Manga de Science-Fiction : une thématique qui n’a pas fini de (nous faire) voyager !

D’une galaxie à une autre, d’un futur à un autre, la science-fiction continue d’être une thématique captivante dans l’offre manga et d’explorer de nombreuses pistes. La quantité d’œuvres n’est pas pléthorique mais, entre nouvelles œuvres et rééditions de classiques en mode Deluxe, les amateurs de SF ont de quoi se faire plaisir. Alors que les chants de Noël vont venir succéder aux parades d’Halloween, et que certains cherchent déjà des idées de cadeau à offrir, Journal du Japon vous propose donc trois auteurs phares et deux nouveaux mangakas prometteurs pour cinq mangas de SF à savourer sans attendre !

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Dai Dark : le voyage co(s)mique et gore de Q-HAYASHIDA

Résumé éditeur : Sanko Zaha, un ado qui adore les spaghettis, voyage dans les ténèbres de l’espace infini. On raconte que ses os exauceraient n’importe quel souhait. C’est pourquoi les pires malfrats de l’univers veulent lui faire la peau ! Heureusement, toujours accompagné d’Avakian, son fidèle compère, il n’hésitera pas à désosser gaiement tous ses assaillants.

Q-HAYASHIDA est une mangaka née en 1977 connue plutôt pour du manga underground, notamment son célèbre Dorohedoro, publié chez Soleil Manga. Très appréciés des connaisseurs, ces titres sont des succès critiques mais on ne peut pas en dire autant du point de vue commercial, ce qui explique sans doute le prix un peu élevé de Dai Dark, à 11,95 euros le tome… ça et le fait que l’édition propose des pages couleurs et une belle sur-couverture transparente à chaque volume. Le manga en vaut donc la peine malgré la facture, mais aussi pour son contenu joyeusement étrange et barré.

Les trois premiers volumes ont déjà mis en place les principaux protagonistes, des anti-héros absolus qui tuent pour absorber des âmes ou voler les os de leurs victimes, dans un bain de sang et de viscères… Mais avec le sourire et dans la bonne humeur. On renverse totalement la notion de bien et de mal avec le fameux Sanko, surpuissant mais chassé par tout l’univers depuis son enfance et qui a toujours vécu dans la violence, faisant des piles de cadavres qui s’amoncèlent son quotidien et sa normalité. Son insouciance et sa nonchalance, servies par une narration et une traduction très décontractée (de Sylvain Chollet, un point pour lui) en font un véritable délice pour les amateurs de SF déjantée et d’horreur bucolique. Les références de HAYASHIDA résument assez bien le mélange qu’est Dai Dark : imaginez un manga qui croise Akira TORIYAMA, AlienThe Thing ou Silent Hill… En retirant la composante thriller et angoissante de ses derniers puisque la série est surtout très drôle. Une comédie SF et gore, en quelque sorte.

Trois volumes sont sortis en France et cinq au Japon, où la série est toujours en cours. Vous pouvez lire, ci-dessous, un extrait en ligne pour vous faire un avis.

Plus d’informations sur le site de l’éditeur Soleil Manga.

Planètes

Planètes : l’homme face à l’infini de Makoto YUKIMURA.

Résumé éditeur : Hachimaki est récupérateur de débris spatiaux sur le Toy Box. Et il n’a qu’une obsession : embarquer sur un des vaisseaux explorateurs de Jupiter. Mais l’espace n’est pas toujours le monde idyllique que l’on imagine. Makoto Yukimura nous fait partager sa passion et sa connaissance de l’espace, à travers le véritable parcours initiatique de trois personnages partis pour un monde inconnu où il est souvent difficile pour l’Homme de trouver sa place.

Planètes

Planètes en édition limitée

Planètes se présente à la fois comme un cri d’alerte écologique et une déclaration d’amour à l’espace.

On voit cette ambivalence apparaître plus nettement à la fin du premier tome. Alors que les premiers chapitres servaient à nous introduire l’univers, les personnages, leurs rêves et personnalités : on voit peu à peu se dessiner un affrontement entre deux visions du monde. D’un côté, notre héros, Hachimaki, incarne parfaitement cet esprit « pionnier américain » à la Kennedy (« we chose to go to the moon ») : l’univers est bien trop vaste pour que l’humanité reste clouée au sol, il est de son devoir d’explorer cette vaste immensité qui s’offre à elle. L’œuvre est d’ailleurs parsemée de véritables citations et de références constantes aux premières conquêtes spatiales, dont les premiers astronautes sont des modèles pour Hachimaki. Il a dédié sa vie à l’espace, il a travaillé dur pour passer les épreuves et gagner sa place au sein du nouveau vaisseau spatial, fleuron technologique.

