Kaiji KAWAGUCHI : Une exposition entre « passé et présent »

Pour la première fois en France et en Europe, Kaiji KAWAGUCHI expose ses planches en terre alsacienne. Du 2 mai au 30 juin 2024, les visiteurs auront l’opportunité de voir tout le travail d’un artiste qui a consacré la quasi-totalité de ses ouvrages à l’identité japonaise face aux enjeux de défense et de géopolitique. On doit la mise en place de cet évènement aux organisateurs du Musée Européen du Manga et de l’Animé (le MEMA), censé ouvrir à l’horizon 2027 à Colmar.

À quoi ressemble cette exposition ? Comment le MEMA veut-il convaincre les visiteurs à travers elle ? Quelle histoire Kaiji KAWAGUCHI veut-il raconter au public ? Pour l’occasion, Journal du Japon s’est rendu à l’inauguration de l’exposition temporaire pour avoir les réponses à ces questions et en savoir plus sur un mangaka qui ne manque pas de faire dialoguer le passé et le présent.

L'oeuvre de Kaiji Kawaguchi : exposition

KAWAGUCHI : Les 50 ans de carrière d’un professionnel du manga réaliste

Afin de bien comprendre le choix et la pensée du mangaka, il est important de retracer son histoire. De sa passion « folle du dessin » avec son frère jumeau, en passant par ses périodes de succès, revenons sur la carrière d’un monstre du réalisme.

Kaiji Kawaguchi © Babelio
Kaiji Kawaguchi ©Babelio

Deux frères jumeaux, une passion commune

Trois ans après la Seconde Guerre Mondiale, Kaiji KAWAGUCHI vit le jour le 27 juin 1947 à Onomichi dans la préfecture de Hiroshima. Au fil du temps, sa jeunesse a pris du sens grâce à la bande dessinée. À l’époque, il vouait une admiration pour les ouvrages de mangakas célèbres comme Osamu TEZUKA, qui ont brillé dans les années 50 dans ce domaine. Cependant, Kaiji n’était pas seul à avoir cette passion du dessin : son frère jumeau, Kyuji, la partageait aussi. Durant la conférence donnée lors du vernissage de l’exposition temporaire, l’auteur expliquait que « son frère avait un don pour le dessin« . Durant cette conférence on découvre également l’origine de cet amour pour le dessin : tout part de leur grand père qui adorait le dessin. Alors qu’il était écolier, le mangaka le regardait faire et avait l’impression que tout ce qu’il reproduisait « prenait vie », au point de comparer son crayon à une « baguette magique ».

Néanmoins cette passion commune pour la bande dessinée était mal vue à l’époque, voire censurée chez certaines familles. En effet, celle des KAWAGUCHI interdisait d’en acheter. Heureusement, Kaiji et Kyuji pouvaient trouver leur bonheur dans la librairie de location à des prix dérisoires.

Au moment de rentrer à l’université, le père tenait une entreprise de ravitaillement et demanda à ce que l’un des deux frères reprenne l’affaire familiale. Avec dévouement et sacrifice, Kyuji tira un trait sur son destin de dessinateur et a permis à Keiji de continuer à perpétuer cette passion.

Des débuts difficiles mais un talent prometteur

Alors que les mouvements étudiants font rage dans les années 68, Kaiji traça sa route en créant des histoires s’inscrivant dans le registre « gekiga », une bande dessinée alternative au manga plus adulte et violente. Il publia ses premiers ouvrages dans des magazines comme Young Comic ou Comic Box. Durant les années 70, KAWAGUCHI a réalisé ses premières bandes dessinées en s’intéressant aux faces cachées du Soleil Levant. De ce fait, il rencontra une notoriété notable auprès des forces contestataires étudiantes mais la décennie suivante s’annonça plus compliquée en raison d’une génération de lecteurs japonais qui se détournait de ces récits jugés trop sombres.

