

Pourtant, ce n’est pas au clan Edo qu’on attribue la fondation de la ville. En 1457, Shigeyasu EDO doit capituler et céder Edo à Dôkan ÔTA, un vassal de Uesugi SADAMASA, gouverneur du Kantô de l’époque. Dôkan ÔTA, construit alors des fortifications autour de l’entrée de la plaine du Kantô et détourne la rivière Hira à l’est pour former la rivière Nihonbashi et assurer ainsi une meilleure navigation au sein de l’estuaire. Mais, enfin et surtout, sur l’ancienne résidence du clan Edo, il construit le célèbre Château Chiyoda, aka le château d’Edo :

Edo_Castle

Le Japon entre alors dans la période Sengoku, période assez sombre du Japon, faite de troubles et de guerres intestines, et les seigneurs s’affrontent pour le siège du pouvoir qui est à l’époque plus à l’ouest, à Kyoto. À la fin du XVIe siècle, Edo est dans les mains du clan Go-Hôjô qui est alors opposé à l’un des trois unificateurs du Japon, Hideyoshi TOYOTOMI. Lors de leur défaite, en 1590, TOYOTOMI offre les neuf provinces de la région du Kantô à Ieyasu TOKUGAWA qui choisit Edo pour servir de capitale à son domaine.

La suite est plus largement connue : Ieyasu unifie le Japon après avoir remporté la bataille de Sekigahara en 1600 et devient shôgun, faisant d’Edo la nouvelle capitale en lieu et place de Kyoto, même si l’empereur continue de loger dans cette dernière. Les pouvoirs politiques et les seigneurs migrent donc vers Edo et la population de la ville croît rapidement. Au XVIIIe siècle, elle compte 1 million d’habitants sur les 30 millions qui peuple alors le Japon.

Vieux panorama d'Edo

Vieux panorama de ville d »Edo

 

De Edo, la ville à Tokyo, la préfecture

L’empereur finira lui aussi par rejoindre le pouvoir politique et économique au début de l’ère Meiji en emménage à Edo en juillet 1868. La ville devient alors Tōkyō, « la capitale de l’est » et sera divisée en 15 arrondissements auxquels s’ajouteront 6 districts, pour les environs attenants, l’année suivante.

Au début du XXe siècle, la ville continue son développement mais la préfecture est durement éprouvée dans les premières décennies du siècle : le tremblement de terre du Kantō de 1923 fait tout de même 142 807 morts et disparus, puis les nombreux bombardements subis durant la Seconde Guerre mondiale emporteront plus de 100 000 personnes. Ces deux catastrophes détruiront à chaque fois une bonne partie de la ville expliquant ce mélange actuel de moderne et d’ancien avec les monuments historiques qui ont pu survivre, à l’image du Senso-ji, qui date de 645.

Temple Senso-ji

Temple Senso-ji

En 1947, la préfecture et la Ville de Tokyo fusionnent (en absorbant également des districts à l’Ouest) et la « préfecture métropolitaine de Tokyo » naît. Ce qui fait que la commune de Tokyo elle-même n’existe plus mais qu’elle est désormais une sorte de « préfecture-capitale » faite de 23 arrondissements spéciaux, chacun étant une municipalité distincte : 

     

Sur une note plus joyeuse : les Jeux olympiques d’été de 1964 ont eu lieu à Tokyo, l’occasion de construire de nouvelles infrastructures et de donner un énorme coup de boost à la capitale dans les décennies qui vont suivre, à l’image du boom économique de tout le Japon : 10 % de croissance économique en moyenne par an dans les années 60, 5 % puis 4 % par an dans les années 70 et 80.

Tokyo est aujourd’hui la plus grande ville du Japon, avec plus de 13 622 267 habitants intra-muros en 2016 et 42 794 714 dans la préfecture, et forme l’aire urbaine la plus peuplée au monde. En effet, même si Tokyo ne représente en superficie que 2% de la surface globale du Japon, elle comptait en 2007 près de 28% de la population nippone. Rien d’étonnant, donc, à ce que l’agglomération ait une densité d’habitation incroyablement élevée : au 1er juillet 2015, les 23 arrondissements spéciaux réunissaient 9 225 495 habitants sur 617 km2…. soit environ 15 000 habitants au km2 !

Tokyo est dirigée, comme dans toutes les autres préfectures, par un gouverneur, élu au suffrage universel direct pour un mandat de 4 ans et suppléé par trois vice-gouverneurs. L’ensemble du gouvernement, de l’administration ainsi que l’assemblée métropolitaine qui s’occupe de toute la partie législative, résident dans les tours jumelles de l’impressionnante mairie construite à la fin des années 80 et signée par l’architecte Kenzô TANGE.

