Kumamoto : voyage sur les traces de Musashi Miyamoto

Musashi MIYAMOTO (1584-1645) est un maître de sabre né à la fin du 16e siècle dans la province de Mimasaka (actuel Okayama) sous le nom de Bennosuke SHINMEN. Il est devenu au fil du temps un personnage aux 1 000 vies, à la fois personnage historique et légendaire. Fondateur de l’école des deux sabres Niten Ichi ryû, artiste peintre et sculpteur, auteur du célèbre Traité des Cinq Roues et héros du roman fleuve d’Eiki YOSHIKAWA (1892-1962) paru en français sous les titres de La pierre et le sabre et La parfaite lumière, il aurait, parmi ses nombreux exploits, gagné son premier duel à 13 ans et vaincu à lui seul l’école Yoshioka en 1609 alors qu’il n’avait que 20 ans, menant à Ichijôji un combat face à 40 ou 70 hommes, selon les versions.

Nous pouvons actuellement trouver cinq tombes à son nom à travers tout le Japon et nul ne sait à priori dans laquelle se trouve véritablement son corps. Parmi elles, trois se trouvent au centre de Kyûshû, dans la préfecture de Kumamoto, là où il a passé la fin de sa vie après l’invitation du daimyô Tadatoshi HOSOKAWA (1586-1641). Journal du Japon vous emmène sur les traces de Musashi, à travers cinq lieux qui contiennent la mémoire de son passage à Kumamoto.

Kumamoto-jô, propriété de celui qui a fait venir Musashi dans le pays du feu

C’est au château de Kumamoto (Kumamoto-jô), considéré comme l’un des trois plus beaux ensembles fortifiés du pays avec le château de Himeji (département de Hyôgo) et celui de Matsumoto (département de Nagano), que nous commençons notre voyage dans les pas de Musashi.

Le château sur fond de ciel bleu.

Le château de Kumamoto ©Nina Le Flohic pour Journal du Japon

Le département de Kumamoto, surnommé le « pays du feu » en raison de la présence sur son territoire du plus vaste volcan du Japon, le mont Aso, est désormais connu dans tout le pays grâce à sa mascotte créée en 2010, Kumamon. Si Kumamon est désormais devenu la mascotte la plus populaire du Japon, le Kumamoto-jô possède aussi la sienne. C’est Higomaru, un personnage en forme de château à côté duquel il est possible de se prendre en photo dans l’enceinte du château.

L’histoire du château commence à la fin du 15e siècle et voit réellement le jour au début du 16e, avec l’installation du daimyô Kiyomasa KATÔ (1562-1611) dans le fief. Incendié en 1877 durant la rébellion de Satsuma, il a été plusieurs détruit et reconstruit. En avril 2016, il s’est partiellement écroulé à cause des deux violents tremblements de terre qui avaient alors frappé la région. Encore partiellement en reconstruction à ce jour, il est néanmoins de nouveau possible de visiter le donjon et de se promener à l’intérieur des fortifications. Situé en haut d’une colline, en plein centre-ville, à proximité des deux grandes allées marchandes (shimotôri et kamitôri) et de la mairie, il surplombe Kumamoto et se laisse apercevoir depuis bien des endroits. Se promener dans l’enceinte du château et dans la ville basse aux bâtiments d’aspect traditionnel donne l’illusion d’avoir fait un bond dans le temps et de découvrir le Japon médiéval. Visiter le donjon, c’est entrer dans un musée.

Mur de soutien écroulé après le séisme.

