Festival du Film de Fesses : Paris et les postérieurs japonais

« Montre tes nippons » – Tel sera le mot d’ordre dans les cinémas du Quartier Latin de Paris – Reflet Médicis, La Filmothèque et Les 3 Luxembourg – du 28 juin au 1er juillet à l’occasion de la cinquième édition du Festival du Film de Fesses. Alors que Facebook censure de manière absurde la page du festival et témoigne à nouveau de sa pudibonderie, Journal du Japon a souhaité jeter un petit coup d’œil – discret – à cette rétrospective du cinéma érotique japonais des années 1960 à nos jours.

Festival du film de fesses 2018 - Montre tes nippons

Postérieur #1: KUMASHIRO Tatsumi

La programmation de cette cinquième édition du Festival du Film de Fesses s’arc-boute principalement autour du réalisateur KUMASHIRO Tatsumi, véritable pilier du cinéma érotique japonais. Surnommé “Le Roi des Roman Porno de la Nikkatsu”, KUMASHIRO est un réalisateur très prolifique qui a notamment signé une douzaine de films entre 1972 et 1974 et qui s’est imposé comme un des cinéastes au succès le plus constant dans l’histoire du cinéma japonais.

C’est lorsque la Nikkatsu a commencé sa nouvelle ligne éditoriale axée sur l’érotisme – le Roman Porno – pour empêcher le public de fuir vers la télévision, que KUMASHIRO a tiré son épingle du jeu pour devenir le réalisateur le plus émérite et accompli du studio. Bien qu’il soit né en 1927 – et ainsi l’un des réalisateurs les plus âgés du milieu -, KUMASHIRO fait parti des cinéastes ayant le mieux capté le Japon des années 1970, où les désenchantements des échecs révolutionnaires composaient l’essence même de la société japonaise.

Le cinéma féministe, libertaire et anti-autoritaire de KUMASHIRO Tatsumi sera exploré au cours d’une courte rétrospective de six films par le Festival du Film de Fesses. On peut notamment noter la présence de Sayuri, strip-teaseuse, l’une de ses réalisations les plus reconnues et ayant connu un véritable succès. Interprétant là son propre rôle, ICHIJO Sayuri – l’une des strip-teaseuse les plus célèbres de l’époque – amène le spectateur à découvrir la réalité de la vie des travailleurs du sexe dans le Japon des années 1970.

 

Les Amants mouillés

Les Amants mouillés de Tatsumi Kumashoro

Rue de la joie (Jeudi 28 Juin – 20h00 – La Filmothèque)

La vie de cinq filles de joie dans une maison close de Tamanoi, célèbre quartier des plaisirs de Tokyo.

La femme aux cheveux rouges (vendredi 29 Juin – 14h00 – La Filmothèque)

Kozo et Takao, deux ouvriers, abusent de la fille de leur patron. Leur vie va se transformer au contact d’une femme aux cheveux rouges, qu’ils recueillent au bord de la route un jour de pluie.

Désirs humides (Vendredi 29 Juin – 15h30 – La Filmothèque)

Hosuke, petit proxénète trouve un porte-feuille rempli de billets et décide de quitter Kamagasaki pour partir en voyage. Sur la route, il rencontre Meiko, qu’il persuade de devenir strip-teaseuse et s’installe avec elle dans le théâtre où travaille sa première amante, Yuko.

Sayuri, strip-teaseuse (Vendredi 29 Juin – 20h30 – La Filmothèque)

Dans les cabarets populaires d’Osaka, la jeune Harumi s’entraine avec une candeur stupéfiante pour devenir une grande strip-teaseuse, et rêve de supplanter la célèbre Ichijo Sayuri.

Extase de la rose noire (Samedi 30 Juin – 18h15 – La Filmothèque)

Juzo, minable réalisateur de pornos clandestins, se retrouve bien embêté lorsque Meiko, son actrice principale, tombe enceinte et lui annonce qu’elle veut faire une pause.

