Naruto – Dragon Ball & Sakaguchi : la licence, la com’ et le smartphone

Qui dit Japon dit manga, animation mais aussi inévitablement jeu vidéo. Chaque année, Japan Expo attire de nombreux professionnels de ce milieu. Certains sont des habitués, comme Hiroshi Matsuyama, président de CyberConnect2 venu présenter le dernier jeu Naruto. D’autres moins, tel Masayuki Hirano, au front pour Dragon Ball Xenoverse. Certains viennent en grande pompe, à l’instar d’Hironobu Sakaguchi, invité par Gravity Europe pour nous parler de son prochain Terra Battle, tandis qu’un dernier vient, mais finalement, non. On peut également noter qu’Hideo Baba, le père de la saga des Tales of était de la partie, mais ce tête à tête est une autre histoire.

de gauche à droite : Hiroshi Matsuyama, Masayuki Hirano et Masahiro Kashino, Hironobu Sakaguchi © journaldujapon.com

Quels que soient les étendards brandis, tous n’ont qu’un objectif, la promotion de leur dernier projet. Mais comment promouvoir un énième jeu d’une franchise exploitée jusqu’à la trame ? Les soldats de l’empire Bandai Namco Games ont pour l’occasion déployé le meilleur de leur arsenal, avec plus ou moins de succès. Seul outsider : Hironobu Sakaguchi et son RPG pour Smartphone, une occasion pour nous d’aborder cette plate-forme en plein essor.

Naruto, le général chevronné

Si Hiroshi Matsuyama et Masayuki Hirano se retrouvent sous les mêmes bannières, leurs champions, eux, sont rivaux. Naruto contre Dragon Ball. Deux licences très largement usitées, au point qu’on perd le compte du nombre de volets, et nous ne sommes pas les seuls : « cela fait 13 ans que nous développons ces jeux, affirme Matsuyama au sujet de Naruto Shippuden : Ultimate Ninja Storm Revolution, alors ça doit être le treizième ou le quatorzième. »

Avec un peu moins de deux millions d’exemplaires du précédent volet écoulés, la pression est grande et les innovations se doivent d’être marquantes. Rompu à cet exercice, Hiroshi Matsuyama se lance sans hésiter : « il est très rare de voir une suite avoir autant de succès. Nous voulons offrir aux joueurs un jeu d’une qualité supérieure, c’est pourquoi nous avons décidé de retravailler notre système de combat. Nous voulons attirer les personnes que le dernier avait précédemment rebuté, comme les joueurs un peu plus hardcore dans les jeux de combat, et leur offrir la profondeur de gameplay qu’ils cherchent. Il y sera possible de découvrir le background de l’Akatsuki, ou encore d’Itachi et de Shisui Uchiwa. Ces éléments d’histoire n’ont jamais été abordé dans le manga ou l’anime, et permettront aux fans d’enfin savoir ce qu’il s’est vraiment passé. »

La quantité de personnages jouables en a également profité pour faire un bond, dépassant allègrement la centaine. « Comme vous pouvez vous en douter, c’était très difficile à gérer. Nous avons demandé de l’aide à des spécialistes externes au studio. Grâce à leur aide et à leurs conseils, nous sommes sûrs que le jeu est bien équilibré dans son ensemble. Nous avons fait tellement d’ajustements que nous avons beaucoup inquiété nos investisseurs, qui se demandaient si nous arriverions à finir le jeu à temps. Nous l’avons fait et nous sommes très fiers du résultat. »

Hiroshi Matsuyama © journaldujapon.com

On trouve notamment Mécha-Naruto, développé spécialement pour l’occasion. « Au début, nous avions pensé choisir un personnage de l’entourage du clan Uchiwa, ou issu du passé d’Obito. Mais quand nous en avons parlé avec Masashi Kishimoto, l’auteur du manga : il nous a expliqué que cela pourrait limiter la légitimité de ce personnage auprès des fans. Il voulait créer quelque chose qui aurait plus d’impact, qui serait plus facile à comprendre. C’est ainsi qu’est né Mécha-Naruto. »

Dragon Ball, le soldat blessé

Aux mêmes questions, Masayuki Hirano se montre beaucoup plus prudent quand il s’agit de vanter les mérites de Dragon Ball Xenoverse. Il faut dire qu’après l’échec de Battle of Z, il est évident que Dimps avance en terrain miné, même si le producteur s’empresse de rappeler que « le développement de Xenoverse a commencé il y a deux ans et demi, et n’a pas été développé par le même studio. Cet opus sera le premier compatible Playstation 4 et Xbox One. »

« Nous y changeons énormément de choses, en y introduisant de nouvelles intrigues ainsi que de nombreuses choses qui n’ont pas encore été révélées. Les précédents jeux de la licence étaient tous les mêmes, étant donné que la série est terminée depuis longtemps. Nous nous focalisons sur de nouveaux éléments, c’est un vrai défi ! Pour ce qui est du système de combat, la plupart des Dragon Ball partent de zéro et créent chacun quelque chose de nouveau, sauf dans le cas des Budokai où il était amélioré au fur et à mesure que les jeux sortaient. Pour Xenoverse, nous nous sommes affairés à rendre les combats plus dynamiques. Par exemple, pendant les attaques spéciales, des Quick Time Events donneront une chance aux joueurs qui la subissent de l’esquiver ! »

Masayuki Hirano © journaldujapon.com

Au delà de cela ? Pas grand chose, ou plutôt, beaucoup de choses, mais qui « ne peuvent pas être révélées pour le moment. » Quand on compare la différence d’avancement entre Naruto Shippuden Ultimate Ninja Storm Revolution et Dragon Ball Xenoverse, l’écart est tangible : d’un côté, un discours rôdé, tout en détails et anecdotes, de l’autre, pléthore d’éléments dont on ne peut pas parler. Sans doute ne sont-ils pas finalisés ou alors soumis à un accord de non-divulgation. Toujours est-il que cette absence de contenu à dévoiler est source d’interrogations quant à la pertinence de ce genre de promotion, largement en amont, pour un jeu dont la date de sortie est suffisamment éloignée pour se résumer à une simple année : 2015.