Grâce à sa persévérance, KAWAGUCHI trouva une nouvelle source d’inspiration autour des relations tendues entre les deux puissances pacifiques que sont les États-Unis et le Japon. Le jeune mangaka trouva un tremplin de notoriété avec The Silent Service, publié en 1982, qui raconte le désir d’indépendance d’un sous-marin nucléaire construit par les Japonais et Américains. À travers cet ouvrage à succès (30 millions d’exemplaires vendus), KAWAGUCHI voulait avant tout faire réfléchir les lecteurs autour de l’usage de l’arme atomique. The Silent Service a même fait l’objet de débats au parlement japonais où certains le catégorisent parmi les auteurs « révisionnistes ».

Zipang et Spirit Of The Sun : cette réflexion de l’identité japonaise

Avec le succès rencontré par The Silent Service et une notoriété grimpante, le travail de KAWAGUCHI finit par payer avec la remise du prix du manga Kodansha en 1987, 1990 et 2002. Entre 2000 et 2010, il a créé deux séries dont l’esprit se rapprochait du premier : Zipang et Spirit Of The Sun, c’est à dire cette volonté de pousser les générations japonaises à réfléchir sur l’âme de la société nippone.

Zipang et Spirit Of The Sun

Le premier, Zipang, nous ramène à l’époque d’après-guerre avec l’équipage japonaise d’un navire des forces d’auto-défense qui par l’effet de la foudre, se retrouve projetée en 1942, au beau milieu de la bataille de Midway (1942). Comme dans la plupart des ouvrages à orientation géopolitique, KAWAGUCHI voulait pousser ses personnages à faire des choix difficiles. Long de 43 tomes, l’équipage du Mirai a revécu les évènements de la Seconde Guerre Mondiale. Dans le premier tome de Zipang, l’exemple devint flagrant lorsque l’équipage se posa la question de sauver un pilote japonais dont l’avion s’était écrasé à côté d’eux, quitte à modifier le cours de l’histoire, ce qu’ils ont fini par faire pour sauver des vies. Ils refusèrent également de soutenir l’armée japonaise face aux Américains par crainte de modifier l’histoire en profondeur. De plus, pour le commandant de l’équipage, les forces japonaises devaient avant tout conserver cette stratégie d’auto-défense, diffusant ainsi ce message du mangaka : l’armée japonaise d’aujourd’hui est différente de celle des années 40.

Quant à sa seconde série, Spirit Of The Sun, celle-ci se veut de nature apocalyptique en imaginant le Japon frappé par une catastrophe naturelle en 2002. Ce grave incident a coupé le pays en deux : il est administré par la Chine pour le nord et les États-Unis pour le sud du pays. Le plus frappant dans cet ouvrage a été cet écho à des références historiques comme cette gouvernance partagée entre deux états qui pourrait faire penser à la situation des deux Corée aujourd’hui.

Et maintenant ?

Le mangaka a été couronné de prix grâce au succès de ses mangas historiques. D’ailleurs, The Silent Service a même été adapté en série sur la plateforme Amazon Prime. Malgré la maladie, KAWAGUCHI poursuit actuellement sa nouvelle série, Kubo Ibuki, une fiction militaire très réaliste, qui traite des tensions territoriales dans l’Océan Arctique avec les Russes. Là encore, il y a une anticipation imprévue de la situation réelle des tensions géopolitiques qui a pris une direction bien plus tragique entre l’Ukraine et la Russie.

Pour ceux qui suivent également les ouvrages du mangaka, une réédition de Seizon Life a été faite en 2023 par la maison d’édition Panini Manga et reste toujours en vente dans les librairies. Cette fois-ci, KAWAGUCHI a collaboré avec Noboyushi FUKUMOTO. L’auteur est sorti de sa zone de confort en parlant de Monsieur Takeda, papa atteint d’un cancer qui, d’une part, n’a plus que six mois à vivre et, d’autre part, enquête pour rechercher l’assassin de sa fille, disparue 14 ans auparavant. Cette série a l’avantage d’être courte (2 tomes) et se lit très facilement. Les images et le scénario sont en revanche très poignants. L’alliance entre ces eux monstres de la bande-dessinée a permis de produire une série policière pour le moins original et inhabituel de la part de Kaiji KAWAGUCHI.