Les Amants mouillés (Dimanche 1er Juillet – 18h00 – La Filmothèque)

Après une longue errance à travers le Japon, le jeune Katsu revient dans son village natal pour fuir les représailles des yakuzas. Il y commence des aventures avec Katsu, sa patronne délaissée par son époux, ainsi qu’avec Yoko qu’il épie faisant l’amour.

https://www.youtube.com/watch?v=uwZXXk1qlMg

Postérieur #2 : YAMAMOTO Eiichi

Nuit Eiichi Yamamoto (Samedi 30 Juin – 00h00 – Les 3 Luxembourg)

Le temps d’une nuit aux 3 Luxembourg, le Festival de Film de Fesses propose de voir – ou revoir – trois des grands classiques de l’animation signés YAMAMOTO Eiichi : Les Milles et une nuits, Cleopatra et Belladonna la sorcière (ou La Belladone de la tristesse). Connu notamment pour son travail chez Mushi Production aux côtés de TEZUKA Osamu, YAMAMOTO est sorti de l’ombre avec la série Le Roi Léo en 1965, bien qu’il réalise depuis 1962. De 1969 à 1973, YAMAMOTO réalise une série de trois films érotiques – indépendants les uns des autres – réunis sous le nom « Animerama » et signe ainsi les premiers films d’animation pour adulte au Japon.

Si les trois films comportent de nombreuses similarités telles que l’usage du rock psychédélique en bande originale ou un érotisme reposant principalement sur la suggestion, Belladona la sorcière se démarque fortement de ces deux contemporains par ses allures expérimentales composant un véritable « trip » psychédélique à l’érotisme certain. Cependant, la nuit proposée par le Festival du Film de Fesses sera aussi de voir sur grands écrans les deux volets des Animerama, bien moins accessibles dans l’Hexagone.

Les milles et une nuits

Aladin est un jeune vendeur d’eau de Bagdad sans le sou, qui tombe amoureux d’une esclave nommée Miriam. Ils passent une nuit délicieuse ensemble, mais sont séparés par des bandits. Miriam mourra quelque temps après, laissant Aladin désespéré. Quinze ans après, ce dernier devient roi et cherche alors à se venger.

Cleopatra

Trois hommes s’embarquent dans une machine à remonter le temps, jusqu’à l’époque de Cléopâtre et de l’Égypte ancienne. Mais bien loin de l’idée qu’ils s’en faisaient, ils débarquent dans un monde où les artifices et l’érotisme règnent.

Belladonna la sorcière

Jeanne, abusée par le seigneur de son village, pactise avec le Diable dans l’espoir d’obtenir vengeance. Métamorphosée par cette alliance, elle se réfugie dans une étrange vallée, la Belladonna.




Autres postérieurs

Outre ses succinctes rétrospectives autour des œuvres de KUMASHIRO Tatsumi et de YAMAMOTO Eiichi, le Festival du Film de Fesses garnit sa programmation « Montre tes nippons » de nombreux autres grands noms du cinéma japonais. Au menu, ADACHI Masao, MURAKAMI Ryū, SONO Sion ou encore TANAKA Noboru.

 

Abnormal Family (Vendredi 29 Juin – 17h15 – La Filmothèque)

La vie d’une famille se complique lorsque le frère aîné Koichi ramène Yuriko, sa nouvelle épouse à l’appétit sexuel vorace. Kazuo, son jeune frère, voit en elle une source de libération sexuelle.

Si sur le papier un hommage à OZU Yasujiro en version érotique peut surprendre, force est de constater que SUO Masayuki transpose cela avec brio sur pellicule. Abnormal Family est le premier long-métrage de ce réalisateur qui se fera connaître en 1996 avec Shall We Dance ? et témoigne d’ores et déjà de ce qui fera l’essence de son cinéma.

 

Inflatable Sex Doll of the Wastelands (Vendredi 29 Juin – 18h45 – La Filmothèque)

Un détective privé est engagé pour retrouver une femme qui aurait été assassinée dans un snuff movie. Cette femme s’avère bel et bien vivante et le détective aspiré dans une liaison torride avec elle, en vient à questionner son sens de la réalité.

Écrit et réalisé par YAMATOYA Atsushi, scénariste sur La Marque du Tueur de SUZUKI Seijun, Inflatable Sex Doll of the Wastelands est film expérimental avec notamment Tatsumi Noriko – surnommée « la première Reine des pink eiga » – dans le rôle principal et le pianiste jazz YAMASHITA Yosuke à la musique. Bien qu’il s’agisse d’un premier film à la réalisation pour YAMATOYA, Inflatable Sex Doll of the Wastelands est devenu l’un des films majeurs des années 1960 au Japon.

