Girls Last Tour : promenade après la fin du monde

Imaginez que la Terre ait été ravagée par une, voire plusieurs, guerres terriblement meurtrières et dévastatrices. Toute forme de vie aurait presque complètement disparue, ne laissant que d’immenses villes vides et mystérieuses. Et vous êtes là, dans ce monde vaste et silencieux. Comment serait votre vie ? Bienvenue dans Girls Last Tour, ou le quotidien de Chito et Yuuri, qui continuent d’évoluer dans ce monde post-apocalyptique à bord de leur chenillette.

Girls Last Tour

Vagabonder après la fin du monde

La couverture du volume 2 du manga.

Girls Last Tour est une série de douze épisodes de 24 minutes diffusée en fin d’année 2017 et disponible en France sur la plateforme Wakanim. C’est le studio White Fox qui fut en charge de la production de l’animation, ce qui présage du bon étant donné la qualité visuelle de la majorité de ses précédentes productions (Steins;Gate, Katanagatari, Gochuumon wa Usagi desu ka? ou plus récemment Re:Zero). Quant à son origine, il s’agit de l’adaptation d’un manga écrit et dessiné par Tsukumizu dans le magazine Kurage Bunch. Sa publication vient d’ailleurs de s’achever tout récemment, le 12 janvier 2018 pour être exact, après 4 ans et un total de six volumes. Détail toujours intéressant, on notera que l’auteure du manga s’est personnellement impliquée dans la production de l’anime, dont elle a supervisé l’écriture, travaillant même à l’animation de l’ending. Pour les plus curieux, sachez qu’elle possède également un compte Twitter sur lequel elle partage régulièrement des illustrations, ainsi qu’un Tumblr sur lequel elle poste occasionnellement de courtes animations.

Chito et Yuuri

Mais entrons plutôt dans le vif du sujet : l’histoire. Eh bien en fait, ici on peut dire qu’il n’y en a pas réellement. On suit simplement Chito et Yuuri, deux amies qui vagabondent dans un monde ravagé par des guerres. Ainsi, il n’y a presque plus aucune forme de vie : c’est à peine si elles croisent la route d’un poisson. Elles évoluent donc dans d’immenses villes, composées de multiples étages, de bâtiments abandonnés, anciens et mystérieux. Les descriptions sont vagues et pour cause : la série est très avare en détails. À aucun moment il n’est indiqué où se trouvent nos héroïnes, ni depuis combien de temps elles errent dans ce monde. On ignore donc tout des guerres qui ont détruit ce monde. Mais cette absence de repère donne un aspect intemporel à l’univers, comme s’il était réellement figé dans le temps. Ou qu’il était mort. Un effet renforcé par le fait que la série semble se dérouler en hiver.

C’est dans cet environnement sans vie que continuent de vivre nos protagonistes. Fi donc de la fin du monde et de ces guerres, ici on suit simplement leur quotidien dans ce monde désolé. Résumé ainsi, cela ne prête pas vraiment à la joie, et pourtant le titre baigne dans une ambiance assez positive, essentiellement portée par Yuuri. Celle-ci est l’insouciante du duo, doublé d’un ventre sur patte. Deux caractéristiques qui ont tendance à agacer Chito, bien plus sérieuse et réservée. Deux personnages que tout oppose, ce qui les rend d’autant plus complémentaires, l’alchimie entre elles fonctionnant très bien. Au fil des épisodes, elles se promèneront dans cet environnement si particulier et feront diverses trouvailles, allant de la simple source d’eau chaude (permettant de prendre un bain chaud, luxe rare) aux réserves de vivres militaires. Parfois elles feront aussi des rencontres, car elles ne sont pas (encore ?) seules dans ce vaste monde ravagé.

Une des illustrations réalisées par Tsukumizu lors de la diffusion de la série, ici pour le troisième épisode.

Monde gris, monde joli

Girls Last TourCe monde, justement, est brillamment représenté dans l’anime avec un minimalisme prononcé. Les décors ne sont pas particulièrement séduisants, au contraire même puisqu’ils sont majoritairement constitués de villes ou de bâtiments sombres. La colorisation de la série tourne d’ailleurs essentiellement autour du gris, et seuls quelques rares éléments viennent briser cette monotonie (les cheveux blonds de Yuuri ou l’uniforme vert des deux jeunes filles). Cela n’empêche pas quelques belles scènes contemplatives, notamment avec des jeux de lumières durant la nuit. Surtout, c’est une ambiance qui se dégage de ces décors grisâtres et inoccupés. On ressent bien l’aspect « monde abandonné » avec des bâtiments qui sont victimes des ravages du temps. L’univers sonore est lui aussi très minimaliste, souvent composé du bruit du vent, de l’eau qui goutte ou de sons, voire grondements, métalliques. L’isolement et la solitude de notre duo n’en est que plus forte.

