Macross Plus : Take my breath away !
Grande licence de la SF animée depuis les années 80′, Macross revient enfin en France en vidéo chez AllTheAnime avec l’édition en HD de Macross Plus, chef-d’oeuvre de 1994. L’occasion de revenir sur la saga Macross et sur cet épisode qui nous a tant fait vibrer. Avions transformables en robots, triangle amoureux et musique ! Take my breath away !
Macross Plus ! Un nom qui fait encore vibrer les adolescents de la fin des années 90. Ceux qui, après avoir grandi en regardant leurs premiers animés devant La Cinq ou le Club Dorothée, ont pu saisir l’étendu des possibilités offertes par ce médium notamment avec les VHS de la collection Manga Mania. La série d’OAV Macross Plus y occupait une place de choix, par son statut d’héritière de la série originelle Macross (et de son ersatz occidental Robotech), mais plus encore grâce à sa formidable qualité technique et à son ton plus adulte.

Super Dimension Fortress Macross
Un jalon de la SF animée
Mais replaçons un peu la série dans le contexte de l’époque : il fut un temps où la France était un territoire acquis à Macross et où Gundam n’avait pas encore droit de cité. Mais depuis, les choses ont bien changé et les questions de droits ont longtemps bloqué le retour de Macross en occident. Si la sortie de la série originale, diffusée à l’époque dans une version remaniée avec 2 autres séries, est loin d’être réglée, la situation a enfin évolué et les autres itérations de l’auguste franchise devraient enfin pouvoir se frayer un chemin jusque chez nous. Au format physique, c’est à AllTheAnime que revient l’honneur d’accompagner ce retour. Macross Plus ouvre le bal. Un choix des plus heureux tant cette série d’OAV de 1994, éditée chez nous en VHS puis DVD, a marqué toute une génération ! Sortie 10 ans après la série originale et le long métrage Do You Remember Love, elle a permis au créateur de Macross, Shôji Kawamori, de faire évoluer son concept vers un public plus adulte, tant dans le ton et les thématiques que dans le style. Une réussite rendue possible par la naissance d’une équipe exceptionnelle qui allait rapidement marquer son époque.

La recette Macross
Mais qu’est-ce que la saga Macross au juste ? Le style Macross est caractérisé par la fusion – au premier abord incongrue – de 3 éléments : la Valkyrie – avion transformable en robot -, le triangle amoureux (et plus largement la romance), et enfin l’importance de la musique dans la diégèse de la série. Cette présence musicale passe généralement par la présence d’une pop star (souvent une idole, mais pas que …) dont le chant a généralement une influence capitale sur le déroulé des événements.
Le titre complet de la série originale, Super Dimension Fortress Macross, fait référence au déclencheur de l’histoire : un gigantesque vaisseau spatial extraterrestre échoué sur Terre lors de l’introduction. Bien que vide, il témoigne de l’existence d’extraterrestres à la technologie particulièrement avancée et d’une taille gigantesque. S’ensuit une guerre mondiale d’unification des nations du globe et un bond technologique pour l’humanité qui adapte cette véritable forteresse spatiale et s’en inspire pour créer un nouveau type d’avions de chasse spatiaux transformables : la fameuse Valkyrie, emblème de la série. Bond temporel quelques années plus tard avec l’apparition d’une flotte extraterrestre, celle des Zentradiens, peuple d’humanoïdes géants dont l’existence-même n’est tournée que vers un seul et unique but : la guerre. A la recherche de la forteresse spatiale, baptisée Macross, ils projettent ainsi l’espèce humaine, dont une partie s’est réfugiée à bord du vaisseau, dans un conflit à l’échelle du système solaire.

Déroulant le parcours de l’humanité en lutte à bord du Macross, le récit va plus particulièrement se concentrer sur un groupe de pilotes de Valkyries, Hikaru Ichijô (Rick Hunter en version Française et Américaine), Roy Focker et Max Jenius. Tout au long de la série, on va suivre leurs combats, mais aussi leurs amours, et tout particulièrement ceux de Rick dont le cœur balance entre Lynn Minmay , jeune idole de la chanson, et le Lieutenant Misa Hayase (mais qu’est-ce qu’il y connaît aux femmes, Rick Hunter ? Réponse : rien ! NDR : oui, j’ai précisé le nom occidental de Hikaru uniquement pour placer cette référence à La Cité de la Peur ! ARREST ME !! ). Mais au moins autant, voire plus, que les exploits militaires, c’est finalement le choc des cultures qui sera la clé de la paix entre les deux espèces (les Zentradiens étant totalement décontenancés par la culture humaine, les loisirs et les relations amoureuses notamment), via plus particulièrement le chant de Minmay.