 

Guilty of Romance (Vendredi 29 Juin – 22h00 – La Filmothèque)

Izumi est mariée à un célèbre romancier romantique mais leur vie semble n’être qu’une simple répétition sans romance. Elle décide alors de suivre ses désirs et accepte de poser nue et de mimer une relation sexuelle devant la caméra. Un jour, le corps d’une personne assassinée est retrouvé dans le quartier des «love hotels».

Il est convenu aujourd’hui que SONO Sion est l’un des réalisateurs les plus appréciés de la rédaction de Journal du Japon. Avec Guilty of Romance en 2011, SONO signe un film entièrement à la gloire de sa femme et muse KAGURAZAKA Megumi. Explorant le quartier de Maruyama-Cho à Shibuya dans Tokyo – connu pour ses love hotels -, Guilty of Romance se dresse tels des limbes emplies de couleurs où le sens même d’émancipation est poussé à son paroxysme. L’occasion de redécouvrir ce film sur grand écran, bien qu’il soit regrettable que la projection propose la version internationale du film qui est amputée de trente minutes par rapport à la version originale.




Gushing Prayer (Samedi 30 Juin – 14h00 – La Filmothèque)

Les lycéens Yasuko, Yôichi, Kôichi et Bill veulent échapper à ce monde étouffant et aliénant qui les écrase en s’adonnant au sexe collectif : ils espèrent forger leur propre vie loin d’une société adulte corrompue.

Lorsque l’on s’intéresse au cinéma érotique ou au cinéma politique japonais, il est difficile de passer à côté de ADACHI Masao. Proche collaborateur de WAKAMATSU Koji, il en est généralement le scénariste mais a occasionnellement enfilé la casquette de réalisateur. Connu pour son ancrage politique dans l’extrême-gauche, on retrouve son nom – ou son pseudonyme Izuru Deguchi – dans les films les plus politiques de l’époque tels que La Pendaison de OSHIMA Nagisa ou Va, va, vierge pour la deuxième fois de WAKAMATSU Koji. En tant que réalisateur, c’est son A.K.A. Serial Killer qui est principalement connu puisqu’il y développe la « Théorie du paysage ». Ce réalisateur très politisé et très théorique pourra alors être découvert sur grand écran avec Gushing Prayer, l’un de ses derniers films en 1971 avant de rejoindre l’Armée Rouge Japonaise au Liban.

 

Fleur Secrète (Samedi 30 Juin – 16h15 – La Filmothèque)

Senzô Tôyama, patron d’une importante société, demande à son jeune employé Makato, impotent depuis son adolescence, d’enlever sa femme Shizuko afin de l’initier aux plaisirs interdits.

Avec Fleur Secrète, KONUMA Masaru propose en 1974 la première adaptation d’un roman de DAN Oniroku en Roman Porno. Dans la continuité de ce film, de nombreux films de la Nikkatsu adapteront les histoires du plus grand écrivain SM du Japon. Non content de lancer une série d’adaptations, Fleur Secrète a eu aussi comme effet de propulser TANI Naomi – actrice principale du film – comme figure principale du Roman Porno japonais.

 

Funérailles des roses (Samedi 30 Juin – 18h00 – Le Reflet Médicis)

Tokyo, fin des années 1960. Eddie, jeune drag-queen, est la favorite de Gonda, propriétaire du bar Genet où elle travaille. Cette relation provoque la jalousie de la maîtresse de Gonda, Leda, drag-queen plus âgée et matronne du bar.

En proposant Les Funérailles des roses de MATSUMOTO Toshio, le Festival du Film de Fesses met en avant l’une des œuvres les plus importantes du cinéma queer japonais mais aussi l’un des films les plus innovants visuellement du cinéma japonais. Épousant à la perfection l’ère du temps en jonglant entre performances de rue, discours sur le cinéma, questionnements sexuels et identitaires tout en offrant des descriptions documentaires de la vie des drag-queens au Japon, MATSUMOTO a réalisé avec Les Funérailles des roses l’un des films les plus importants du cinéma japonais des années 1970.




Marché Sexuel des filles (Samedi 30 Juin – 20h00 – La Filmothèque)

La vie difficile des prostituées du quartier pauvre de Kamagasaki à Osaka à travers l’histoire de Tome, dix-neuf ans, qui, tout comme sa mère, une rivale, vend ses charmes.