Echanges inédits avec Kaiji KAWAGUCHI

Pendant la journée d’inauguration, le mangaka s’est prêté exceptionnellement à un échange avec nous où il a pu se livrer sur cette exposition temporaire mais aussi sur quelques unes de ses œuvres. Puis il a donné une conférence sur son travail avec une intéressante cession de dessin.

Les spectateurs de la conférence ont eu le privilège de voir Kaiji KAWAGUCHI dessiner en direct et nous n’étions pas déçu ! En l’espace de quelques minutes, avec quelques coups de crayons et de l’encrage, nous avons vu son personnage peu à peu prendre vie. Une de ses priorités a toujours été de soigner les contours de chaque visage ainsi que de donner des émotions à chaque personnage. Le mangaka a alors terminé son dessin par les pupilles.

Démonstration de dessin de Kaiji KAWAGUCHI
©Leo Thomas pour Journal du Japon

Concernant sa méthode de travail, Kaiji KAWAGUCHI a dit se concentrer tout d’abord sur un sujet puis réfléchir aux répliques. Il a ensuite expliqué durant l’étape suivante comment découper en case l’espace des différentes planches. Ainsi, sur une page, il dit représenter huit planches tout en se posant la question du positionnement des textes. Ce n’est qu’à partir de ce moment-là, que Kaiji a expliqué qu’il débutait l’esquisse graphique pour ensuite terminer par l’encrage. Afin de faciliter la compréhension des personnes présentes dans la salle, il a montré ses planches en comparaison avec le travail de la couleur. Dans ces dernières, des corrections ont été apportées dans le placement du regard pour être plus en adéquation avec les scènes.

Quelques heures auparavant, nous avions également pu, comme nous le disions plus haut, lui poser quelques questions :

Kaiji KAWAGUCHI
Kaiji KAWAGUCHI ©Leo Thomas pour Journal du Japon

Journal du Japon : Merci Monsieur KAWAGUCHI de nous faire l’honneur de répondre à nos questions. Vous venez pour la première fois en Europe et plus particulièrement en France, pourquoi avoir accepté cette invitation du MEMA ?

Kaiji KAWAGUCHI : Ce qui m’intéresse le plus dans ce projet est de voir la manière dont mon travail serait perçu en Europe et à l’étranger.

Quelle histoire voulez-vous raconter aux visiteurs qui viendront voir cette exposition ?

À l’occasion de cette exposition, une centaine de planches y sont exposées. Le principe qui a été établi n’a pas été de choisir à l’échelle de chaque page pour elles-mêmes mais de sélectionner des séquences et en particulier des ensembles de quatre planches qui se suivent. Ce qui fait la caractéristique de la bande dessinée japonaise est l’enchaînement des cases, la façon dont on crée un flux à l’intérieur de la page ou de la double page. J’avais fait cette sélection pour que le visiteur découvre un sens de la progression entre case qui diffère de la bande dessinée européenne, c’est à mon sens l’élément central.

Comment l’appréhendez-vous ?

Mon souhait serait de me glisser dans la peau des gens et de voir de quelle façon ils perçoivent ses planches et d’observer leurs réactions. Je crains également qu’il y ait des signes d’incompréhension de leur part… et que je sois pris d’envie d’aller leur expliquer.

En ce qui concerne Seizon Life, vous avez l’habitude de réaliser des mangas sur le thème de la défense et de la géopolitique, pourquoi êtes-vous sorti de votre zone de confort ?