Influence sur la Pop culture
Ce mélange surprenant fera date dans le monde au même titre que Gundam quelques années auparavant : ainsi, si c’est à Gundam que l’on doit le titre du célèbre Newtype, magazine nippon consacré à l’animation, Macross est lui à l’origine de Protoculture Addict, un des premiers magazines d’importance consacrés à l’animation et au manga du continent nord américain, publié au Canada de 1987 à 2008. Naquit ainsi une de ces rivalités légendaires qui jalonnent la pop culture : l’Angleterre avait les Beatles vs Les Rolling Stones et Oasis vs Blur, le Japon aura Gundam vs Macross ! Mais au delà de l’anecdote, c’est aussi grâce à son style révolutionnaire que la série marquera le monde de la japanimation. On évoquait d’ailleurs brièvement son influence en octobre dernier lors de la réédition de Gurren Lagann : que ce soit le SDF-1, la Valkyrie transformable ou Minmay au niveau thématique. Mais c’est avant tout sa mise en scène qui laissera une trace durable. Car Macross est une véritable œuvre de passion, réalisée par de jeunes animateurs plein de fougue et d’ambition. Et c’est avec une volonté de s’éloigner de la mise en scène classique des batailles entre robots de Gundam pour lui apporter un dynamisme inédit que ses créateurs ont abordé sa réalisation. Oublié, le classique champ-contrechamp ! On privilégie ici d’impressionnants plans séquences à grande vitesse, souvent noyés par un déluge de missiles virevoltants, grâce notamment à un animateur de génie, Ichirô Itano, dont le nom passera ainsi à la postérité avec ce qui allait être baptisé « Itano Circus » (voir notre article sur le sakuga). Une figure de style qui atteindra justement son paroxysme dans Macross Plus.




Ceux qui ont vu Otaku no Video, l’oav mi-parodie mi-témoignage produite par Gainax en 1991 sur la culture otaku des années 80, se souviennent certainement des références à Macross qui la parsème, ce qui est assez cocasse, sachant qu’une partie des fondateurs du studio Gainax ont justement travaillé sur Macross, notamment Hideaki Anno en tant qu’animateur-clé, un poste qu’il occupera à nouveau sur Macross Plus.
Macross Plus : Highway to the danger zone !
Deux suites pour le prix d’une …
Si Macross reste une œuvre collective, c’est généralement Shôji Kawamori qui en est considéré comme le principal auteur, en tant que créateur du concept même de Valkyrie (il officiait sur la série en tant que créateur de l’histoire et du concept, story-boarder, mecha-designer …). Nos équipes avaient d’ailleurs interviewé ce génie du mécha-design à l’incroyable CV à deux reprises, en 2013 et 2017.
10 ans après le film accompagnant la série originale (Do You Remember Love), et 2 ans après une suite directe (Macross II : Lovers Again) à laquelle il n’avait pas participé, Kawamori accepte de donner suite à la saga et de revisiter sa création. Il décide de le faire d’une manière peu orthodoxe et même surprenante, en menant simultanément de front 2 projets aux antipodes : une série télé au style qu’il qualifie de plus « manga » avec Macross 7, et une série de 4 OAV qu’il considère comme plus « réaliste », adulte et cinématographique avec Macross Plus. Il réalisera les 2 qui seront chacune produite par un studio différent avec un staff (et donc un style et un design) différent.