Tokyo Metropolitan Government Office

La mairie de Tokyo

En pleine préparation des jeux olympiques de 2020, Tokyo est actuellement dirigée pour la première fois de son histoire par une femme : Yuriko KOIKE, en place depuis 31 juillet 2016. Elue en tant que libérale, elle est maintenant à la tête de son propre mouvement, qui est lui plutôt conservateur.

Du climat à l’urbanisme : vivre à Tokyo

Le climat de Tokyo est de qualifié subtropical humide et se constitue d’hivers relativement doux (le thermomètre descend rarement sous les 5°C) mais d’étés sont chauds et très humides, (32°C ou plus) : rien d’étonnant à ce que les distributeurs de boissons pullulent un peu partout dans la ville. Il faut également compter sur deux saisons des pluies, en juin-juillet puis en septembre-octobre avec des passages de cyclones et tempêtes tropicales. Au chapitre des caprices de la nature, on doit évidemment ajouter la sismologie de la région qui résulte de la rencontre de trois plaques tectoniques : la plaque philippine, la plaque eurasienne, et la plaque nord-américaine, ce qui en fait l’une des zones sismiques les plus actives au monde, autrement appelé la Ceinture de Feu. On recense en moyenne un tremblement de terre ressenti par jour, même si les séismes extrêmement violents sont moins courants : le grand tremblement de terre de Kantô de 1923 reste à ce jour le plus dévastateur, avec une magnitude évaluée à 7,9 sur l’échelle de Richter.

Néanmoins des séismes de plus faible intensité restent récurrents et Tokyo est à la pointe en matière de prévention sismique : immeubles high-tech reposant sur de gigantesques ressorts d’acier qui absorbent la majeure partie des ondes sismiques, vastes exercices d’alerte en grandeur nature programmés régulièrement. Même si la Capitale ne peut pas vraiment lutter face à une magnitude supérieure à 7, elle fait donc de nombreux efforts pour parer au pire. Reste cependant que la construction de la ville elle-même est assez erratique, dans un mélange d’ultra-moderne et d’ultra-haut qui côtoient des habitations vétustes et sans âge, dans des quartiers qui s’entrecroisent. D’ailleurs, si jamais vous cherchez votre chemin à Tokyo, attention : le système de numérotation des bâtiments de la ville est très particulier et ne suit pas un ordre croissant ou décroissant, mais correspond plutôt aux dates de construction des bâtisses. Facile.

 Arrondissements de Tokyo   Ecrire-une-adresse-Japonaise    

Enfin Tokyo est considérée comme l’une des villes les plus chères au monde : le prix moyen du mètre carré s’élèverait en moyenne à 12 000 euros en 2017, avec la palme à Ginza où le mètre carré avoisine les… 310 000 euros ! Ajoutez à cela un coût de la vie pour les expatriés qui place régulièrement Tokyo en première ou seconde position et on obtient une addition assez salée.

Une transition parfaite pour décider d’y partir plutôt en vacances et pour passer à la seconde partie de notre article,Tokyo en deux livres inédits : « Tokyo, l’insolite et la secrète », puis : « Tokyo, par ses propres habitants » !

 

Tokyo insolite et secrète : des lieux originaux à découvrir

Tokyo insolite et secrète : couvertureVoici un guide qui emmène le voyageur loin des sentiers battus : musées étranges, statues rigolotes, constructions originales, parcs secrets, de quoi pimenter un séjour dans cette mégalopole.

Pierre Mustière se promène partout, des quartiers connus aux ruelles peu fréquentées. Il en ressort au fil des pages, une réelle expérience de la ville, une connaissance fouillée, des sillons creusés bien au-delà de la croûte touristique. Il a travaillé avec sa femme japonaise à l’écriture, deux regards qui se complètent pour explorer Tokyo dans ce guide qui contient :

Une carte avec les grands quartiers de Tokyo ouvre le livre, suivie par un sommaire très détaillé par grand secteur géographique. Il est donc très facile pour le voyageur de se repérer et d’organiser ses visites en fonction des quartiers qu’il veut visiter au jour le jour.

La lecture du sommaire donne déjà envie avec ses noms curieux et énigmatiques.

En fonction de ses goûts personnels, le lecteur pourra piocher des idées de promenades.

Dans les musées, des petites pépites aiguisent la curiosité : une section criminologie, une salle « toucher » (au musée municipal d’histoire de Minato), un musée de l’algue d’Omori, un bateau-musée Meiji Maru.

Mais parfois ce sont de simples constructions qui deviennent des centres d’intérêt : piliers, pylônes, passages, portes, escaliers et même toilettes !

Les statues sont également très nombreuses : les connues (mais même concernant Godzilla, on apprend qu’il n’y en a pas qu’une, mais d’autres moins connues) et les moins connues (statue ligotée de jizô, très impressionnante !).

