Les délices de Tokyo, une émotion rare

D’un roman paru en 2013 au Japon, intitulé AN, a été tiré un film sorti en France en 2016 sous le nom de « Les délices de Tokyo ». Avec comme sujet principal les Dorayaki,des pâtisseries japonaises, et la fabrication de la pâte de haricots rouge qui les fourre, difficile de s’attendre à une œuvre aussi puissante. Et pourtant, le livre comme le film pourraient bien vous marquer pour longtemps…

Plongez dans cette belle histoire avec nous, en compagnie de Sentarô, de Tokue et de Wakana et apprenez à faire des Dorayaki !

De délicieux Dorayaki

Un roman qui s’appelait AN

Durian Sukegawa

Durian Sukegawa

En consultant la biographie de Durian SUKEGAWA, de son vrai nom Tetsuya SUKEGAWA, on comprend vite que le personnage est atypique. Écrivain, poète, mais aussi clown, l’homme est diplômé en Philosophie et en Pâtisserie. Il est également le fondateur de la Société des poètes qui hurlent, un groupe artistique dans lequel musique punk et poèmes se mélangent. 

En 2013, son roman AN, littéralement pâte de haricots, connaît un joli succès au Japon et se voit réédité en 2015, alors que le film tiré de cette œuvre sort sur les écrans. Premier roman de l’auteur traduit en France, il paraît sous le nom Les délices de Tokyo en 2016, aux Editions Le Livre de Poche et se voit attribuer le Prix des lecteurs en septembre 2017.

L’histoire nous plonge dans le quotidien de Sentarô, un ex taulard, qui doit gérer une petite boutique de Dorayaki pour rembourser une dette. Les Dorayaki sont une pâtisserie japonaise composée de deux petites galettes de pâte que l’on garni ensuite de la fameuse An, la pâte de haricot rouge sucrée.

Sentarô est loin de se plaire dans cette routine, entre un manque de passion pour le produit qu’il vend, une faible affluence de clients et des lycéennes pénibles qui viennent bruyamment squatter sa petite boutique. Jusqu’au jour où Tokue, une femme âgée de plus de 70 ans, vient postuler à une offre d’embauche dans la boutique. Sceptique au départ, Sentarô accepte finalement l’aide de cette dame après avoir goûté sa pâte de haricots rouge des plus succulentes.

La seule condition que pose Sentarô est que Tokue reste dans l’arrière-boutique, afin de ne pas effrayer les clients. En effet, ses mains sont terriblement déformées et son visage marqué par une maladie de jeunesse.

On se prend rapidement d’affection pour ce duo de personnages singuliers, tendres et touchants, rapidement complété par Wakana, une lycéenne timide et solitaire. Et sous son apparence légère, le récit cache une puissance insoupçonnée qui frappera le lecteur de plein fouet. Le passé des protagonistes resurgit, et c’est une véritable fable sur la vie que nous propose SUKEGAWA avec une Tokue qui veut transmettre cette passion pour les Dorayaki à un Sentarô moins froid qu’il ne le semble aux premiers abords.

Mêlant l’art de la pâtisserie, présenté ici comme une véritable science qui nécessite que l’on s’y plonge corps et âmes, et un aspect historique et social qui nous fait découvrir un Japon différent, Les délices de Tokyo est une petite merveille qui ne vous laissera pas indifférent.

Une adaptation cinématographique réussie

 

Kirin Kiki Délices de tokyo

Kirin Kiki dans le rôle de Tokue, dans les Délices de Tokyo

Le film Les délices de Tokyo sort en France le 27 janvier 2016 (le 30 mai 2015 au Japon). Il est réalisé par Naomi KAWASE dont c’est le 11e film, et est présenté au Festival de Cannes 2015 dans la catégorie Un certain regard.

C’est une adaptation extrêmement fidèle au roman, qui ne prend que peu de liberté avec l’histoire originelle. Si le passé des différents personnages est évoqué de façon plus évasive, au détour d’une phrase ou d’une saynète, on s’attache facilement aux protagonistes. Une mention spéciale à l’actrice Kirin KIKI qui interprète magistralement le rôle de Tokue.

Le rythme du film se veut assez lent, et le passage des saisons est symbolisé par l’état d’un cerisier présent devant la boutique que l’on voit fleurir ou perdre ses Sakura selon l’époque. Des musiques discrètes et un fond sonore travaillé, avec des rires d’enfants en provenance d’un parc voisin de la boutique de Dorayaki, nous permettent de nous immerger totalement dans le calme de ce quartier japonais.