Si Macross 7 n’hésite pas à en effet à pousser le curseur du surréalisme assez loin avec jubilation (un rocker pacifiste au grand cœur y entreprend de faire taire les conflits grâce à sa musique, n’hésitant pas à s’interposer au milieu de chaque champ de bataille, aux commandes de sa Valkyrie rouge pétante), Macross Plus nous amène clairement en terrain hollywoodien, avec notamment Top Gun dans sa ligne de mire. L’histoire quitte le domaine habituel des conflits interstellaires pour une compétition entre deux pilotes d’essais sur fond d’émergence de l’intelligence artificielle. Et au cœur de l’intrigue : toujours un triangle amoureux, plus adulte cette fois. Un programme plus intime mais très ambitieux pour un anime grand public qui s’éloigne des canons commerciaux habituels, servi par une réalisation soignée au maximum et une production des plus luxueuses.
Un triangle amoureux plus adulte

©1994 BIGWEST/MACROSS PLUS PROJECT
Amis d’enfance séparés dans des circonstances troubles suite à un événement qui a brisé leur trio, Isamu, Guld et Myung se retrouvent par hasard 7 ans après sur leur planète natale, Eden. Isamu et Guld, passionnés d’aviation depuis leur prime jeunesse, sont devenus pilotes d’essais à la base de New Edwards où ils s’affrontent dans une compétition pour déterminer le nouveau modèle de Valkyrie de l’armée. Myung, qui ambitionnait d’être chanteuse, est de retour sur Eden en tant que productrice de Sharon Apple, une intelligence artificielle, idole virtuelle la plus populaire de la galaxie. Les rancœurs du passé vont très rapidement rejaillir et teinter les rivalités du présent, dans les airs comme en amour …

C’est donc avec des personnages plus adultes et un ton plus mature que Kawamori choisit de revenir à Macross. Le trio de personnages ne correspond pas vraiment aux canons des héros des séries d’animation destinées à la jeunesse. Ils ont tous trois un lourd passé, des rêves partiellement accomplis, des espoirs déçus, et surtout des personnalités qui font d’eux des anti-héros complexes. Isamu, est un héro flamboyant et casse-cou, pilote de génie, mais terriblement égoïste et inconséquent qui ne pense qu’à une chose : voler. Guld, est posé, intelligent et responsable, mais doit constamment lutter contre la colère et les instincts violents hérités de son ascendance zentradienne. Myung enfin est une femme indépendante et qui semble avoir réussie sa vie professionnelle, mais est hantée par ses rêves d’artiste abandonnés et par les fantômes des traumatismes passés. Tous se sont construits des carapaces (sauf peut-être Isamu, qui n’est qu’impulsion) qui ne demandent qu’à se lézarder, et c’est bien là le sujet central de Macross Plus : la catharsis de ce trio d’anciens amis.
Des dogfights époustouflants

Décrit comme cela, on s’attend plus à un mélodrame qu’à un anime de science-fiction, et pourtant, ce triangle amoureux est parfaitement imbriqué – voire fondu – dans les 2 autres grandes composantes de l’histoire. En effet, si ce triangle est le cœur émotionnel de l’histoire, le centre du récit reste bien l’affrontement entre Isamu et Guld. Une compétition entre pilotes d’essai que la rivalité amoureuse et les rancœurs déjà évoquées vont porter à un point d’incandescence qui explose dans les séquences de vol. Des combats aériens et affrontements de robots – c’est l’avantage de la « transformabilité » de la Valkyrie que de permettre cette articulation – d’une formidable maestria et qui, loin d’être des séquences gratuites parachutées ça et là uniquement pour le plaisir du spectateur, vont constituer les moments d’articulation du récit. C’est là que se jouent l’exacerbation des tensions puis la catharsis et la résolution des conflits entre Isamu et Guld. C’est justement ce qui rend Macross Plus si jouissif et impliquant pour le spectateur.
Une idole virtuelle

©1994 BIGWEST/MACROSS PLUS PROJECT
Triangle amoureux : OK. Valkyries transformables et séquences de combat : OK. Mais quid de l’élément musical, troisième dimension indissociable de tout opus de la saga Macross ? Elle est bien présente et constitue même le catalyseur de cet épisode, le liant de la formule Macross Plus, tant thématiquement que techniquement ! Le premier épisode s’ouvre sur un flash back profondément nostalgique présentant les trois amis dans leur prime jeunesse ; une séquence de vol amateur d’Isamu portée par la chanson Voices, belle et simple, que l’on découvrira interprétée par Myung. Par la suite, c’est la musique de Sharon Apple qui va prendre le relais et imprimer en partie son rythme et son style aux épisodes, notamment lors de 2 séquences de concerts des plus impressionnantes.