Pour ce qui est des parcs, pourquoi ne pas prendre de la hauteur au Meguro Sky Garden, découvrir le parc d’oiseaux sauvages du Port de Tokyo, se promener dans des serres tropicales ou admirer les cerisiers en fleur sur un campus universitaire, voire même flâner au domaine de Chinzanso (jardin d’un grand hôtel) et en profiter pour aller admirer non loin l’une des résidences du poète Bashô.

Le livre permet également de découvrir un bras momifié de Kappa, ou de se replonger dans le passé en allant voir les arbres brûlés de Senso-ji, survivants des bombardements terribles de 1945.

Grande Histoire et petites histoires se mêlent dans ce livre dense, aux textes précis mais pas savants, instructifs mais compréhensibles.

Chaque site est présenté avec son adresse (en français mais également en japonais, ce qui peut être très utile pour demander de l’aide dans la rue), son accès (avec les transports en commun), ses horaires. Les photos sont également nombreuses et permettent de se faire une idée du lieu. Les explications sont à la fois historiques, culturelles et personnelles (les auteurs sont allés sur chacun des sites et leur retour d’expérience permet de sentir leur intérêt, la façon de les aborder, les petits détails à ne pas manquer).

Le guide est parsemé de petits encarts informatifs colorés sur des personnages historiques, des divinités, des lieux, des faits, afin d’améliorer les connaissances du lecteur. 

Parfois les auteurs expliquent que le voyageur peut profiter de la visite d’un site pour aller voir un autre centre d’intérêt à proximité grâce à un encart intitulé :  « aux alentours » sur la même double page. C’est très pratique pour les curieux !

D’un format compact malgré un nombre impressionnant de sites et de nombreuses photos, ce guide sera un indispensable original lors d’un voyage à Tokyo. De quoi donner envie d’y rester longtemps pour explorer tous ses recoins !

Plus d’informations sur le site de l’éditeur.

 

Portraits de Tokyo : une ville racontée par ses habitants

Portraits de Tokyo : couvertureVoici un ouvrage dont Journal du Japon avait déjà expliqué le principe dans un article sur Kyoto car Portraits de Tokyo est publié sur le même concept chez le même éditeur, Hikari.

Ce sont donc des habitants de tous âges et de toutes nationalités qui présentent au voyageur leur ville, mais aussi leur parcours de vie, leurs centres d’intérêt, leur quartier, leurs boutiques, restaurants et lieux favoris.

Ces personnes se livrent avec délicatesse dans des portraits touchants où les événements tristes et joyeux se mêlent. Leur dynamisme et leur amour de la ville sont des moteurs qui donnent envie au lecteur de partager leur quotidien à travers leurs bonnes adresses.

Un employé de pompes funèbres musicien, qui a beaucoup voyagé et enchaîné pas mal de petits boulots, livre ses adresses de bars musicaux, de friperies ou de magasins de vinyles. Cette américaine qui a épousé le fils de la cuisinière japonaise qui l’avait accueillie et qui a fondé une école de cuisine, livre au lecteur des adresses de restaurants d’onigiri, de magasins de baguettes, de furoshiki, de vaisselle ou de tofu, sans oublier le musée du ramen.

Les rencontres sont originales et fascinantes. De Jake Adelstein, l’écrivain de Tokyo Vice à Stéphanie Crohin, ambassadrice des Sentos (bains publics japonais) en passant par Hervé Pichard, boulanger français ou Machiko Ikeoka, femme samouraï (il y en a moins d’une vingtaine à travers tout le Japon).

Les adresses fournies par ces habitants sont ensuite classées en fin d’ouvrage par arrondissement. Le tout est complété par un plan des transports en commun, les informations de base à connaître pour passer un bon séjour, avec quelques mots de japonais et un glossaire culinaire en bonus.

Un livre qui mêle tranches de vie et guide de voyage aux adresses vraiment originales originales comme celles des théâtres populaires conseillées par des femmes ou données par un acteur canadien de Rakugo (théâtre traditionnel humoristique), celles encore de sentos dévoilées par leur ambassadrice (Stéphianie Crohin) ou celle d’une île où surfer et visiter des grottes.

Plus d’informations sur le site de l’éditeur.

 

Ces histoires et ces adresses forment ainsi Tokyo, ou du moins quelques facettes de cette capitale qu’on ne cesse de (re)découvrir. Et vous, quel est votre Tokyo ? Dites-le-nous dans les commentaires !

1 réponse

  1. 9 janvier 2021

    […] Fleuri, l’autrice du fabuleux Portraits de Tokyo paru en 2017, est revenue en cette fin d’année 2020 dans nos librairies avec un nouvel ouvrage, Tokyo, […]

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