Cette série découle d’un projet qui m’a été proposé par des éditeurs. J’ai travaillé ce projet avec un autre auteur, Nobuyuki FUKUMOTO qui est scénariste et ça m’intéressait de dessiner un titre en collaboration avec lui.

Est-ce plus difficile de ce consacrer à ce type d’ouvrage ?

Qu’il s’agisse de tensions internationales ou d’autres sujets, pour moi, il n’y a pas de différence. Ce qui m’intéresse le plus est de créer ce suspens qui capture le lecteur. C’est de la même nature que ce soit sur ces sujets d’ordres militaires ou individuels.

En ayant regardé une de vos planches de Spirit Of The Sun, on s’aperçoit qu’il y a des scènes qui ont des références involontaires, est-ce qu’il y a une part de vérité malgré ces récits fictifs ?

Taïwan comme le Japon sont des pays réels. Ce qui est intéressant est, lorsque l’on réfléchit à un récit de fiction, de refléter la situation actuelle de ces pays. Nous avons de toute façon besoin d’avoir ce lien au réel pour mettre en place cette forme de tension. Sans cette fidélité, ce lien au réel, ni tension ou conflit ne peuvent être mis en place.

Pour terminer, en lien avec Zipang, comment avez-vous vu évoluer la société japonaise et ne craignez-vous pas que les fantômes de la Seconde Mondiale viennent de nouveau hanter le pays ?

Pour vous répondre, il faudra remonter à l’époque du Japon d’après-guerre. Le pays a perdu en 1945 et pour nous, cela a été une forme de soulagement. Nos parents ont vécu l’expérience de la guerre. Moi et mon frère sommes nés après cette période mais on sentait quand même ce vécu. Ils étaient excédés par cette réalité. Même si nous n’en en parlions pas on pouvait ressentir leur fatigue. C’est cet état d’esprit qui a permis de créer le Japon tel qu’il existait après la Seconde Guerre Mondiale et que ça a permis d’établir la Constitution pacifique. Aujourd’hui, on se demande s’il faut continuer dans cet axe. Les questions se posent avec une acuité neuve et tout le monde y réfléchit.

De quoi réfléchir en effet. Merci !

Enfin impossible de ne pas parler de l’exposition elle-même et de ceux qui l’ont organisé, le MEMA !

L’exposition : une étape dans la préfiguration du MEMA

Logo MEMA
©MEMA

Le jeudi 2 mai 2024 fut le coup d’envoi de « l’œuvre de Kaiji KAWAGUCHI : un dialogue entre le passé et le présent« . Pendant près de deux mois, 130 planches du mangaka sont exposées à la fois aux Corps de Garde à Colmar et aux Dominicains de Haute-Alsace à Guebwiller. Les organisateurs du MEMA, accompagnés du Centre Européen d’Études Japonaises d’Alsace se sont mobilisés pour créer un évènement qui n’est qu’un avant goût de ce qui sera proposé lors de l’ouverture du Musée dans la ville qui a inspiré MIYAZAKI. Avant cette exposition, le CEEJA s’était illustré à travers une première exposition autour de l’iconique HOKUSAÏ et sa fameuse Grande vague de Kanagawa entre novembre 2022 et mars 2023.

Pour en revenir au projet autour de M. KAWAGUCHI, tout a commencé lorsqu’une délégation du CEEJA s’est rendue en octobre 2023 au Japon et y a rencontré le dessinateur. Grâce à une des mécènes du projet du MEMA, Kaiji KAWAGUCHI s’est montré intéressé par cette initiative et a souhaité en savoir davantage. Quelques mois plus tard, le projet, en coopération avec les Maisons de la Culture du Japon et de l’Alsace à Paris, s’est rapidement concrétisé grâce au soutien des collectivités territoriales (Communauté Européenne d’Alsace, la Région Grand Est ou encore les villes de Colmar et Guebwiller), du ministère de la Culture, de la Japan Airlines et de la Fondation franco-japonaise Sasakawa.