Mais qui est Sharon Apple ? Une idole virtuelle, la plus grande star de la galaxie, dont la musique exerce une fascination quasi-hypnotique sur son public. Mais le lien entre Myung et Sharon est plus complexe qu’il n’y parait, de même que la technologie qui donne vie à cette dernière… Sa prise d’indépendance, et le développement d’une soudaine obsession pour Isamu, va alors provoquer l’embrasement des conflits de notre triangle amoureux, au risque de semer la mort et la destruction. Car en parallèle, un projet militaire de drone de chasse, développé en secret par l’armée pour éjecter les Valkyries pilotées par l’être humain, menace également de mettre en péril le programme dont font partie Isamu et Guld, et par la même leur raison de voler, et de vivre…
De manière surprenante, cette thématique de l’idole virtuelle, de l’intelligence artificielle générative et des drones de combat raisonne aujourd’hui d’une manière toute particulière, soulignant le soin d’écriture et l’acuité de Shôji Kawamori et de son équipe.
Enfin, impossible de ne pas aborder la musique de Sharon Apple en elle-même, composée par Yôko Kanno et qui tranche radicalement avec la pop de Minmay du Macross originel (à laquelle est adressée un petit clin d’oeil lors d’une scène de karaoke). Elle concourt totalement au ton plus adulte de la série d’OAV. Kanno y livre une musique de club matinée d’électro, de funk, de world music, voire de trip-hop. Les séquences de concert en elles-mêmes fonctionnent comme des clips psychédéliques et sensuels qui ne dépareilleraient pas projetés en club. Une musique très sophistiquée donc, à laquelle s’ajoute une partition classique grandiose de Yôko Kanno qui transforme Macross Plus en un véritable opéra.

C’est donc ce parfait alliage des 3 éléments caractéristiques de la série qui fait de Macross Plus une des plus belles réussites de la saga en même temps qu’un des grands animes des années 90. Non pas la simple nécessité de remplir artificiellement un cahier des charges pour livrer une bête suite de franchise, mais le résultat d’une alchimie rare entre les différents membres d’une équipe qui faisait ici ses premières armes.

Take my breath away : une équipe de rêve pour une œuvre matrice
Kawamori n’a accepté de revenir à la franchise Macross que s’il pouvait ne pas se répéter et amener la formule sur un autre terrain. Pour réussir ce pari avec Macross Plus, il va voir les choses en grand.
Push it to the limit

Beaucoup de choses changent par rapport à la série originelle produite par le studio Nue, à commencer par le studio (Triangle Staff, tandis que Ashi Production s’occupe de Macross 7). Le design qui se démarque fortement revient à Masayuki, déjà à ce poste sur Megalopolis, la cité du démon (fascinante série d’OAV d’horreur ésotérique situé dans le Japon de l’ère Taisho et qui gagnerait aussi à être rééditée). Par la suite, il épaulera Hideaki Anno à la réalisation des 3 premiers Rebuild of Evangelion. Ce design est le premier marqueur de la dimension plus adulte de l’OAV.
Si une partie de l’équipe d’animateurs ayant travaillés sur la première série et le film sont de retour, à commencer bien évidemment par Ichiro Itano dont la contribution avait déjà été déterminante dans la construction de l’identité visuelle de Macross, il intègre en tant que réalisateur un nouveau venu, Shinichirô Watanabe, avec qui il avait travaillé sur Gundam 0083. Si Kawamori supervise l’ensemble de la série, en terme de découpage il se concentre plus particulièrement sur les scènes de combat aérien et laisse le reste à Watanabe. (à ce sujet, voir l’interview de Shôji Kawamori sur le site FullFrontalMoe ). C’est un premier poste d’une telle ampleur pour Watanabe qui allait rapidement devenir un réalisateur incontournable, créateur de séries marquantes avec notamment Cowboy Bebop, Samourai Champloo …

Kawamori va même emmener les principaux membres de son équipe en voyage de repérage aux Etats-Unis et notamment à la base d’Edwards. Un voyage qui servira non seulement d’inspiration à Katsufumi Hariu pour les différents décors, mais aussi aux animateurs pour les séquences de vol. Ichirô Itano revient d’ailleurs en détail sur ce voyage dans une longue et passionnante interview présentée en bonus dans le Blu ray. L’animateur a pu y expérimenter directement les sensations ressenties en vol, encaisser les G, se rendre compte de la vision du pilote depuis le cockpit en combat aérien. Au delà de la grande qualité technique de l’animation de la série (d’une rapidité et d’une fluidité incroyable), cette expérience inestimable se ressent totalement dans les séquences de vol hyper dynamiques et réalistes. L’Itano Circus n’avait jamais été aussi beau et impressionnant !