Par rapport au livre, le film insiste plus sur la relation entre Wakana et Sentarô, ce qui permet de créer un trio intergénérationnel avec la présence de Tokue : l’étudiante qui a la vie devant soi, le gérant qui cherche un but à sa vie et la vieille dame qui veut transmettre avant de mourir. Ce schéma fonctionne bien et on se laisse emporter par ce film qui sonne parfois comme une poésie imagée.

A peu de choses près, cette adaptation réalise la prouesse de procurer au spectateur des émotions proches de celles qu’offre le livre. Un hymne à la vie et à la pâtisserie également…

 




Gastronomie nippone et cinéma, un mariage trop rare

On le sait, les Japonais partagent avec les Français ce goût pour la nourriture à la fois belle et délicieuse : pour qu’un plat soit réussi, il doit allier saveur et esthétisme. Il suffit de regarder les vitrines des restaurants nippons qui vont jusqu’à reproduire les plats qu’ils servent, à l’identique mais en plastique ou en cire, pour allécher les passants.

Il en va de même avec les pâtisseries, qui sont séparés en 2 catégories au Japon : les ‘Wagashi’, qui correspondent aux pâtisseries typiquement japonaises et les ‘Wagashi yōgashi’ qui sont les pâtisseries occidentales. Elles se doivent d’être préparées avec passion comme nous l’enseigne si bien Tokue dans Les Délices de Tokyo, et adopter une forme parfaite.

Dans cette optique, quoi de mieux que le 7e Art pour sublimer l’aspect esthétique de la cuisine nipponne ? Pourtant, très peu de films se sont aventurés sur le chemin de la gastronomie !

Avant Les délices de Tokyo, seul le magnifique Tampopo de Jûzô ITAMI (1985) a su rendre honneur à la cuisine japonaise et plus particulièrement ici au Ramen. L’héroïne Tampopo, est une veuve gérante d’une échoppe de Ramen qu’elle tente de maintenir à flots et qui pour cela, part en quête de la préparation ultime, celle qui saura satisfaire le palais de ses gourmets de clients. Entre un humour subtil et une véritable ode à ce plat japonais si typique, Tampopo est un délice à déguster absolument !




On trouve également un véritable OVNI cinématographique signé Mamoru OSHII, qui, assez loin de ses productions habituelles, nous livre en 2006, Tachiguishi Retsuden assez barré. Le film retrace l’évolution de la société japonaise de 1945 à 2006, à travers l’évolution de sa cuisine. Réalisée en Superlivemation, une technique qui donne un résultat visuel à mi-chemin entre le film d’animation et la prise de vue réelle, cette œuvre curieuse suscitera des réactions variées, selon vos goûts !

 




C’est donc du côté des Anime ou des Drama qu’il faudra se tourner pour voir la richesse de la gastronomie japonaise se développer sur vos écrans : avec le Drama Asuka (1999), qui retrace le parcours de la fille d’un fabricant de Wagashi qui rêve de marcher dans  les pas de son père, ou dans les Anime dans lesquels apparaissent fréquemment les ramen, tempura et autres takoyaki. On trouve même un Anime où le Mochi est à l’honneur avec Tamako Market !

Bonus : Faites vos propres Dorayaki et prenez-vous pour Doraemon !

Doraemon et les dorayaki

Doraemon, grand amateur de Dorayaki !

Pour en revenir au sujet principal de l’œuvre Les Délices de Tokyo, saviez-vous que cette petite pâtisserie en forme de gong (‘dora’ signifie ‘Gong’ en japonais) est le met préféré de Doraemon, le fameux chat robot qui vient du futur ? 

Si vous aussi vous souhaitez découvrir ces délicieuses pâtisseries, voici une recette facile à suivre pour obtenir de délicieux Dorayaki.

La première étape sera de faire la pâte de Haricot rouge, car après avoir visionné Les Délices de Tokyo, difficile de vous conseiller d’acheter une pâte An toute prête. Ensuite, il faudra confectionner et faire cuire les petits cercles de pâte pour finaliser vos Dorayaki.