La série bénéfice d’ailleurs d’une jolie bande originale, composée par Kenichiro SUEHIRO, que vous avez peut-être déjà entendu sur Space Patrol Luluco ou Re:Zero. Dotée de nombreux thèmes aussi doux que beaux, elle apporte de la douceur à cet univers sombre, collant davantage à la candeur de nos jeunes protagonistes. On notera également les deux chansons « Endless Journey » et « Amadare no Uta« , elles aussi très jolies et particulièrement bien utilisées dans leurs scènes spécifiques (et en particulier la seconde qui reprend le bruit de la pluie tombant sur divers objets métalliques). Elles sont toutes deux chantées par Inori Minase et Yurika Kubo, les seiyuus respectives de Chito et Yuuri, qui sont aussi à l’œuvre pour l’opening « Ugoku, Ugoku » et l’ending « More One Night« , là encore très sympathiques.

Un monde fini mais une vie qui continue

Entre son monde qui est littéralement mort et ses héroïnes qui continuent d’y errer avec candeur, Girls Last Tour propose une histoire tout à fait singulière. Une dualité qui pourrait rappeler le Made in Abyss de l’été dernier, où l’on trouvait également un duo de protagonistes innocents évoluant dans un monde dur et cruel. S’il n’est pas aussi dangereux, celui de Girls Last Tour n’en est pas moins froid. Et pourtant, cela n’empêche pas Chito et Yuuri de poursuivre leur vie, avec une complicité vivifiante. Plutôt que d’errer dans ce vaste monde, elles semblent davantage s’y promener, découvrant de nouvelles choses, comme un poisson ou une usine de rations alimentaires. Chaque découverte, chaque trouvaille, constitue un petit évènement et amène son lot d’interrogations (« comment cela fonctionne-t-il ? », « est-ce que ça se mange ? »). Même les situations les plus banales peuvent devenir uniques, comme quand nos héroïnes jouent avec le bruit de la pluie sur des objets en métal. Il y a aussi, parfois, des rencontres avec d’autres personnages qui continuent eux aussi de vivre à leur manière. L’un fait des cartes, une autre construit un avion. Leurs chemins croisent celui des deux jeunes filles puis se séparent et chacun continue sa route.

La vie de nos jeunes protagonistes est ainsi parsemée de ces petits évènements. La plupart ne leur apportent rien d’un point de vue pratique. Et même ceux qui fourniraient par exemple des vivres ou de l’eau deviennent notables uniquement par ce que vivent Chito et Yuuri. En réalité, le véritable intérêt de chacun de ces moments réside dans l’expérience qu’en font les personnages, les réflexions que cela amène, les souvenirs que cela crée. Et c’est justement en vivant ces moments que l’on peut se dire qu’elles sont vraiment en vie.

 

Girls Last Tour possède un fond mélancolique omniprésent. Aucun avenir n’est promis à ses personnages, leur monde n’existe plus et ils n’ont plus qu’à errer dans ce qu’il en reste. Et pourtant, il règne une ambiance positive entre les personnages. Sur leur chenillette, elles se promènent dans ces paysages délabrés et se font des souvenirs au fil de leurs découvertes et de leurs rencontres. Même si le monde a cessé de vivre, tant que nos héroïnes seront ensembles, elles pourront continuer de vagabonder au gré de leurs envies. Le fond du titre n’est donc peut-être pas très joyeux, mais il semble néanmoins véhiculer un message bien plus positif qu’on ne pourrait le croire. Car même après la fin du monde, il est toujours possible de continuer à vivre de bons moments.

Alors, vous aussi, démarrez votre chenillette et partez pour votre dernier tour !

Léonard Fougère

Étudiant passionné par l'animation japonaise et la culture manga, et particulièrement amateur de séries "tranche de vie" (encore plus ceux à tendance moe !). J'espère pouvoir vous partager quelques uns de mes coups de coeur avec mes articles !

3 réponses

  1. 3 mars 2019

    […] Et pour ceux qui souhaiteraient en apprendre davantage sur la série, j’en avais parlé sur Journal du Japon l’année dernière […]

  2. 16 mars 2020

    […] de l’animation dans son ensemble. Une place qu’elle avait déjà occupé sur l’excellent Girls Last Tour, du même […]

  3. 2 août 2020

    […] Et pour ceux qui souhaiteraient en apprendre davantage sur la série, j’en avais parlé sur Journal du Japon l’année dernière […]

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