A sa vision vient s’opposer celles des autres personnages, montrant que l’auteur a bien conscience des limites au techno-progressisme. Une jeune fille à l’hôpital dans le chapitre 2 se fera la réflexion : « Personne ne peut rester en bonne santé dans l’espace ». Un groupe d’écoterroristes conscient des dégâts majeurs que va causer cette nouvelle mission spatiale, essaie d’alerter l’opinion quant à cette course infernale au progrès et à l’extractivisme illimité. Car bien évidemment, là où Hachimaki ne rêve qu’en terme d’idéaux, la réalité économique rattrape le lecteur : ce projet est évidemment l’œuvre de financiers qui veulent explorer de nouvelles planètes, coloniser de nouveaux territoires, extraire encore plus de ressources ; afin d’essayer encore et encore de satisfaire l’hubris démesuré de l’humanité.

Planètes est à découvrir en Edition perfect, en 3 tomes à 19,99 euros chacun (362 pages NB & couleur) avec de nouveaux scans et un ajout rédactionnel rédigé par les experts du CNES. Plus d’informations sur le site de l’éditeur Panini Manga.

Planètes se présente à la fois comme un cri d’alerte écologique et une déclaration d’amour à l’espace.

Coffee Moon : le jour sans fin de Mochito BOTA

Résumé éditeur : Pieta est une jeune fille qui vit une existence ordinaire dans un monde arrosé en permanence par une pluie noire. Tous les jours, il pleut. Tous les jours, elle se rend à son école en empruntant le même chemin. Tous les jours, elle discute avec son amie Danae. Dans cette routine et ce quotidien immuables, Pieta est heureuse. Ce jour-là, comme d’habitude, elle s’attend à discuter joyeusement avec Danae, mais…

Un jour sans fin… le fameux jour de la Marmotte de Bill Muray est devenu un classique du voyage dans le temps, qui est devenu récurent ces dernières années dans les mangas publiés en France : Le bateau de Thésée et Time Shadows en sont deux excellents exemples, assez innovants. Le manga de Mochito BOTA chez Doki-Doki colle encore de plus près au principe de la boucle temporelle, avec son héroïne Pieta coincée (depuis 1033 occurrences, s’cusez du peu !) dans la journée de son anniversaire (quitte à choisir une seule journée, vous prendriez laquelle, vous ?).

Mais, comme le dit le résumé, Pieta fait avec, et elle s’est fait à cette routine dont elle connaît les secrets, les pièges et la solitude.

Intelligemment l’auteur lance son manga avec un excellent timing : en 1033 jours identiques, Pieta a sans doute vécu des expériences et bâti des secrets, voire des regrets… Tout un background dans lequel l’auteur va pouvoir piocher pour étoffer son univers et son récit. De plus, il chamboule la vie de l’adolescente en lui apportant ce qu’elle souhaite sans doute le plus au monde : une personne avec qui partager, la jeune et haute en couleur Danae, qui découvre avec effroi qu’elle est bloquée elle aussi. S’enclenchent alors les rouages du destin, l’influence du moindre geste sur les événements de la journée, le questionnement sur qui tire les ficelles de ce sac de nœud palpitant et la façon dont toute cette mécanique – dont on cherche avec malice les rouages – va avancer. S’y ajoutent les liens qui se tissent entre le lecteur et ces deux héroïnes très touchantes : Pieta pour la tristesse qui étreint le lecteur, par empathie, et Danae pour la touche d’humour qu’elle apporte avec son expressivité et ses émotions à fleur de peau. Enfin, on peut ajouter que le visuel assez fin graphiquement et les décors font beaucoup pour l’ambiance et l’immersion. Un très bon début !

Un premier tome vient de sortir (en grand format, 164 pages, à 9,90 euros), et quatre volumes ont été publiés au Japon où il est encore en cours. Plus d’informations sur le site de l’éditeur Doki-Doki. Vous pouvez également découvrir un extrait du premier tome ici.

Eden tome 9 Deluxe

Eden : la post-apocalypse philosophique de Hiroki ENDO

Résumé éditeur : La Terre, dans un futur proche. Le closure virus, un mal mortel et incurable dont l’origine est inconnue, a dévasté la population mondiale. Parmi les survivants, deux adolescents, Enoa et Hannah, sont immunisés contre le virus depuis leur naissance. À la mort de leur protecteur, ils doivent quitter leur éden et affronter le monde extérieur.

Mais si l’humanité a frôlé l’extinction, ses travers sont toujours bien présents : l’égoïsme, l’avarice, la volonté de domination, l’individualisme… et peut-être même, plus forts que jamais !

Eden

Eden © Hiroki Endo / Kodansha Ltd.

Publié au Japon à partir de 1998, cette série a plus de 20 ans mais se révèle toujours aussi pertinente, et pas que pour l’analogie avec le virus qui décime la population. Le comportement des humains face à cette pandémie mondiale, encore plus funeste dans Eden, est criant de vérité : les choix des hommes, leurs attitudes, leur convoitise face au miracle des immunisés. S’ajoute une dimension philosophique autour de l’humanité avec ses comportements souvent cruels et son rejet de la différence… Bref, ces erreurs qu’elle aime répéter, sans oublier une couche religieuse parfaitement maniée par le mangaka pour montrer les drames qu’elle peut engendrer et faire passer un message humaniste, engagé et universel, qui n’a pas d’âge. Le tout agrémenté d’une bonne dose de robotique et de cybernétique qui n’est pas sans rappeler les références de l’époque comme Appleseed et Ghost in the Shell de Masamune SHIROW ou encore Akira et Evangelion que l’auteur cite souvent comme influences.