Terra Battle, l’éclaireur

En fin de table ronde, Hiroshi Matsuyama trouve le temps de se fendre d’une petite digression sur un jeu pour smartphone développé par son studio quelques années auparavant, Guilty Dragon : « C’était très déroutant et nous ne savions pas ce qui était à faire et ce qui ne l’était pas. Il y avait beaucoup de choses à apprendre mais nous nous en sommes sortis, et cela fait maintenant deux ans que le jeu est disponible. Nous en sommes ravis, et nous espérons avoir de nouveau l’occasion de travailler pour cette plate-forme. »

© MISTWALKER CORPORATION

En pleine montée en puissance depuis quelques années, nos téléphones n’en finissent plus d’accueillir de nouvelles applications. C’est d’ailleurs sur ce support que le créateur de Final Fantasy, Hironobu Sakaguchi, a développé son dernier projet en date, Terra Battle via sa société Mistwalker. Il constitue une collaboration entre plusieurs artistes, dont Nobuo Uematsu qui a composé pour l’occasion des thèmes durant jusqu’à quatre minutes, chose assez rare. On retrouve à ses côtés des figures récurrentes, telles que Hideo Minaba, chara-designer avec lequel il travaille depuis Final Fantasy, ou Kimihiko Fujisaka.

Pour cet homme qui a vu apparaître la Famicom, la Super Famicom, puis des générations de consoles et d’ordinateurs toujours plus puissants, ce marché a été une surprise. « Je pense que l’évolution se poursuivrait dans la même direction, avec des plate-formes de plus en plus performantes. Et d’un coup, on a vu arriver les smartphones. C’est un peu comme si le Jeu Vidéo était un gros tronc d’arbre qui monte et que d’un coup, au beau milieu, une branche était sortie de nulle part ! Cela nous a permis de reconsidérer nos idées et de voir apparaître de nouveaux modèles, comme le Free to Play. Le fait que tout soit dématérialisé permet de fournir quelque chose qui n’est pas définitif, qui change au fil des mises à jour. On peut étendre un jeu sur la longueur, ce qui était impossible avant, avec une cartouche ou un CD. C’est une évolution qui me plaît. »

Un autre aspect de l’Android/iPhone est que cela nécessite beaucoup moins de monde que les grosses consoles. Ce qu’Hironobu Sakaguchi trouve très agréable : « j’ai l’impression de revenir à l’époque du premier Final Fantasy, où nous avions commencé le développement à quatre, avant que le jeu ne prenne de l’ampleur et que nous ne soyons dix. Avec le smartphone, c’est un peu la même ambiance. On fait ça dans notre coin, avec notre petite équipe de sept, huit personnes et la communication est bien plus directe, la progression plus dynamique et l’environnement beaucoup plus agréable. »

Hironobu Sakaguchi © journaldujapon.com

En pratique, cela ne révolutionnera pas pour autant le genre du J-RPG, et le président du studio Mistwalker le sait très bien. « La façon de raconter une histoire ou même son contenu change finalement peu. Terra Battle aura un vrai scénario, je ne pense pas qu’on perde au change sur ce plan. Mais il faut néanmoins réfléchir à ce qu’apporte le smartphone et je me demande comment attirer les joueurs vers ce scénario, comment utiliser au mieux les spécificités de ces machines pour optimiser la narration. Par exemple, lorsqu’on terminait un jeu, avant, il fallait attendre une suite, éventuellement. Nous avons maintenant la possibilité de dépasser cela. De plus, avec un gameplay plus dynamique et des parties plus courtes, nous pouvons faire avancer le jeu différemment et proposer une diversité difficile à atteindre avec un jeu déjà bouclé, pétrifié par son unité. Dans le cas présent, on peut réaliser une collaboration pour de nouveaux éléments que l’on peut ensuite implémenter par le biais d’une simple mise à jour. À terme, le but serait, si nous arrivons à aller jusqu’au bout, de sortir la version complète sur console. »

S’ils abordent chacun le marché vidéoludique sous un angle différent, ces trois licences se doivent d’avancer avec précaution en territoire ennemi. Naruto Shippuden Ultimate Ninja Storm Revolution, qui sortira le 12 septembre, se doit de garder la tête haute, tel un shogun, et de se montrer digne de ses prédécesseurs, voire même supérieur à eux. Dragon Ball Xenoverse, en rônin désavoué, se doit de faire ses preuves en évitant les écueils qui ont fait le déshonneur de ses ancêtres. La réponse ne devrait cependant pas arriver avant 2015. Enfin vient Terra Battle, qui avance tel un éclaireur en terre inconnue. Septembre nous dira s’il en reviendra en vie !

Plus d’informations sur l’ensemble de ces projets sur les sites de Namco Bandai et de Mistwalker.

Remerciements à Hiroshi Matsuyama, Masayuki Hirano, Hironobu Sakaguchi et leurs interprètes respectifs, ainsi qu’à Bandai Namco Games et Gravity Europe.
Crédit photo : © journaldujapon.com

Jean-Baptiste Bondis et Paul Ozouf

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