Mur de soutien écroulé après le séisme de 2016 ©Nina Le Flohic pour Journal du Japon

Comme dans la plupart des châteaux japonais, l’intérieur est agencé comme un espace muséal, avec son ascenseur, son sol recouvert de moquette, ses maquettes, ses objets et documents sous vitrines et autres bornes interactives. Consacré à l’histoire du Kumamoto-jô au fil des siècles, le visiteur y progresse dans le temps au fur et à mesure qu’il monte dans le donjon. Le rez-de-chaussé retrace la période sous la gouvernance de la famille Katô (Kiyomasa KATÔ et Tadahiro KATÔ (1601-1653)). Le premier étage est consacré à la période Hosokawa. Le deuxième à l’époque moderne (ère Meiji : 1868-1912). Le troisième à l’époque contemporaine et aux différents travaux de reconstruction et de préservation qui ont eu lieu. Le quatrième expose des photos et un documentaire sur les impacts du tremblement de terre de 2016, tandis que le cinquième et dernier étage, aux murs entièrement vitrés, offre une vue panoramique magnifique sur les alentours du château et sur la ville de Kumamoto dans son entièreté.

Les nombreux vestiges (tuiles, ornementations du toit, etc) des époques antérieures et les cartes d’époque qui y sont exposés permettent de se faire une idée du lieu tel qu’il était lorsque Musashi s’y rendait. L’un des murs du premier étage présente par ailleurs six anecdotes survenues sous le règne des Hosokawa, parmi lesquelles apparaît le maître de sabre. Le visiteur peut y lire ces quelques phrases accompagnées d’un dessin mettant en scène Musashi dans une grotte, en train d’écrire de la main droite sur un rouleau de papier tandis qu’il tient de la main gauche un de ses sabres levé au dessus de son visage.

« Musashi Miyamoto, connu comme sabreur d’exception, est arrivé à Kumamoto en 1640, alors qu’il avait 57 ans, sur l’invitation de Tadatoshi Hosokawa. Tadatoshi l’accueillit chaleureusement, lui accordant une demeure dans un recoin du château de Chiba. On dit que Musashi a laissé de cette époque de magnifiques peintures à l’encre de Chine et autres calligraphies, et qu’il a écrit, dans la grotte du Reigandô située sur le mont Kinpô, un livre de techniques militaires intitulé Le Traité des Cinq roues. »

Anecdote en japonais sur Musashi présentée sur le mur intérieur du château.

Anecdote sur Musashi présentée à l’intérieur du château ©Nina Le Flohic pour Journal du Japon

Devant le donjon trône un superbe ginko qui aurait été planté par Kiyomasa KATÔ lui-même et aurait donc vu passer Musashi il y presque quatre siècles. S’étendant sur un très vaste domaine, nous pouvons facilement passer deux heures dans son enceinte, entre la visite du donjon et la promenade entre les divers bâtiments qui constituent l’ensemble fortifié. La vue depuis la longue passerelle construite depuis la réouverture qui mène de l’entrée centre-ville jusqu’au donjon constitue également l’un des attraits du lieu. La visite peut également être prolongée par un tour dans la ville basse, Sakura no baba josaien, un recoin touristique où s’alignent dans des bâtiments traditionnels de nombreuses boutiques et cafés qui proposent les spécialités régionales, ainsi que Wakuwaku-za, sorte de musée interactif du château. Proposant de nombreuses activités pour les enfants, les adultes peuvent aussi y trouver leur compte avec des reconstitutions en réalité virtuelle et autres quiz interactifs sur les grandes personnalités de la ville, dont fait évidemment partie Musashi. Il est également intéressant de se rendre dans le sanctuaire Katô-jinja, à l’ouest du château, qui offre notamment une très belle vue sur celui-ci.

Grand ginko du château.

Grand ginko du château ©Nina Le Flohic pour Journal du Japon

S’y rendre : 1-1 Honmaru, Chuo-ku, Kumamoto-shi, Kumamoto-ken, 860-0002.

Arrêt de tramway Kumamotojô-mae ou de bus Shiyakusho-mae. Parking payant.

Droits d’entrée tarif plein : 800 yens. Wakuwaku-za : 300 yens.