Plus de 130 planches exposées

Dans le cadre de cette exposition, l’auteur a choisi une centaine de planches. Une partie d’entre elles sont des originales et des reproductions pour les autres. Il est plus judicieux de se rendre d’abord sur le site de Guebwiller où le nombre de planches exposées est le plus important et de terminer avec celui de Colmar. Sur ce site d’ailleurs, deux pièces de taille très moyennes ont suffit pour y accrocher une vingtaine de planches. Pour votre information, c’est Kaiji KAWAGUCHI en personne qui a pris le soin de mettre les planches dans les cadres et de les placer. À l’issue de la visite au Corps de Garde de Colmar, une très petite bibliothèque, contenant les mangas de l’auteur, sont à la disposition des visiteurs pour les lire sur place. Quant au site de Guebwiller, le reste des planches s’est invité dans l’église du bâtiment des Dominicains. À la différence de celui de Colmar, la présentation était plus sophistiquée avec plusieurs grands mobiliers noirs.

Exposition temporaire, Haut-Domicains, Guebwiller
©Leo Thomas pour Journal du Japon

En ayant vu l’intégralité des planches exposées, même si le choix s’est avéré « difficile » pour Kaiji KAWAGUCHI, on ressent bien que cette sélection s’est reposée sur la mise en place de 4 planches successives pouvant se lire de droite à gauche ou inversement en fonction du placement de celles-ci. Quelque soit les œuvres, le réalisme en est le fil rouge principal. Les planches de couleur sont d’autant plus saisissantes car on peut observer à quel point chaque détail compte et que tout est fait pour interpeller et questionner le lecteur.

On retiendra par exemple une des planches en couleur de Spirit Of The Sun où l’on voit Tokyo sous les eaux, marquée par un reflet assez réaliste. Au sein de ce décor on remarque également une tour du magasin d’horlogerie dont les aiguilles de l’horloge frontale restent figées à l’heure où s’est produite la catastrophe naturelle.

Pour vous procurer l’entrée pour accéder aux deux sites de Colmar et Guebwiller, il faudra compter 9 euros pour les adultes, 6 euros pour les jeunes/étudiants ou alors 21 euros pour un forfait famille (incluant 2 adultes accompagnateurs et un ou deux enfants âgés entre 10 et 18 ans). L’accès reste gratuit pour les enfants de moins de 10 ans. Aussi, il est également possible de réserver des visites de groupes scolaires (Collège et Lycée) et/ou des visites individuelles via le Pass Culture. Le site de Colmar est assez accessible en train depuis Strasbourg. Cependant, celui de Guebwiller nécessitera une vingtaine de minutes en voiture depuis Colmar, ou une cinquantaine de minutes via les transports en commun.

Entretien avec Catherine Trautmann, Présidente du CEEJA et ancienne Ministre de la Culture

Cette exposition est le fruit d’un travail et d’un développement très appuyé de la part du Centre Européen d’Études Japonaises d’Alsace. Crée en 2001, cette institution a pour but de développer les échanges avec le Japon dans tous les domaines et l’aspect culturel ne fait pas exception. À ce titre, Catherine Trautmann, présidente du CEEJA, ancienne maire de Strasbourg et ancienne Ministre de la culture sous la présidence de Jacques Chirac nous a éclairé sur la portée de cette exposition mais aussi sur sa vision des échanges entre l’Alsace et le Japon :

Catherine Trautmann, présidente du CEEJA et ancienne ministre de la Culture
Catherine Trautmann ©Leo Thomas pour Journal du Japon

Journal du Japon : Bonjour Madame Trautmann et merci de répondre à nos questions. Tout d’abord, pouvez-vous nous expliquer le choix de faire de cette exposition autour des 50 ans de carrière de Kaiji KAWAGUCHI ?