Car, que le fan de SF se rassure, Eden n’est pas qu’un simple discours mais bien un manga d’action hyper-rythmé avec des combats entre guerre et guérilla, plein d’objets sophistiqués et de soldats augmentés qui usent de stratégies militaires toujours très bien pensées. Le tout porté par un crayon précis et vif, un univers fourmillant de détails… Et à ne pas mettre en toutes les mains, car il est le reflet de la violence dont est capable l’homme en zone de conflit.

Eden, malgré son âge est donc sans nul doute un petit bijou du genre et une excellente porte d’entrée dans l’univers de Hiroki ENDO, qui a consacré 11 ans de sa vie à ce seinen. La série est proposée dans une version Deluxe en 15 x 21cm, en 9 tomes de plus de 400 pages chacun, à 16,99 euros. On vous propose un extrait chez nos confrères de Manga News et vous pouvez aussi retrouver des informations sur la série sur le site des éditions Panini Manga.

 

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Léviathan : le thriller de l’espace de Shiro KUROI

Résumé éditeur : Au fin fond de la galaxie, le Léviathan, un immense vaisseau spatial, flotte à la dérive. Quand des pilleurs d’épaves s’y introduisent, ils découvrent le journal intime d’un collégien, Kazuma, relatant les événements qui ont eu lieu dans les entrailles du navire… À sa lecture, l’évidence s’impose : un survivant de la catastrophe se cache quelque part dans le dédale des ruines !

Des années plus tôt, le jeune Kazuma est en plein voyage scolaire vers la Terre. La fête tourne court quand des explosions d’origine inconnue détruisent une partie de la coque du vaisseau ! Voilà les passagers immobilisés au milieu de nulle part… L’adolescent et sa camarade Futaba surprennent alors une conversation entre leur professeur et un robot de maintenance : les réserves d’oxygène sont insuffisantes pour tenir jusqu’à l’arrivée des secours… Le seul espoir de survie est un caisson de cryogénisation niché au cœur du géant de métal. Or, il ne peut contenir qu’une personne… Malheureusement pour les élèves, l’enseignant comprend vite qu’il a été entendu. C’est le début d’une lutte sanglante pour préserver le secret !

Création originale des éditions Ki-oon, ce qui mérite déjà notre attention quand on a déjà lu Lost Children ou Tsugumi Projet, voici un thriller de l’espace signé par Shiro KUROI, enfant des années 90 et grand fan de Nausicaä de la vallée du vent de Hayao MIYAZAKI et d’Akira de Katsuhiro OTOMO, pour citer quelques références japonaises mais aussi Mœbius pour en citer une autre de SF, dont on ressent d’ailleurs l’impact graphique (avec un air de famille avec Blame! et le travail de Tsutomu NIHEI, aussi).

Là encore, on découvre un titre au visuel travaillé, minutieux, mais on plonge surtout dans un monde solitaire, isolé de tout – rien de tel que l’espace, où « personne ne vous entendra crier » comme on dit souvent. Il s’est passé quelque chose dans ce vaisseau, c’est certain… Mais quoi ? QUI ?

« Monstre ou humain, qui sommeille au cœur des ténèbres ? » pour reprendre l’accroche de l’éditeur.

Le jeu de la double mise en scène et de la double temporalité fait des merveilles dans les mains du mangaka : le temps des pilleurs qui découvrent, comme le lecteur, le résultat de ce qui s’est passé et le temps des enfants dans ce voyage scolaire qui a (très mal) tourné. Mais comment cela se finit-il ? Qu’est-ce qui s’est vraiment passé ? La folie qui gagne petit à petit les élèves est aussi mystérieuse que glaçante dans cette descente aux enfers. Les deux trames du récit convergent, pas à pas, vers le climax, le moment où tout a basculé dans le cauchemar, et ce qui s’en est suivi après… Et les rebondissements ne laissent que peu de répit.

Cette pépite compte 2 tomes en VF et s’achèvera dans avec une troisième itération prochainement. L’édition est en grand format 15 x 21 cm à 9,95 euros, ce qui est un bon rapport qualité-prix quand on connaît le travail de l’éditeur. Ce dernier vous propose d’ailleurs un extrait, ci-dessous :

Comédie, aventure, philosophie, action, suspens, thriller, humanisme, angoisse… L’espace et la science-fiction ne cessent de traverser les thématiques et les ambiances, en voyageant d’un style à l’autre et en emmenant avec elle des lecteurs qui en redemandent encore et toujours. Et vous, quels sont vos derniers coups de cœur SF ?

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