Reigandô, la grotte qui a vu naître Le Traité des Cinq Roues

Depuis le centre-ville de Kumamoto, il faut compter une demi-heure en voiture ou le double en bus, pour se rendre dans le coin de campagne reculé où se trouve la fameuse grotte dans laquelle Musashi s’est retiré à la mort de Tadaoki Hosokawa. C’est ici qu’il aurait rédigé Le Traité des Cinq Roues, sorte de guide de stratégie guerrière qui continue encore aujourd’hui d’inspirer le monde moderne au point d’être perçu comme une référence pour accroître la compétitivité de certaines entreprises. Située en pleine montagne, sur le mont Kinpô, cette grotte appartient au Unganzenji, temple bouddhiste dédié à Kannon, bodhisattva de la compassion. Après avoir sillonné la petite route de campagne, le visiteur voit apparaître entre deux virages un parking au bout duquel se trouve une gigantesque statue qui représente le maître de sabre, regard perçant et assis en posture de zazen. Devant elle sont déposées quelques offrandes et un panneau explique que prier ici permettrait d’attirer sur soi la réussite, que cela soit dans un cadre sportif, scolaire ou professionnel. À gauche de la statue, une petite route bordée de bambous et d’érables débouche sur le Unganzenji.

Grande sculpture en pierre représentant Musashi assis en posture zazen.

Musashi Miyamoto ©Nina Le Flohic pour Journal du Japon

Les bâtiments traditionnels en bois, aux dorures des intérieurs bouddhiques et aux innombrables sculptures renferment dans leur cour une magnifique lanterne en pierre toute recouverte de mousses et de fougères, d’où s’écoule un filet d’eau. Le ton est donné : nous entrons dans le règne du calme, de la nature et d’un parfum d’ancestralité. Une fois payé le droit d’entrée de 200 yens seulement à l’un des moines en charge du temple et passé le portique rouillé qui grince à chaque passage, un chemin tout de pierres et de mousses s’ouvre à nous. Si la grotte constitue le site d’intérêt premier, le chemin qui y mène n’en est pas moins jonché de belles surprises. Vitrines où sont exposées les reliques du temple et des objets en liens avec Musashi, divers petits bâtis abritant des statues de Kannon et des arbres magnifiques…

Lanterne de pierre moussue.

La lanterne de pierre ©Nina Le Flohic pour Journal du Japon

Et surtout, ce sont pas loin de 500 sculptures moussues qui habitent de leur présence la colline. Sculptées en l’espace de 24 ans au début du 18e siècle par un artisan de la ville, Fuchidaya Gihei, la plupart d’entre elles sont partiellement brisées : il manque des têtes, des mains, des bras… Comme autant de traces du temps qui passe et des guerres de religion de l’époque Meiji, entre bouddhisme et shintô, qui ont mené à la destruction partielle de certaines d’entre elles. Selon la légende du lieu, porter son regard sur chacune des statues permettrait au visiteur de voir l’ensemble de ses visages intérieurs. Chaque expression faciale, chaque posture représente une émotion différente, de la plus torturée à la plus douce qui soit. D’âges différents, elles marquent également la multitude d’étapes que comporte une vie.

La plupart semblent plongées dans leurs pensées et amener ainsi en miroir celui qui les regarde à réfléchir. Situées en surplomb, elles nous observent comme autant de questions laissées sans réponses. Environnées d’une nature luxuriante, traverser leur espace constitue en soit un instant magique, suspendu, entre contemplation et apaisement. Une fois arrivé au bout du chemin, la grotte apparaît, encastrée en hauteur dans la falaise. Deux escaliers taillés dans le roc, assez raides, permettent d’y accéder. Au fur et à mesure de l’ascension, se dévoile dans notre dos le paysage sur les montagnes qui y font face, tandis que des effluves d’encens nous arrivent de la grotte.