Catherine Trautmann : Le CEEJA a comme projet la réalisation du Musée Européen du Manga et de l’Animé à Colmar. Afin d’annoncer la réalisation de ce musée, nous avons prévu d’avoir plusieurs manifestations de préfiguration. Cette exposition exprime le lien entre le manga et notre projet et avec un très grand artiste. Il est passionnant car il a fait un travail sur des mangas historiques, et notre discussion avec lui portait sur les conseils d’un manga sur l’amitié franco-allemande. Il connaît bien cette période, il est très intrigué par l’histoire de ces pays qui étaient auparavant belligérants et ont décidé de travailler à la construction européenne.

Pourquoi avoir fait le choix de la faire sur deux sites à la fois ?

Cela permet d’avoir la possibilité d’espacer suffisamment d’œuvres sur les 50 ans et de bénéficier d’un cadre international comme celui des Dominicains.

Allez-vous développer d’autres manifestations de ce genre dans les mois à venir ?

On a prévu l’année prochaine une exposition sur TAKAHATA, auteur de dessin d’animation et co-fondateur du Studio Ghibli. J’ai pu voir cette exposition en octobre 2023 au Japon qui est absolument magnifique. C’est tout un travail, le coût est important vis-à-vis du transport des œuvres. Nous voulons surtout attirer l’attention du public sur ce que nous allons faire pour ensuite les fidéliser.

Pensez-vous que les conventions pop-culture mettent suffisamment en avant la culture japonaise tant sur le côté contemporain que sur l’aspect traditionnel ?

L’intérêt du musée du manga est de donner le contexte et la connaissance culturelle nécessaire pour comprendre ce que représente le manga. C’est bien qu’il y ait cette tendance mais on peut aller plus loin et explorer l’art du dessin japonais.

Pourquoi cet intérêt pour le Japon ?

J’ai toujours été intéressée par le Japon. J’étais dans le groupe d’amitié France-Japon au Parlement Européen. Je suis rentrée dans l’art japonais par le cinéma et j’ai découvert le manga lorsque j’étais Ministre de la culture. J’ai pu découvrir cette culture du respect et je suis absolument admirative de la manière dont ils s’intéressent à notre région.

Comment trouvez-vous les relations entre la France et le Japon ?

Je pense que les relations sont bonnes. Elles vont se développer grâce à ce projet. Nous avons signé une coopération avec le musée du manga de Kyoto. Plusieurs personnalités japonaises s’intéressent à ce projet unique en Europe.

Pour terminer, qu’est-ce qui vous fascine dans la culture japonaise ?

J’ai mis du temps à comprendre pourquoi les jeunes avaient cette fascination du manga. Quand on s’y plonge, on se rend compte qu’il y a une façon de traduire les émotions. Ce que je trouve remarquable dans l’art japonais est la délicatesse de certaines œuvres traditionnelles. C’est à la fois la finesse des travaux sur la laque et le bois. Je suis heureuse de découvrir davantage d’artistes grâce au MEMA.

Vous avez encore jusqu’à la fin du mois de juin pour profiter de l’exposition. À travers elle et au-delà de l’aspect technique de chacune de ses planches, Kaiji KAWAGUCHI nous transporte dans son univers rempli d’interrogation sur le devenir d’une société nippone remplie de doutes sur sa stratégie de défense. Cette première mise en bouche de la part du MEMA et du CEEJA n’est que le début d’un long processus qui mènera à l’ouverture du tout premier musée du manga en Europe en 2027. Pour le moment, les collectivités se sont montrées au rendez-vous et espérons que le public le sera aussi.

Si vous êtes intéressés par cette manifestation, vous pouvez payer sur place mais aussi en ligne via le site web du MEMA.

Nous remercions M. Kaiji KAWAGUCHI et Mme Trautmann pour ces rencontres très instructives et pour leur temps.

Leo Thomas

Passionné de la culture japonaise depuis plusieurs années, je fais transpirer cette passion via des articles sur des domaines variés (conventions, traditions, littérature, histoire, témoignages, tourisme).

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