Le Marché Sexuel des filles de TANAKA Noboru est aujourd’hui est l’un des Romans Porno de la Nikkatsu les plus connus en France. Ouvertement pessimiste, le film réalisé en 1974 est l’une des principales fulgurances du réalisateur qui s’est illustré en 1975 avec La Véritable histoire d’Abe Sada. Si l’interprétation de SERI Meika est l’une des plus marquantes des films des films issus de la Nikkatsu à cette période, le film de TANAKA est tout aussi marquant tant il témoigne avec aisance la richesse du cinéma érotique japonais des années 1970 qui trouvait l’équilibre parfait entre cinéma pour adulte et cinéma politique.

 

Tokyo Décadence (Samedi 30 Juin – 22h00 – La Filmothèque)

Douée pour la langue des signes, Ai, 22 ans, est au chômage. Elle accepte de devenir hôtesse pour une agence spécialisée dans les échanges sado-masochistes.

Par le passé, Journal du Japon vous avait d’ores et déjà parlé de Tokyo Décadence de MURAKAMI Ryū lors de l’article Tokyo Décadence : Errances sexuelles d’une ville sans espoir. « Enivrant brûlot érotique », Tokyo Décadence est un long-métrage que MURAKAMI Ryū – romancier de formation – adapte de sa propre nouvelle Topaz qu’il avait publié en 1986. A l’image de son style littéraire, Tokyo Décadence est un film froid suivant les errances nocturnes de Ai allant de rendez-vous sado-masochistes en rendez-vous sadomasochistes. MURAKAMI signe ici une ode acerbe d’un « Japon pourri » où il ne réside désormais ni avenir ni espoir.




Body Trouble (Dimanche 1er Juillet – 15h45 – La Filmothèque)

Un matin, un jeune homme dépressif nommé Hiromi se réveille dans le corps d’une femme. Déchiré entre le genre et le sexe, il cherche à tâtons une nouvelle façon de vivre.

Si le cinéma réalisé par des femmes n’est aucunement un genre – et ne sera jamais un genre –, Body Trouble est un film érotique japonais réalisé en 2014 par HAMANO Sachi qui, en utilisant simplement l’astuce scénaristique menant un homme à se réveiller dans le corps d’une femme, apporte un regard nouveau dans le cinéma érotique japonais. En présence de la réalisatrice, la séance sera l’occasion d’échanger avec une cinéaste évoluant dans l’actuelle industrie du cinéma japonais.

 

Wet Woman In The Wind (Dimanche 1er Juillet – 20h00 – La Filmothèque)

Kosuke, un acteur de théâtre qui a décidé de vivre en ermite au fond d’une forêt, se retrouve harcelé par Shiori, une jeune serveuse envahissante qui ne veut plus le quitter.

Si Journal du Japon était déjà revenu sur Wet Woman In The Wind à l’occasion de son article Roman Porno : Film rose nouveau cru à l’occasion de son retour sur les cinq films en hommage au Roman Porno pour les 45 ans de la Nikkatsu, le Festival du Film de Fesses permet aux spectateurs parisiens de (re)découvrir le film après son passage à l’édition 2016 de l’Etrange Festival. Réalisé par SHIOTA Akihiko, l’un des réalisateurs principaux de ce qu’on appelle parfois « nouvelle vague japonaise des années 1990 », Wet Woman In The Wind est un hommage à KUMASHIRO Tatsumi et son Les Amants Mouillés. Dimanche 1er Juillet, les deux films – celui de SHIOTA et celui de KUMASHIRO – viendront conclure cette cinquième édition du Festival du Film de Fesses.




En somme, un programmation riche en saveur et qui annonce un weekend de quatre jours d’ores et déjà extatique. Cinéphiles et amateurs de fesses pourront dès lors réviser leurs classiques du cinéma érotique japonais qui est l’un des plus éclectiques et inventifs. Cependant, la cinquième édition du Festival du Film de Fesses n’est pas uniquement composé la rétrospective « Montre tes nippons » et nous vous inventons grandement à aller vous rincer l’œil avec le Septième Art, notamment – comment résister – à la projection Samedi 30 Juin au Reflet Médicis du sublime La Saveur de la Pastèque du taïwanais Tsai Ming-Ling que le Festival du Film de Fesses propose en odorama !

 

Programme détaillé :

https://www.lefff.fr/programme

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