Le sol y est plat, recouvert d’un plancher qui ne laisse saillir qu’un seul rocher à nu. Le fond de la paroi rocheuse est fermé par des barreaux de bois devant lesquels se trouvent des bouteilles de saké, des fleurs, des guirlandes de grues, une saisenbako (boîte rectangulaire au couvercle percé de striures où l’on lance quelques pièces pour prier) surmontée d’une corde reliée à une grosse cloche : un autel. Nombre de personnes viennent ici prier l’âme de Musashi, comme en attestent les pièces de 10, 50 ou 100 yens qui jonchent le fond de la saisenbako, recouvrent les genoux de la petite statuette représentant le sabreur en position de zazen et emplissent la moindre cavité rocheuse. Du plafond pendent de longues tiges végétales – sorte de lierre – où sont accrochés des centaines de bouts de papier : les prédictions omikuji. Ceux qui ont tirés une mauvaise prédiction au temple viennent les accrocher ici afin de les conjurer. L’ambiance empreinte de bouddhisme qui en découle tendrait presque à faire oublier que ce lieu est avant tout connu pour avoir accueilli, quelques décennies plus tôt, le fameux maître de sabre dans les derniers mois de sa vie.

S’y rendre : Matsuomachi Hirayama, Nishi-ku, Kumamoto-shi, Kumamoto-ken, 861-5282.

Arrêt de bus Iwado Kannon Iriguchi + 20mn environ de marche à pied. Parking gratuit à disposition.

Droits d’entrée : 200 yens.

Le parc Musashi-zuka, un lieu de passage dédié à la mémoire de Musashi

C’est à l’exact opposé du Reigandô, à l’est de Kumamoto, que se trouve le Musashi-zuka kôen, littéralement « parc de la tombe de Musashi ». Tout le quartier environnant est marqué par le passage du personnage et le visiteur pourra ainsi croiser en chemin le collège Musashi, l’école primaire Musashi, traverser le pont Musashi, etc. Entouré de murs qui rappellent les enceintes d’un château, le parc semble hésiter entre lieu de passage et jardin traditionnel. Une rivière artificielle le traverse, tandis qu’en été, les nombreux arbres offrent tout à la fois une ombre salvatrice au promeneur et le logis aux cigales dont les stridulations emplissent l’espace.

À l’entrée, une plaque de marbre et de métal inaugurée en 1989 rappelle le jumelage entre la ville de Kumamoto avec celle de San Antonio au Texas (depuis 1987). Nous pouvons y lire un texte de l’homme politique texan Henry G. Cisneros dans lequel il rend hommage à Musashi, à son talent de sabreur mais aussi à ses aptitudes intellectuelles, spirituelles et artistiques, avant de conclure sur ces phrases : « Aujourd’hui, 344 ans après sa mort, Musashi connaît de nouveaux amis, de nouveaux admirateurs dans sa ville jumelle de l’autre côté de la mer, à San Antonio (Texas). Il nous tend la main et nous touche à travers le temps et l’espace. Emplis de respect, nous sommes heureux de le connaître. » Une façon pour la ville de Kumamoto d’ancrer l’importance de ce lieu et de montrer comment l’histoire du sabreur peut faire connaître la ville au-delà du Japon.

Au centre du parc se trouve une haute sculpture juchée sur un socle d’un mètre environ, qui représente un homme imposant en kimono, un sabre dans chaque main, au regard sévère et perçant : figure immortelle de la puissance à l’état brut. La statue en bronze s’appuie sur l’autoportrait effectué par Musashi à la fin de sa vie, qui est actuellement conservé au musée Shimada (Kumamoto). Il est amusant de constater que cette image a également inspiré Takehiko INOUE (1967), auteur du célèbre manga Vagabond pour dessiner non pas Musashi mais son père, Munisai SHINMEN. Tout autour de la statue sont placés des panneaux explicatifs qui retracent son histoire et indiquent les autres lieux à visiter dans le département pour marcher dans ses pas.