Dans sa volonté de réaliser une série à la pointe de l’époque, Kawamori n’hésite pas à intégrer des séquences en images de synthèse, chose alors très rare au Japon mais dont il a pu saisir le caractère avant-gardiste lors de son voyage aux États Unis. Il le réussi de manière harmonieuse, leur donnant un régime d’image différent, puisqu’il s’agit généralement de la visualisation informatique des trajectoire à bord de la Valkyrie de Guld (un appareil piloté par la pensée), ou de plans assez impressionnants se détachant du reste de la mise en scène, par exemple un rapide travelling lors du concert de Sharon Apple qui permet de balayer l’ensemble de l’arène. Une première approche prudente mais plutôt réussie qui annonce celle totalement hybride de Blue Submarine 6, 4 ans plus tard.
Enter Yôko Kanno
Enfin, on l’a déjà évoqué plus haut, dans Macross Plus, la musique n’est pas la cerise sur le gâteau, mais bien le catalyseur indispensable qui va donner sa force à l’ensemble et le transcender. C’est le producteur de la musique Shirô Sasaki qui a poussé Kawamori à accepter Yôko Kanno comme compositrice. A l’époque, la musique de fond des anime n’était pas particulièrement valorisée, au profit de chansons-titre parfois interprétées par les comédiens de doublage. Une tendance insatisfaisante pour Sasaki qui souhaitait au contraire élever la qualité de la musique originale. C’est dans ce but qu’il insista pour engager Kanno, qui n’avait alors que peu composé pour l’animation. Cette dernière avait principalement travaillé pour le jeux vidéo et Sasaki avait pu lui faire composer des chansons pour l’anime Reincarnation – Please Save My Earth.

La compositrice signe ici une composition déterminante pour l’élaboration de son style, tant dans la versatilité pop qui sera celle de Cowboy Bebop que dans les envolées opératiques des morceaux classique qui aboutiront à son sublime travail sur Escaflowne (autre grande série crée par Shôji Kawamori). On a déjà évoqué le versant pop de Macross Plus à travers le personnage de Sharon Apple, mais il est nécessaire de souligner à quel point les compositions classiques de Yôko Kanno traduisent à merveille le plaisir de la voltige et contribuent à l’ampleur des scènes de combat aérien. Cette bande originale est absolument iconique et il suffit de réécouter les premières mesures de Voices, Torch song (le générique de fin de chaque épisodes), Break out-Cantabile ou même Idol Talk pour se retrouver transporté instantanément dans l’énergie de Macross Plus.
L’équipe de Macross Plus a capturé la foudre en bouteille, mais aussi incroyable que cela puisse paraître, ce n’était là qu’un galop d’essai qui sera encore transcendé par la suite. Shôji Kawamori retrouvera Yôko Kanno pour Escaflowne (pour lequel Watanabe réalisera 2 épisodes) et Watanabe fera aussi équipe avec la compositrice pour Cowboy Bebop avec le succès que l’on sait (Kawamori collaborant à l’épisode 18). Dans les deux cas, Sasaki – qui travaillera à de nombreuses reprises avec Kanno – sera à la production de la musique. Il produira même Samurai Champloo pour Watanabe …

Un premier envol en Blu Ray qui met les petits plats dans les grands
Pour le retour de Macross Plus en France et sa réédition en HD de ce classique, AllTheAnime n’a pas fait les choses à moitié en proposant 4 éditions différentes.
Deux de ces versions sont en édition extrêmement limitées (avec les prix correspondants). La Sharon Apple Édition met en avant la formidable bande originale de l’OAV avec pas moins de 7 disques vinyles, tandis que l’édition Ultimate (épuisée avant même la date de sortie) présente un magnifique artbook de 180 pages, bourré de documents de travail, d’illustrations et de riches interviews de l’équipe. On se penchera donc peu sur celles-ci, d’autant plus que le contenue des disques les accompagnants est le même que celui de l’édition collector Blu Ray OAV + Film qui nous intéresse ici surtout.