Pour 6 Dorayaki, voici les étapes à suivre :

Faire la pâte de haricots rouge sucrée

Ingrédients :

300g de haricots Azuki
300g de sucre
1 pincée de sel
De l’eau

1.Commencez par mettre vos haricots dans une grande casserole, couvrez d’eau et portez à ébullition. Laissez bouillir pendant 5 minutes puis égouttez les haricots. Rincez votre casserole.
2.Recommencez l’opération, en plaçant à nouveau les haricots dans la casserole, couvrez d’eau et portez à ébullition. Cette fois-ci, couvrez la casserole et laissez vos Azuki cuire pendant 1h30 / 2 heures.
3.Vos haricots devraient être tendres et doivent s’écraser facilement entre vos doigts.
4.Égouttez-les à nouveau, avant de les remettre dans la casserole.
5.Ajoutez tout le sucre d’un coup, et faites cuire à feu moyen en remuant fréquemment.
6.Petit à petit, le sucre et les haricots vont former une pâte, (assez liquide mais c’est normal).
7.Quand la pâte commence à frémir dans la casserole et à prendre une jolie teinte foncée, éteignez le feu. La consistance doit être encore liquide car la pâte durcira en refroidissant.
8.Videz votre casserole dans un plat pour faire refroidir le mélange.
9.C’est prêt !

Vous pouvez conserver le AN au frigo pendant une semaine ou bien congeler la pâte.

An pour Dorayaki

Une jolie pâte de haricots rouge

Faire la pâte à Dorayaki

Ingrédients :

2 œufs
75 de sucre
1 cuillère à soupe de miel
½ cuillère à café de Bicarbonate de sodium
130 grammes de farine
Un peu d’eau

1.Dans un saladier, versez vos œufs, le sucre, le miel et mélangez jusqu’à obtention d’un mélange mousseux, à l’aide d’un fouet.
2.Tamisez la farine et ajoutez-la à la préparation.
3.A côté, mélangez 50ml d’eau avec le bicarbonate de sodium et versez le tout dans le saladier.
4.Mélangez jusqu’à obtention d’une pâte lisse.
5.Recouvrez ce mélange d’un film transparent et placez au frigo pendant 15 minutes.
6.A la sortie du frigo, la pâte sera plus consistante. N’hésitez pas à ajouter un petit peu d’eau pour la liquéfier. Il faut pouvoir la verser sans problème avec une louche !
7.Préparez une poêle, en l’huilant avant de retirer l’excès de gras ; c’est la condition sine qua non pour obtenir la jolie cuisson dorée de la pâte.
8.Avec une louche à bec verseur (ou un petit verre), versez un peu de pâte dans la poêle chaude et laissez cuire ce petit cercle environ 1 minute. Quand vous verrez de petites bulles apparaître sur la pâte, retournez-la avec une spatule !
9.Laissez cuire cette autre face 20 à 30 secondes.
10.Une fois tous vos petits cercles de pâtes cuits, il ne vous reste plus qu’à faire l’assemblage.
11.Déposez un peu de AN entre chaque gong de pâte et fermez en pressant les bords.

Vos Dorayaki sont prêts à être dégustés sur le champ ! Sinon, enveloppez-les de film et placez-les au frigo.

Recette de Dorayaki

De beaux Dorayaki prêts à être dégustés !

La pâtisserie japonaise réserve pas mal de surprises aux amateurs de douceurs sucrées. Et lorsqu’elle est abordée aussi joliment que dans le récit Les délices de Tokyo, on a qu’une envie, c’est de se plonger dans la préparation et la dégustation des plus beaux wagashi qu’on puisse imaginer !

Mickael Lesage

J’ai découvert le Japon par le biais d’un tome de Dragon Ball il y a fort longtemps et depuis, ce pays n’a jamais quitté mon cœur…ni mon estomac ! Aussi changeant qu’un Tanuki, je m’intéresse au passé, au présent et au futur du Japon et j’essaie, à travers mes articles, de distiller un peu de cette culture admirable.

3 réponses

  1. 20 mars 2018

    […] ! D’ailleurs, Journal du Japon vous proposait il n’y a pas très longtemps une recette inspirée du livre Les délices de Tokyo, roman mettant à l’honneur ce bon gâteau populaire […]

  2. 9 mai 2019

    […] JE VEUX MANGER TON PANCRÉAS, puis avec le dernier film de Kirin Kiki, grand-mère touchant de LES DÉLICES DE TOKYO (Naomi KAWASE, 2015) qui nous a quitté il y a quelques mois et illumine DANS UN JARDIN QU’ON […]

  3. 5 juillet 2019

    […] Nous vous avons déjà parlé de ce livre émouvant, brillamment adapté au cinéma par Naomi KAWASE dans cet article. […]

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