Un peu plus loin, sous l’ombre des arbres, apparaît sa tombe. Devant la stèle de pierre gardée par des lanternes et des komainu (sculptures de chien-lions considérés comme des protecteurs divins) sont déposées quelques offrandes, signe que là encore les habitants viennent se recueillir et espérer son soutien dans les moments de doute et de crainte face à l’échec. Le visiteur trouve à droite de la tombe une boite vitrée – semblable aux boîtes à lire connues dans nos contrées – qui renferme le matériel nécessaire pour se recueillir (encens, allumettes, bougies) mais aussi un cahier laissé à disposition de chacun et une pile de documents touristiques qui décrivent le parc. Le fond de la boîte est ornée d’une calligraphie de bushidô (« la voie du guerrier »), tandis qu’un grand panneau à proximité expose les 21 préceptes du Dokkô(« La Voie à suivre seul »), un rouleau écrit par Musashi peu de temps avant sa mort.

De l’autre côté du parc, le Musashi-kan, un dôjô dédié aux enseignements du maître de sabre accueille les touristes pour des séances de iaï (l’art de dégainer le sabre et d’effectuer des coupes le plus rapidement possible, avant de le rentrer tout aussi rapidement dans le fourreau) d’une heure et demie avec Tetsunori Matsunaga, maître du style Niten ichi-ryû, moyennant paiement (150 euros environ). La séance est agrémentée par la dégustation d’un thé accompagné de wagashi (gâteaux traditionnels qui accompagnent le thé) et suivie par la remise d’un diplôme attestant la participation à cette initiation au iaïdô. Derrière le dôjô se trouve également une maison de thé où se déroulent de nombreuses cérémonies. Ouvert en 1962 comme parc municipal, le Musashi-zuka kôen offre ainsi à la fois un espace de calme où se ressourcer dans la nature et un lieu de mémoire dédié à ce personnage dont le passage dans la ville reste désormais marqué comme un attrait touristique majeur.

S’y rendre : 1 Chome-1232 Tatsudamachi Yuge, Kita-ku, Kumamoto-shi, Kumamoto-ken 861-8007.

Arrêt de bus Tatsuda shimin sentâ mae ou Musashizuka Kôen. Par le train : Musashi-zuka eki. Parking gratuit à disposition.

Le Tatsuda shizen kôen : parc naturel de Tatsuda

Écrin de verdure à la nature luxuriante, le parc naturel de Tatsuda offre un magnifique lieu de balade entre bambous, cèdres gigantesques et lanternes de pierre recouvertes de mousses. Situé sur le mont Tatsuda à l’ouest de la ville, derrière l’Université de Kumamoto, il appartient à la famille Hosokawa. Le site est ouvert au public en tant que parc naturel depuis 1955, à la suite des accords de prêt du terrain à la ville de Kumamoto qui ont été signés cette année-là. Tadaoki Hosokawa ayant été un maître de thé, élève du célèbre Sen-no-Rikyu (1522-1591), nous pouvons voir encore aujourd’hui dans l’enceinte du parc deux maisons de thé au toit de chaume situées au bord d’un étang qui ont été conçues par Tadaoki. Entrer dans ce parc constitue une plongée dans un monde enchanteur où l’histoire se mêle à la nature, dans une ambiance qui n’est pas sans rappeler les plus beaux films d’animation du studio Ghibli, entre Le voyage de Chihiro et Princesse Mononoke. En effet, outre la beauté du paysage naturel qu’il offre, ce lieu est également connu pour renfermer les tombes de plusieurs grands noms de la famille Hosokawa, dont celles de Tadaoki Hosokawa et de son épouse, Gracia Hosokawa (1563-1600). Quatre grands caveaux sont visibles au cœur du parc ainsi que des dizaines de stèles sur lesquelles sont gravés les noms de nombreux proches de la famille Hosokawa.