Cette très belle édition se présente sous la forme d’un simple et élégant boîtier noir reprenant le logo de l’OAV et l’un de ses principaux visuels. Elle contient 2 boîtiers amaray avec jaquettes imprimées recto-verso, l’un pour les OAV et l’autre pour le film et les bonus. S’y ajoutent 4 cartes reprenant de célèbres visuels de la série, et surtout, un très joli livret de 72 pages d’archives avec des illustrations, travaux sur les décors et nombreuses poses clés et genga qui mettent particulièrement en valeur le travail des animateurs, notamment sur les combats aériens évoqués plus haut. Au niveau des bonus, en dehors des clips promo, le plus intéressant se situe au niveau des interviews. Deux de Shôji Kawamori (un court message et une plus conséquente d’une quinzaine de minutes) et une longue interview de Ichirô Itano d’une durée supérieure à trente minutes. Les deux comportent leurs lots d’informations intéressantes sur la genèse de Macross Plus, mais celle d’Itano est particulièrement passionnante, notamment dans le récit qu’il fait du voyage de repérage aux États Unis. Il y détaille l’expérience de vol qu’il en a retiré et comment celle-ci s’est traduite dans la mise en scène et l’animation des séquences de dogfight. Un document très instructif sur le travail des animateurs !

Ce disque contenant film et bonus est disponible en solo dans une édition simple. Cependant, on ne saurait trop vous encourager à vous tourner vers l’édition incluant les OAV tant la narration de celles-ci paraît plus harmonieuse, en particulier dans son introduction des personnages et dans la mise en place de l’intrigue. Le film, auparavant inédit en France, n’est cependant pas à négliger car il contient un certain nombre de séquences inédites, en particulier lors du climax du film et de la conclusion, notamment concernant le personnage de Guld, quelque peu expédié dans l’OAV et qui bénéficie enfin ici d’un final à sa mesure.

La qualité d’image est particulièrement soignée. Les couleurs sont vives et la définition comme la fluidité de l’image rendent enfin pleinement justice au travail des animateurs. Si le film est présenté en VOST uniquement, les OAV incluent aussi la VF d’époque, pour laquelle on ressent une nostalgie certaine (grâce à l’excellente prestation des doubleurs d’alors), malgré quelques erreurs de traductions et contresens assez flagrants. La traduction de la VOST a, elle, était refaite avec soin, corrigeant ainsi heureusement ces erreurs. A noter d’ailleurs certaines différences dans la bande-originale entre la VF et la VOST (par exemple, ce n’est pas la même version de Voices en début d’épisode 1, ni la même musique qui accompagne le dernier dogfight entre Isamu et Guld dans l’épisode final), ce qui était déjà le cas, nous semble-t-il, à l’époque.
Une bien belle édition en somme, pour l’un des épisodes les plus aimés de la saga, qui nous fait frémir d’impatience à l’idée de découvrir la suite, à commencer par Macross Zero, préquel du début des années 2000 encore inédit en France et prévu en avril par AllTheAnime. On espère aussi prochainement pouvoir découvrir Macross 7 ainsi que Macross Frontier, eux aussi inédits chez nous, dans d’aussi bonnes conditions !

Une Grande œuvre est plus que la somme de toutes ses parts. Or Macross Plus transcende justement ses inspirations. Bien plus qu’une simple suite de Macross matinée de Top Gun, c’est une œuvre à part entière, organiquement originale et réussie. S’adressant à un publique plus adulte, c’est un chaudron bouillonnant, un creuset d’où seront forgés une future équipe de légende ; un délicieux et inoubliable prototype fait d’un alliage encore inconnu à l’époque. Macross Plus parvient non seulement à faire évoluer la franchise Macross, mais constitue aussi une œuvre matrice, déterminante tant pour Shôji Kawamori, que Shinichirô Watanabe et plus encore pour Yôko Kanno qui devient instantanément une référence de la musique d’anime. Une parfaite entrée en matière dans la saga Macross avant d’en (re)découvrir les autres opus.

©1994 BIGWEST/MACROSS PLUS PROJECT
Macross Plus est disponible en Blu Ray chez AllTheAnime en édition Collector OAV+Film, simple Film et Sharon Apple Deluxe.