Le visiteur trouvera parmi elles une stèle dédiée à Musashi, qui compte pour l’une des cinq tombes qu’il possède dans tout le Japon. Sorte de tour à cinq anneaux, la stèle représente de cette manière les cinq chapitres du Traité des cinq roues que sont la Terre, l’Eau, le Feu, le Vent et le Vide, soit les cinq éléments selon le bouddhisme japonais.

Monument érigé à la mémoire de Musashi

La stèle dédiée à la mémoire de Musashi ©Nina Le Flohic pour Journal du Japon

À côté de cette stèle, c’est la mémoire de Oshô HARUYAMA, un moine bouddhiste zen affilié à la famille Hosokawa, qui a été également un proche du maître de sabre et dont on dit qu’il l’aurait guidé vers la voie du Bouddha lors de son décès, comme en atteste une inscription présente en ce lieu. En venant à Kumamoto, Musashi aurait en parallèle de son activité de formateur au sabre pénétré les voies du zen et de la philosophie, et ce notamment grâce à son amitié avec Haruyama. C’est lui qui l’aurait introduit dans la grotte du Reigandô lorsque Musashi, sentant arriver la fin de sa vie, dit vouloir se retirer pour s’atteler à sa dernière tâche : transmettre le fruit de ses années de réflexion sur la voie du sabre par un écrit en cinq rouleaux, qui est devenu le Traité des cinq roues. Tous ces éléments reposent cependant, comme la vie entière de Musashi, sur une part de légende et il est bien difficile de démêler la fiction de la réalité.

S’y rendre : 4 Chome-610, Kurokami, Chuo-ku, Kumamoto-shi, Kumamoto-ken, 860-0862.

Arrêt de bus : Tatsuda Shizen Koen Iriguchi ou Kumamoto daigaku mae + 10mn environ de marche à pied. Parking gratuit à disposition.

Droits d’entrée : 200 yens.

Le musée Shimada, sur les traces artistiques du maître de sabre

Ouvert en 1977 et actuellement géré par Shinsuke SHIMADA (1940), le petit-fils de Matomi SHIMADA (1885- 1977), ce musée rend hommage à la mémoire du grand-père, un antiquaire qui s’était consacré tout au long de ses 92 années de vie à l’étude et à la préservation de la culture guerrière du fief de Kumamoto. Shinsuke SHIMADA, qui était par ailleurs président de la société Musashi, possédait une importante collection d’œuvres d’art et de documents en lien avec le célèbre maître de sabre. Ces reliques sont maintenant visibles dans le musée Shimada, qui se situe dans la résidence qu’il occupait de son vivant. Passer la porte de ce lieu constitue en soit une traversée dans le temps. Le visiteur passe par un jardin traditionnel, au son apaisant de l’eau qui s’écoule dans une petite fontaine japonaise et du bruissement des feuilles de bambous, avant d’entrer dans une maison traditionnelle en bois. Un café et une salle qui accueille des expositions temporaires habitent également les lieux. Une fois récupéré le beau ticket d’entrée en deux dimensions, nous ouvrons la première porte et entrons dans l’univers de Musashi.

Deux salles seulement composent ce musée, néanmoins agrémentées d’un troisième et dernier espace où le visiteur peut feuilleter des livres consacrés à la culture guerrière en étant assis face à un magnifique jardin moussu, regarder un documentaire sur les arts de la ville ou encore se rendre dans une pièce à tatami dans laquelle il est possible d’admirer différents objets traditionnels, dont un bokken (sabre de bois) posé sur de magnifiques bois de cerfs. La toute première salle est entièrement consacrée à l’auteur du Traité des cinq roues: lames et gardes de sabre lui ayant appartenu, peintures et sculptures qui lui sont attribuées, portraits réalisés par de grands noms de l’estampe, estampes représentant le célèbre duel de Ganryû-jima contre Kôjiro SASAKI en 1612, copies anciennes des rouleaux du Traité des cinq roues et lettres mentionnant sa venue à Kumamoto emplissent l’espace. Un bronze représentant Matomi SHIMADA y est exposé, accompagné de quelques explications sur sa vie. Les pièces les plus mises en valeur de cet espace sont sans conteste deux œuvres de Musashi.

Il y a d’abord sa sculpture de Fûdô Myô (Acalanātha), une divinité bouddhique associée au feu et à la colère, chef-d’œuvre de 24 centimètres de haut réalisé dans une bois rouge, ce qui lui donne l’impression de réellement s’enflammer. Retrouvé dans la grotte du Reigandô, ce personnage qui semble soulever une vague derrière lui, épée dans les mains et regard de braises, représente en quelque sorte la manière dont Musashi voyait la voie du sabre.

Photo d'œuvre : autoportrait de Musashi.

L’autoportrait de Musashi ©Nina Le Flohic pour Journal du Japon

C’est ensuite son autoportrait, devenu symbole du musée et de ses années de vie à Kumamoto en général, qui constitue le trésor du musée. Reproduit sur tous les panneaux explicatifs de la ville en lien avec le personnage, c’est également cette œuvre qui orne les tickets d’entrée et autres prospectus. Mentionnons également la présence de son célèbre dessin à l’encre de Chine le « dessin d’une pie-grièche sur un arbre mort » qui est vu comme la représentation de l’imbrication entre la vie et la mort. La deuxième salle présente notamment une série de portraits et des copies du Dokkôdô, avant d’accueillir des expositions temporaires sur le thème des guerriers. Cet été, ce sont les œuvres en lien avec la bataille navale de Dan-no-Ura qui eut lieu en 1185 et marqua la victoire de la famille Minamoto sur les Taira qui étaient à l’honneur. Paravents, rouleaux illustrés, gardes de sabre et estampes à ce sujet agrémentaient agréablement l’espace dédié à Musashi. Avant de sortir, le visiteur traverse un couloir aux murs encombrés de livres qui ont un rapport avec le sabreur. S’y alignent des séries de manga, des romans et des ouvrages historiques de toutes les époques. Devant la série des Vagabond, nous pouvons admirer un original de son auteur, Takehiko Inoue (1967), qu’il a réalisé pour le musée. De quoi ravir tous les fans de ce manga ! À noter que la reprise de cette série – qui constitue une très belle porte d’entrée vers le monde mi-historique et mi-légendaire de Musashi Miyamoto – en pause depuis une dizaine d’année (37 tomes actuellement) vient d’être officiellement annoncée…

Dessin original de Takehiko INOUE représentant Musashi comme héros de Vagabond

Dessin original de Takehiko Inoue ©Nina Le Flohic pour Journal du Japon

S’y rendre : 4 Chome−5−28, Shimasaki, Nishi-ku, Kumamoto-shi, Kumamoto-ken, 860-0073.

Arrêt de bus : Zikei Byouin Mae. Parking gratuit à disposition.

Droits d’entrée tarif plein : 700 yens.

Nous espérons que cette plongée dans 5 lieux – un pour chaque chapitre du Traité des cinq roues – en lien avec le sabreur légendaire aura permis de vous donner un court aperçu des trésors historiques que recèle la ville méridionale de Kumamoto. Ces endroits ne sont que des exemples parmi tant d’autres, mais peut-être constitueront-ils pour certains la porte d’entrée vers un futur voyage dans cette région, comme ce fut le cas pour nous !

Nina Le Flohic

Grande lectrice passionnée par le Japon depuis ma plus tendre enfance, je suis diplômée d'un master Langue, Littérature et Culture Japonaise. Des études au cours desquelles j'ai eu l'occasion d'effectuer des recherches dans le domaine de la littérature japonaise et de voyager plusieurs fois au pays du Soleil Levant. Très heureuse de pouvoir partager avec vous mes coups de cœur et expériences à travers mes articles, n'hésitez pas à me laisser vos questions ou avis en commentaires, j'y répondrais avec plaisir !

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